Paupière : Vertiges de l’amour
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Auteur·ice : Charles Gallet
12/10/2017

Paupière : Vertiges de l’amour

Le Québec dans l’industrie musicale française ne jouit pas à prime abord d’une image de jeunesse. Quand on pense “Musique” et “Québec”, on voit Isabelle Boulay, Garou, Natacha St-Pier… Tout un pan de la musique qu’on aimerait honnêtement oublier, et qui aurait tendance à nous faire pleurer des larmes de sang autant que de nous donner envie de nous percer les tympans avec un tournevis à plusieurs reprises histoire de bien finir le travail.

On force sans doute un peu le trait, surtout qu’en réalité la scène québecoise a toujours été foisonnante et exploratrice  et nous a offert l’un des plus grand groupe au monde actuellement – coucou Arcade Fire – mais aussi des groupes aussi dingues et variés que Half Moon Run, Wolf Parade, Plants And Animals ou encore les géniaux Chromeo.

Du côté francophone, on pourra citer Peter Peter qui nous a conquis en début d’année avec son excellent troisième album Noir Eden. Et Paupière, à présent. Plus d’un an après  Jeunes Instants, premier EP quatre titres plus que prometteur, le trio, signé en France sur l’excellent label Entreprise, revient squatter nos platines avec son premier album au titre aussi énigmatique que poétique: A Jamais Privé De Réponses.

Ce qui nous marque tout au long de l’écoute d’A Jamais Privé De Réponses, c’est cette manière qu’à le trio de se mettre en scène comme des observateurs extérieurs des histoires évoquées dans leur chansons. Les Québecois parlent d’amour sur des nappes synthétiques, de la façon tordue qu’on a de s’aimer, de ce que notre époque nous offre d’un point de vue romantique : les vertiges de l’amour de nos contemporains.

Même s’ils jouent ce rôle éloigné de metteurs en scène de leur chansons, on ne peut s’empêcher de voir s’insinuer sous le vernis les expériences personnelles de chacun des membres, se glissant dans les fêlures des chansons pour leur donner plus de corps et d’âme Ce storytelling se ressent au niveau du chant, avec un ton souvent distancié, presque cynique, parfois parlé. Les voix des trois membres se mélangent, prennent le lead pour le laisser ensuite à l’autre, se mélangent et se répondent, donnant une sensation de liberté et de joyeux bordel maitrisé.

Musicalement, on est clairement dans la continuité de ce qui a été fait sur Jeunes Instants. Ils enfoncent le clou avec une synth-pop assez synthétique. On pensera forcément à Son Lux sur les percussions D’Une Autre Manière, qui commence l’album d’une façon assez frontale et directe. Les chansons froides et presque cliniques comme peut l’être Défunte Lune De Miel ou l’excellente Les Fleurs jouent ensuite à la bascule avec des compositions plus pop et lumineuses comme Rex ou Cours Toujours.

Le groupe joue donc avec nos émotions passant d’un style à l’autre afin de toujours maintenir notre attention tout au long de ses 12 chansons.

A Jamais Privé De Réponses est donc un vrai premier album : ambitieux et intense, dans lequel Paupière a voulu mettre toutes ses influences et résumer une époque, son époque, à travers son regard. En résulte un disque entre la glace et le feu, distancié, personnel et excitant. Une jolie réussite donc, à confirmer dans le futur.

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