The Dø – Shake Shook Shaken
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Auteur·ice : Corentin Souquet-Besson
23/11/2014

The Dø – Shake Shook Shaken

Là où d’autres ont échoué, eux réussissent avec succès. Les reviennent 3 ans après leur dernier effort « Both Ways Open Jaws ». Et lorsqu’un groupe vient te chercher alors qu’il réalise un virage stylistique à 180°, c’est qu’il a du talent. Le duo franco-finlandais composé d’Olivia Merilahti et du touche-à-tous-les-instruments Dan Levy est donc de retour. « Shake Shook Shaken » ravira les adeptes des verbes irréguliers et comblera les fanatiques d’albums complets. On est transporté, agité de tous les côtés, dans tous les sens. Un album conçu principalement sur ordinateur à partir d’échanges de fichiers. Rassurez-vous, la froideur du numérique est bien vite effacée par la voix féerique d’Olivia. On retrouve les aigus si maîtrisés de la voix des . Une Olivia en prêtresse des temps modernes, alternant l’ode à la nuit et ses tumultes, ses tremblements. Le ” Je ” des deux derniers albums ont été remplacé par un ” Nous “, sonnant plus fédérateur, plus fraternel.

Entrons dans la messe majestueuse du dernier The Dø :

On commence par « Keep Your Lips Sealed », une voix venue de loin découpe la chanson. L’ordre est donné, ” Maintenant fais comme je l’ai dit, ne parle pas, pars. ” Un ordre, comme un écho à travers la musique lourd et puissante l’accompagnant. Le calme pour quelques secondes avant de partir sur une rythmique -esque. On y est, les sont bien là, la voix d’Olivia se mêle parfaitement à ce son synthétique. Les couplets presque parlés de la chanteuse font leurs effets, chaque fin de phrase et accompagnée d’une note bien lourde et le refrain peut commencer. Une montée en puissance comme on les aime pour finir sur du freestyle et des phrases entrecoupées. Pas de doutes, cette première piste les dissipe bien vite. Les qu’on aime, ceux qui se réinventent sont bien là.

Shake Shook Shaen

S’en suit « Trustful Hands » et son désir de rompre la gravité. Le tempo retombe un peu avec ce titre. Une chanson plus pop, une voix encore plus aiguë et des ” oh oh ” dans le refrain plutôt choisis à bon escient. Les retournent les éléments en les arrangeant à leur sauce et ça leur va bien. On se croit bercé par les antres d’une personne qu’on n’aura jamais connue mais pourtant on se sent si bien. La fin est plus éléctro-centrée et ça leur réussi.

« Miracles ». Encore une fois, Olivia est loin, comme si elle nous criait de l’autre côté de la face d’une montagne. Mais rassurez-vous, elle s’approche, elle se rapproche petit à petit du titre pour vous ensorceler. Le refrain est doublé, plusieurs voix s’unissent pour nous amener à elles. Un son de machine, d’orgue, est utilisé par Dan sur la dernière partie du titre et ça fonctionne. Le rythme est toujours calme mais ce n’est pas pour nous déplaire.

On continue avec « Sparks », un des deux coups de cœur de l’album. On commence avec un son bien éléctro mêlé à un son d’usine. Et puis vient l’envie de danser, pourtant le titre n’a pas l’air fait pour mais les coups assénés par les phrases envoyées t’ordonnent de bouger ton corps, d’un côté puis de l’autre. Avec une force demandant de la conviction. Et si tu le fais en levant ton poing en l’air, c’est que ce titre t’a emmené là où il le fallait. Un point spécial pour les paroles sur celle-là.

« Going Through Walls » dont le titre nous rappelle « A Ghost Before The Wall » d’Asaf Avidan à l’époque des Mojos. Le titre est plus folklo et ressemble plus au du premier album. On peut y voir des ressemblances avec « Playground Hustle » dans l’utilisation des arrangements. La voix d’Olivia est légèrement retouchée, quelque peu robotisée comme pour mieux nous aspirer dans leur univers. Le refrain redondant à la mélodie découpée fonctionne. On finit sur un morceau qui se déstructure, comme un leitmotiv dans cet album. Les se réinventent et à l’intérieur même de leur chanson ils le font aussi. On notera leurs prestations télévisuelles où les titres sont sans cesse réarrangés.

