La Route du Rock 2014
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Auteur·ice : Clément Bacq
10/09/2014

La Route du Rock 2014

Après avoir presque (enfin) digéré la nostalgie post-festival, il est maintenant grand temps de faire le bilan de cette 24ème édition de La Route Du Rock. Une nouvelle édition de la Route du Rock, c’est accepter de sacrifier une paire de chaussures dans la boue bretonne, c’est ne pas résister à l’appel de la galette saucisse et c’est surtout succomber à une des meilleures affiches de l’été. Avec un line-up à faire pâlir les plus grosses pointures françaises, la Route du Rock s’impose au fil des années comme un bon gros cornet de frites de lendemain de cuite. Une évidence.

Une partie de l’équipe a donc décidé d’affronter le camping et ses traditions (Bob Marley, Wonderwall, bières… Toi même tu sais), et l’autre partie a décidé de profiter de la douceur de Saint-Malo Intramuros et de la tendresse d’un lit et d’une douche bien chaude à l’hôtel.

Deux poids, deux mesures. Deux décisions finalement lourdes de conséquences, puisque LA BOUE, la crasse et la fatigue auront été les ennemis de la première équipe, tandis que LES NAVETTES FANTOMES (sensées transporter tous le joli petit monde de Saint-Malo au fort de Saint-Père-Marc-en-Poulet) auront été le cauchemar de la seconde équipe.

En bref, l’organisation de ce festival aura fait quelques mécontents. (Alerte euphémisme.) Mais c’est aussi ça un festival : un savant mélange de sentiments contradictoires. Cette édition n’aura pas échappé pas à la règle. Rire, déception, larmes (un peu), joie (beaucoup).

Passons maintenant au cœur de l’action. Cette Route du Rock, même ensevelie sous la boue, nous promettait des étoiles dans les yeux et des nœuds dans le ventre.

Bingo.

Le démarrage de cette première journée au Fort de Saint Père se fait… lentement. A peine arrivés devant la grande scène, les War on Drugs visiblement en forme peinent à nous entrainer dans leur danse. Face à des festivaliers trempés, semblables à des pingouins dans leurs ponchos de pluie (on n’arrête pas le progrès), chaussés de leurs fidèles bottes, le groupe de Philadelphie ne parvient juste pas à convaincre. Next !

Après avoir repris quelques forces au bar, un Kurt Vile en sous-régime parvient (presque) à nous endormir sous une pluie toujours diluvienne. Un set lent et répétitif qui déçoit. On s’impatiente gentiment, impatients d’entendre la suite.

Thee Oh Sees entame le processus de réveil avec une formule efficace qui nous fait taper du pied, bon certes, dans la boue, mais ça reste mieux que rien. Des gros riffs qui tachent, ça fonctionne sans faire de miracles. On n’en demandait pas plus pour le moment.

Il faut donc attendre plus tard dans la soirée notre salut. Une galette-saucisse et un cidre plus tard, Caribou réveille la foule, ou du moins leurs pieds, avec un concert puissant et un enchainement mystique Odessa – Can’t Do Without You – Sun. Il y a une chouette ambiance et belles lumières, on se laisse prendre au jeu.

Darkside viendra nous mettre la gifle du jour que nous avions tant attendue. Dans une ambiance apocalyptique que la pluie bretonne ne parvient pas à apaiser, imaginez Nicolas Jaar et Dave Harrington plantés sur scène tels deux demi-dieux, les projecteurs et la fumée ne laissant apparaître que  leurs deux silhouettes.

C’est dans ce contexte qu’ils assènent à nos petits corps fatigués leurs vagues de blues et de sexe avec Paper Trails, Freaks, Go Home et The Only Shrine I’ve Seen. Inoubliable.

Les attentes du deuxième jour, on ne va pas se le cacher, sont immenses. La programmation qui rend fou. Slowdive, Portishead, Liars, Moderat et j’en passe. Pardon aux autres, loupés pour cause de navette fantôme. On a eu peur, très peur. « Est-ce qu’on va louper Portishead aussi ? » Impensable. Arrivée au festival qui affiche complet (logique), on arrive en sueur (et oui tout est possible en Bretagne, mec !), le cœur battant la chamade devant Slowdive. Le groupe a vieilli mais n’a pas perdu la main et nous gâte pendant plus d’une heure du meilleur de son répertoire. La voix de Rachel Goswell est intacte et nous colle le frisson. Le groupe nous donne dans une caresse un aperçu de la jeunesse de nos rêves. Sommet du set : Souvlaki Space Station et When the Sun Hits.

