Rendez-vous en terre inconnue : Billie Eilish à La Cigale
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Auteur·ice : Charles Gallet
20/02/2019

Rendez-vous en terre inconnue : Billie Eilish à La Cigale

Pour pas mal de groupes qu’on connait et qu’on aime, remplir une Cigale est un acte important, voir parfois inaccessible. Billie Eilish, elle, l’a remplie en cinq minutes. La nouvelle star de la pop américaine débarquait donc à Paris en terrain conquis, dans une salle clairement trop petite pour elle. On était curieux, on s’est donc glissé parmi la foule pour en découdre avec la jeune femme. On n’a pas été déçu, on a même été conquis. Retour sur une soirée aussi improbable que belle.

 

Je suis trop vieux pour ces conneries“. Ainsi parlait Murtaugh dans L’Arme Fatale. Lorsqu’on remonte le boulevard Rochechouart en direction de La Cigale, cette expression prend une bonne partie de son sens dans notre esprit. En ce lundi soir printanier, une foule étrange de gamins en hoodies se masse sur le terre plein central de cette artère parisienne. Des hoodies, des gueules boutonnées, et des cheveux colorés font de cette masse étrange un univers aussi décalé que bruyant. Mais un peu comme le célèbre flic des années 90 (note de l’auteur : oui vous êtes jeunes, mais j’espère que vous avez quand même vu ces putains de films), même si on râle, on est toujours prêt à aller faire des conneries. Alors on rentre dans La Cigale et on part à la rencontre de Billie Eilish. On les comprends un peu, nous aussi on a été émo et à vrai dire, on se fait toujours un petit plaisir secret en écoutant de temps en temps un bon vieux My Chemical Romance. La salle est déjà très pleine et il est à peine 19h alors comme la majorité des adultes présents ce soir la, on prend la direction du balcon pour s’asseoir et profiter du spectacle. Ce soir la, le spectacle sera sur scène autant que dans la foule. Compacte et hyper bruyante, la dévotion de ces jeunes gens tournent presque au culte sectaire par moment mais après tout, on a vécu ça nous aussi.

Pour commencer tranquillement la soirée, on a eu droit à deux premières parties plus ou moins anecdotiques. Finneas, frère de la star du soir, qui nous a dévoilé un set assez court où il jonglait entre les ballades d’amoureux transi et les titres pop plutôt bien troussés d’abord. Le garçon a clairement fait le boulot face à une audience déjà chauffée à blanc. Finalement l’ambiance devient presque nostalgique alors qu’on regarde celui qu’on a été il n’y a pas si longtemps (et qu’on est toujours un peu quand même malgré tout). Pas le temps de niaiser puisqu’il n’y aura quasiment pas de pause avant l’arrivée sur scène de EarthGang. Le duo d’Atlanta fera monter un peu plus la température avec son Hip Hop énergique et puissant. Ça saute, ça danse, ça bouge et ça dévoile finalement un message assez positif et réaliste.
Une nouvelle petite pause, le temps d’évacuer les premiers malaises, de voir un gentil papa apporter des bouteilles d’eau à ses filles et ses amies et de voir une mini émeute gronder sur le balcon quand la salle réalise qu’Angèle est parmi eux et les lumières s’éteignent à nouveau.

On va pas se le cacher, on était assez curieux de voir Billie Eilish sur scène. Car même en étant vieux, on trouve que la jeune femme a un vraie univers et surtout d’excellentes chansons. Ce qu’il y a eu de plus intéressant au cours de cette soirée, c’est que la demoiselle reste un miroir évident de son public. Même âge, mêmes problématiques et même rage et incompréhension liée à l’adolescence. Car oui, celle qui s’est appropriée la scène de manière absolument impeccable n’a finalement que 17 ans. Chaque geste, chaque pose et cette intensité de tous les instants se transmets ainsi à son public jusqu’à l’osmose et l’hystérie. Et même si on a sans doute un peu plus de recul, on a tout de même été plus que bluffé par le show. Ce mélange musical où tout est possible, représentant son époque où la pop, le hip hop et la facilité FM se mélange dans un bonheur sans fin. Cette façon de se jouer du côté cheap pour en faire une ligne de conduite. Tout chez Billie Eilish pourrait rebuter et pourtant tout impressionne et convainc. La mise en scène est implacable et la folie se retrouve autant sur scène que dans la foule. Et surtout, une chose est certaine à la vue du live : Billie Eilish a de vraies chansons. De celles qui grandissent, mouvent et explosent sur une scène définitivement trop petite pour elle. De My Boy à Bored en passant par When I Was Older ou Bitches Broken Heart, chaque chanson est un véritable tube repris à l’unisson par le public. Viendra le moment où notre cœur bascule avec cette version dantesque de Bury A Friend qui s’enchaine avec les noms moins grandioses de Bellyache et When The Party’s Over. Deux titres suivront avant que l’américaine quitte la scène sans rappel mais en rappelant que son premier album sortira bientôt. 1h15 d’un show intense, brillamment mis en scène et interprété. Il est 22h30 lorsqu’on sort de la salle, et qu’on regarde les vendeurs et leur faux posters ouvrir boutique. En remontant le boulevard on se dit que dans 10 ans on pourra affirmer qu’on a vu Billie Eilish à La Cigale. Sans doute que personne ne nous croira, mais ce moment aussi intense que magique on l’aura vécu. Finalement on est peut-être pas trop vieux pour ces conneries.

 

Bonus : les photos du concert par Alphonse Terrier

 

 

 

 

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