Guidés par Buvette dans notre labyrinthe intérieur
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Auteur·ice : Romain
27/03/2019

Guidés par Buvette dans notre labyrinthe intérieur

Après 10 ans avec la musique pour priorité, c’est bien son tout premier EP que Buvette nous a offert début mars avec Life. Nous vous avions déjà évoqué les qualités de l’aperçu de cet EP à l’occasion du single In Real Life et de son clip l’illustrant de façon sobre et troublante. On a pu le rencontrer à l’occasion de la soirée donnée par son label, Pan European Recording, et on en a profité pour lui poser toutes les questions qu’on avait. Prêt à rentrer dans le maze ?

 

La Vague Parallèle : Est-ce qu’on se ferait pas une courte présentation de l’histoire de Buvette pour commencer en douceur ?

Buvette : Cédric Jean Pierre Streuli, né le 10 janvier 1986 en Suisse, je voulais élargir mon champs d’activité musicale donc j’ai lancé un projet solo en 2009 il y a 10 ans. J’étais batteur et j’avais vraiment envie d’avoir plus de contrôle sur la musique, les paroles. Il y a eu une période de transition ou j’ai fait le groupe et buvette à côté. Et à partir du moment où j’avais ce projet solo je me suis retrouvé à pouvoir voyager beaucoup, en 2010, j’avais booké trois concerts depuis la suisse à new york, j’y suis allé trois semaines alors que je n’y étais jamais allé, au final j’en ai fait 10, en jouant à des teufs d’ateliers, des vernissages, dans des jardins de rencontres de l’avant veille. J’ai pas mal bougé aussi après, au canada, au Mexique, en Europe de l’Est, ça honnêtement aujourd’hui tous ces voyages ça me manque beaucoup. C’est cool de pouvoir confronter sa musique à des boliviens, ou d’un quartier de Toronto. Même si bien sûr je suis entouré de gens qui font des choses superbes, de façon très professionnelle, ma musique à bien plus d’intérêt à vivre comme ça.

Pour reprendre ta question, en 4 mots, je suis un mec né dans les montagnes en suisse qui fait de la musique tout seul et toujours sous différentes formes depuis 10 ans.

 

LVP : T’es un autodidacte de la musique, qu’est ce que tu penses de tous ces profanes qui passent par l’étape solfège ?

Buvette : Pour le coup il y a quelque chose que je me dis au moins une fois par semaine, c’est que j’aimerais vraiment apprendre le solfège simplement pour pouvoir faciliter la communication quand je répète avec Charlie (pour sa formation live ndlr). Après à côté de ça j’ai un anti académisme revendiqué (rires), je pense que parfois la sur connaissance théorique va fermer des portes plutôt qu’en ouvrir, à un point ou tout à coup, je vais plus pouvoir m’autoriser à jouer sur ces deux accords pendant une heure et demi, et laisser l’énergie prendre le contrôle parce que les accords sont peut-être trop simples. Tu vas tout intellectualiser, comme dans plein d’autres domaines d’ailleurs. Quand tu fais par exemple les beaux arts ou une école d’arts visuels hyper classique, ça va être très difficile derrière de sortir de ça. Évidemment tout dépend des profils, mais j’imagine que tu vas plus facilement te retrouver à vouloir défendre ce truc que t’as galéré à apprendre.

LVP : Tu parles parfois de rider des motorbikes, de conduire des brand new cars.. T’as ton permis ?

Buvette : Alors moi je suis plutôt vélo, mais pour le cas de Staring At The Line c’est un morceau qui parle de mon frère qui a beaucoup voyagé à moto, maintenant il voyage à vélo, il est en Amérique du Sud là en ce moment.

LVP : J’étais à ta performance Living In A Painting avec Maya aux musée des Abattoirs à Toulouse il y a un peu plus d’un an, est-ce que tu peux nous parler de ce projet ? Est-ce qu’il est toujours d’actualité ? Comment vous vous êtes rencontrés avec Maya Rochat ?

Buvette : Bonne question, on en a fait une ya trois semaines à Lausanne au théâtre de l’Arsenic, pour la première fois à la maison. Maya elle vient de suisse aussi, on s’est rencontrés par des amis en commun, et on a été colocataires par la suite, à 8 dans un manoir. Au début c’était pas comme ce que t’as pu voir aux abattoirs, c’était un peu plus réduit. La première fois c’était dans la galerie qui la représente à Paris chez Olivier Robert, elle avait juste un projo, et moi assis par terre avec un synthé et un sampler. Et ça a évolué en ce que t’as pu voir. On l’a fait une petite dizaine de fois maximum, mais c’est toujours des formats différents, petites galeries, grands musées… Il va peut-être y avoir une date cet été d’ailleurs. Ce qui est bien avec ces perfo c’est qu’on sort vraiment du format concert, avec tes morceaux que le public attend. Là c’est plus libre, plus ambiance sonore sans pour autant tomber dans la musique ambiant. Ça m’amène vers des idées que je développe ensuite pour arriver à créer un nouveau morceau parfois.