Très vite, la nuit tombe et quelques bières plus tard, c’est le drame. Portishead commence dans quelques minutes mais cette envie irrépressible de se soulager va pourrir le set. Il faut courir. User des pires stratagèmes pour gagner 30 places dans une file. A la guerre comme à la guerre. En environ 4 minutes 56, de retour au meilleur spot, en face de Beth Gibbons, après avoir failli mourir près de 23 fois dans une foule qui se fait de plus en plus compacte. Images, puis les premières notes de Silence. Peu à peu le groupe monte sur scène et la magie peu commencer. Le son, la tristesse et l’alchimie du quintet sont intacts. Décharge émotionnelle, et coups de poignards dans le bide. Ce Machine Gun, et globalement toute la setlist, quasi parfaite nous auront littéralement anéantis.

Le concert des Liars n’a pas vraiment de substance, on a beau faire l’effort, les titres N°1 Against The Rush et le nouveau Mess On a Mission attirent tout de même notre attention, et puis en l’espace de quelques instants, tout est fini. Portishead a pris tout notre jus, il ne reste plus rien, circulez.

Nous sommes probablement un peu saouls, fatigués, et nous avons le cœur très serré.

Dernier jour. Détour salvateur par la plage. Le temps est superbe, enfin comprenez pour la Bretagne ! On sue même en dégustant cette délicieuse bière sur la terrasse du fameux bar de la plage ! Impensable 24h plus tôt. Du son dans les oreilles, pieds nus dans le sable, de vrais touristes. La seule différence du jour : on ne se fera plus avoir par ces saloperies de navettes. Non mais ho ! On prévoit notre coup,  impensable, on ne peut pas louper les pitreries de l’ami Mac Demarco. Avec son tee-shirt des Simpsons,  toujours la clope au bec, il met la foule dans sa poche avec deux trois vannes et quelques (très) bonnes chansons. Une corde cassée plus tard, ses musicos improvisent une reprise de Yellow de Coldplay. Grand Prix RDR 2014 du meilleur lol et du meilleur slam – sur la fin du set, clope au bec- . Décidemment, 2014 est une bonne année pour le Mac.

A peine le temps de se retourner et de se désaltérer, Baxter Dury entre en scène. On aurait pu remettre en cause le choix de l’horaire, de la grande scène, mais il n’en est rien. Le crooner britannique remporte l’adhésion du public ; les garçons veulent lui ressembler et il fait danser les filles.

On a finalement le temps de rejoindre sans encombre la scène des remparts. La nuit est maintenant tombée, et on attend Toy avec une certaine impatience. Le set du groupe londonien est maintenant bien rodé. Toy déploie son son avec fougue et intensité, pas d’instant mort, une jolie décharge sonique qui se termine en apothéose avec le single de leur deuxième album, Join the Dots.

Le charisme, voilà ce qui a probablement manqué à Temples qui investit la grande scène. Le groupe l’admettra lui même, le chanteur déclarant que c’est la première fois que le groupe joue devant autant de personnes. Malgré quelques bons moments, on pense notamment à Move with the Season, ou Mesmerise, le concert ne décolle pas et le public est dissipé. Dommage. Gageons que les quatre garçons parviendront à nourrir une identité plus personnelle, s’affirmer sur scène et faire oublier à certains leurs remarques de « pâle copie »

Un peu plus tard, Jamie XX distille son électro toute en retenue et livre un set que les Chemical Brothers dans leurs grandes heures n’auraient pas dénigré, un set qui fera même danser les plus réticents.

Todd Terje offre quant à lui un final de dingue et nous met une dernière baffe pour s’assurer qu’on n’oublie pas cette 24ème édition, (Inspector Norse en live les gars….)

Retour difficile donc. Ici on fait déjà des pronostics sur les artistes de l’année prochaine (Aphex Twin ? The Jesus & Mary Chain ? ), le tout avec un goût persistant de galette saucisse en bouche.

A l’année prochaine pour sûr Marc-en-Poulet.

 

PS : Ah ouais, on a vu Real Estate aussi. Oups. Et ça bande mou.

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