Mac DeMarco, cet attachant lonesome cowboy
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Auteur·ice : Victor Houillon
10/05/2019

Mac DeMarco, cet attachant lonesome cowboy

Tout a été dit sur l’oiseau. Génie lo-fi pour les uns, personnage surcôté pour les autres, toujours est-il que tout le monde s’accorde à voir en lui une âme attachante et sincère. Depuis les premiers balbutiements alcoolisés de Makeout Videotape en 2008, celui qui se définit lui-même comme “thenworld’s richest bum” s’est assagi, tout en gardant cette simplicité et cette bonhommie qui font de lui un véritable cliché canadien. Après This Old Dog en 2017, Mac DeMarco se réinvente cette fois-ci en cowboy pour le premier album du tout nouveau Mac’s Record Label.

Boy Pablo, Fantastic Mister Zguy, Pasta Grows On Trees… Si le succès d’un artiste se mesure au nombre de projets qu’il a influencé, Mac DeMarco est la réussite de la décennie. Si les années 2000 avaient marqué le retour du rock énervé par la folie des Strokes, l’heure est désormais au retour au chill. Un chill personnifié par le slacker préféré des médias, dont les performances sont à mi-chemin entre le concert et le one-man show. Quoiqu’il en soit, deux ans après un album plus sombre que les précédents adressé à un père absent, on est curieux de voir quel chemin va désormais emprunter le canadien.

Alors qu’on avait peur qu’il s’enferme dans une parodie de lui-même, le Mac entame le disque tambour battant par la chanson éponyme Here Come’s The CowboyUne intro pleine d’auto-dérision, dont le riff de guitare aurait toute sa place dans les crédits d’un western, alors que le héros avance à cheval vers le désert. Un blues surprenant qui démontre s’il le fallait le côté caméléon du cowboy, qui s’est par le passé aventuré vers le r’n’b avec Met Gala ou le hard-rock lors de reprises enflammées lors de ses concerts. Toujours plus loin dans l’aventure, on empruntera le train du funk des années 70 avec Choo Choo pour l’autre surprise de l’album. Tous les codes sont respectés, de la basse ronde et chaude au clavinet à la Stevie Wonder en passant par les paroles minimalistes. Mac DeMarco avait présenté ce quatrième opus comme son “album de cowboy”, et on le reconnait au travers de ces quelques chansons en roue libre. On notera également la chanson cachée à la fin du disque, pour le moins surprenante entre les hurlements et les rires démoniaques d’un Mac DeMarco toujours capable d’oublier de se prendre au sérieux.

Pas de panique, on retrouve également ce côté vieux sage qui nous avait séduit sur l’album précédent. Un côté plus doux, plus mélancolique, comme si, à l’approche de la trentaine, le Mac dodelinait sur une rocking-chair sur le perron de sa terrasse. Sous ses faux-airs de country, All Of Our Yesterdays fait partie de ces chansons à écouter en vacances, une bière à la main, en voyant les souvenirs défiler sous le soleil couchant. Dans la même veine, le prince du lo-fi nous invite à “hop on a train, see where it goes” dans Finally Alone. Entre la boite à rythme au chaloupement lent, les guitares tout en douceur et cette voix souriante qui s’autorise quelques envolées de crooner, on a tous les ingrédients typiques de la ballade classique de DeMarco.

En écoutant l’album d’une traite, on ressent une certaine idée de mouvement en solitaire, comme si le canadien partait lui-même en vadrouille en s’attardant sur des tranches de vie : une courte chanson sur des Little Dogs qu’il observerait au détour d’une rue, une autre en sirotant un cocktail dans un cabanon au milieu des oiseaux sur Preoccupied. Sur cette dernière, les guitares jazzy et percussions exotiques donnent férocement l’envie de partir se réfugier au coin d’une villa mexicaine, une Corona à la main loin du brouhaha parisien.

En éternel romantique, le Mac profite de ce nouvel album pour offrir plusieurs chansons à sa cher et tendre. Cela donne une sincère ballade guitare-voix sur K, mais également quelque chose de plus groovy avec Heart To Heart, lorsque le lo-fi rencontre le r’n’b mielleux. On se délecte de cette basse toute en sensualité et de ces synthés bienveillants. Décidément touche-à-tout, Here Comes The Cowboy s’aventure également du côté du classic rock. Si ce n’était pour son clip WTF, on aurait pu croire que On The Square, construite autour d’accords plaquées au piano, appartenait à une autre époque. La construction de Baby Bye Bye, avec ces choeurs joyeux et bordéliques qui reprennent en boucle le mantra éponyme, aurait quant à elle toute sa place sur un disque de pop psychédélique des années 60.

Au final, Mac DeMarco revient avec un album moins produit que les précédents, encore plus lo-fi. Dans une période où tout pousse à créer des sons toujours plus soignés, toujours plus parfaits, Here Comes The Cowboy agit comme une bouffée d’air frais. Le disque ne garde que l’essentiel et va droit au but, ce qui lui donne un côté humain et accessible, en mettant en valeur des paroles plus mélancoliques que par le passé. Mais ce n’est pas pour autant un disque au rabais : comme souvent avec le plus chill des freaks, on reconnait un nombre impressionnant d’influences qui s’associent autour d’un même projet. Du r’n’b au funk, du jazz à la country, il y a à boire et à manger dans ce projet qu’on aura hâte d’écouter au bord d’une piscine le moment venu. Cela tombe bien, on a justement une escapade mexicaine prévue dans quelques semaines. On vous laisse, on a un maillot de bain à dégoter.

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