 

LVP : Et du coup il y a des liens entre vos travaux ? A Rock Is A River son livre et Concrete River un de tes morceaux par exemple

Buvette : Oui carrément, Living In A Painting qui est le nom de la performance c’est le titre d’un de mes sons, et le titre A Rock Is A River est inspiré du morceau Concrete River.

LVP : Tu fais tous tes morceaux en anglais excepté quelques uns en espagnol, El Nuevo Paraiso par exemple, parle nous un peu de tes influences hispaniques et du choix de la langue ?

Buvette : Après une rencontre j’ai vécu deux ans et demi au Mexique, ça a ouvert un nouveau pan de ma vie, je suis hyper attaché attaché à ce pays, à la culture latino-américaine. J’y suis retourné voir mon frère au Pérou il n’y a pas si longtemps.

En ce qui concerne l’anglais ça me permet de toucher plus de monde. Lausanne d’où je viens en Suisse, il me semble que c’est la ville avec le plus grand taux d’expats, notamment grâce à une école internationale. J’ai appris à parler anglais là bas quand j’étais petit, et j’ai bossé dans un bar où je parlais anglais à longueur de journée. En fait il faut voir Buvette comme un nom choisi uniquement pour sa phonétique, pas pour sa signification. C’est comme un mot qui existerait en plusieurs langue comme… Justice. Ce qui est sûr c’est que si jamais l’envie me prend de chanter en français, je ferai une sorte de retour à zéro, partir sur quelque chose de différent.

LVP : Est-ce que tu connais Timber Timbre ? Il y a quelques similitudes dans la puissance minimaliste de ses morceaux bien que le style musicale ne soit pas vraiment identique.

Buvette : Oui bien sûr j’aime beaucoup, c’est incroyable le côté minimaliste des ses morceaux, sa musique est presque plus dans les silences. Beaucoup de groupes seraient tombés dans le piège de rajouter des pistes, rechercher la puissance par le remplissage, mais lui cherche plutôt le truc feutré, et la puissance est dans la respiration finalement.

LVP : Tes lives ont évolué en 10 ans de concerts ?

Buvette : À la base je jouais seul, pendant 6 ans, et arrivé à Elasticity, je sentais que techniquement j’arrivais un peu aux limites. Qu’une fois arrivé sur scène j’allais pas juste arriver avec un sampler pour passer et il me fallait un groupe pour servir mon propos. Du coup on a entamé la tournée en groupe avec quelques guests parfois, Laurent Barden de Poni Hoax qui est venu jouer du sax deux trois fois, Sarah Louise de Musique Chienne qui était venue au vibraphone. Après j’ai continué à faire de la musique et j’en ai eu un peu marre du groupe, je sentais que j’étais en train de dévier, que j’avais envie de revenir à un truc plus indépendant, plus mobile. Donc j’ai commencé à bosser avec Rémi Sauzedde, Appolo Noir, avec qui j’ai produit l’EP Life. Il m’a présenté Charlie pour m’accompagner en live. Là je suis arrivé à une formule qui me parle vraiment je crois. Ça permet d’échanger sur la musique sans trop d’inertie.

 

LVP : Pourquoi le thème de la mythologie grecque pour cet EP ? Et plus précisément, pourquoi les canards au début et à la fin du clip de In Real Life ?

Buvette : Pour les canards c’est quelque chose comme un bec en sabot du Nil plus exactement ! C’est une idée de Joseph Bird le réal, c’est le premier truc dont il a parlé dans son synopsis il me semble, j’ai pas trop bataillé. En fait tout le clip se passe dans cet oiseau assez effrayant.

Concernant la mythologie ce que j’aime c’est le côté vraiment intemporel et universel de ces histoires. Dans Deep Morpheus je parle de Morphée, la déesse du sommeil et du rêve, et au final elle représentera toujours ça quoi qu’il arrive, j’aurais pu raconter la même histoire il y a 500 ans ou 200 ans dans le futur, la référence aurait toujours été saisie. Quand tu commences à t’y intéresser tu te rends compte que c’est sans fin et vraiment passionnant. Dans The Maze, le dernier morceau, c’est une métaphore par rapport au labyrinthe qu’on a tous dans notre cerveau, le fait qu’on doive s’y retrouver, se souvenir des endroits où on est déjà passé. J’aime rester assez vague dans mes morceaux pour que chacun puisse les interpréter à sa manière.

LVP : L’album arrive bientôt ?

Buvette : Alors pas tant que ça, un premier extrait devrait sortir avant l’été et d’autres à la fin de l’année. En fait cet EP est un peu l’étalon de l’album, il va définir plus ou moins tout ce qu’on pourra y retrouver, des morceaux chantés, certains très rythmés, d’autres sans beat. Il faut le voir comme la préface de l’album à venir, comme le pilote de Twin Peaks.

Son EP Life est disponible sur toutes les plateformes de stream et vous pourrez le retrouver dans la vie réelle à l’occasion de sa release party au Point Éphémère le 8 mai prochain.

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