On passe à « Despair, Hangover & Ecstasy » pièce centrale de l’opus. S’il n’y avait qu’un titre à écouter pour saisir l’évolution musicale du duo ce sera celui-ci. Un rythme entêtant, une instru dansante à souhait. Aucun temps mort dans ce morceau. Olivia nous parle du début à la fin, pas le temps de respirer et on adore ça. Le pouvoir sexy et envoûtant du O de The est au plus haut point sur ce titre. On veut nous aussi se mettre la tête à l’envers avec eux. On note une nouvelle fois là fin, -esque du morceau.

« Anita No! », notre coup de cœur ! D’une douceur incandescente comme une berceuse nous promenant, nous emmenant dans une contrée lointaine et ténébreuse mais tellement rassurante qu’on y va le cœur léger. Le phrasé de la chanteuse et les sonorités du texte poussent le titre dans une magnificence envoûtante. Allé on re-clique sur replay et on passe au prochain.

« A Mess Like This », coup de mou dans l’album. On se calme, peut-être un peu trop. L’univers est sombre, tumultueux mais on n’accroche pas. Ou du moins, on n’accroche moins. On pourrait espérer que le titre décolle un peu, mais non. Premier accroc pour l’opus, ce titre trop longuet.

On continue avec « Lick My Wounds » qui reste un peu trop dans le chemin d’ « A Mess Like This ». Un tempo calme, la voix est posée, encore une fois elle est mise en avant par une instrumentale l’épousant comme on le rêverait. Le voyage continue avec l’exploration du nouveau son des . Le son électronique est presque omniprésent sur tous les titres. La messe continue et se stoppe de manière brutale à la fin de ce morceau. On en redemande, ça tombe bien il reste encore quelques douceurs après ce léger replat émotionnel.

« Opposite Ways », titre qu’on qualifierait le plus intime de l’opus jusqu’à présent. Opposé comme leur route désormais bien que commune. Les étaient à la base un couple qui au fil du temps s’est transformé (comme le groupe!) en simple amis. On parle de troubles et de tremblements de terres. On comprend qu’entre les lignes ce titre raconte bien des choses. C’est assez intime et troublant mais on prend plaisir à écouter ce titre. L’un des titres les plus R’N’B (avec « Despair Hangover ») de « Shake Shook Shaken ».

« Nature Will Remain », les éléments sont très présent dans l’album. Ici c’est la nature. Quoiqu’il en soit, quoi qu’il arrive, elle, elle sera toujours là. Olivia est encore loin de nous en ce début de morceau, elle nous susurre à l’oreille et ça monte, ça monte jusqu’au refrain où le titre éclate. L’harmonie synthétique de l’instru, la voix est forte et augmentant d’intensité au fil du titre. On voyage de nouveau. La messe se termine mais on voudrait déjà qu’elle recommence. La féerie est toujours présente, les mots sont forts et les sensations sont belles. Ce troisième opus est une belle réussite.

L’album finit sur « Omen » et comment ne pas penser aux Prodigy avec un titre pareil. L’Omen, celui-là est quand même beaucoup plus calme et moi énergivore mais on l’apprécie presque autant. On pense surtout à un titre dans la continuité « B.W.O.J », titre du précédent album « Both Way Opens Jaws ». Le son sonne électronique, on est oppressé mais c’est excitant. On y voit ici une ambiance à la « Juicebox » des Strokes, c’est inquiétant, c’est stressant mais qu’est-ce que c’est bon. Les savent faire du son électro qui nous plaît. Mais c’est si rare. Ils clôturent l’album d’une belle manière.

Pour conclure les nous sortent un album complet où ils se ré-inventent une nouvelle fois avec brio. Ce n’est certes pas un album grand public mais pourquoi aurait-il dû l’être ? Les sont encore pleins d’inventions et d’inspiration. Le voyage est toujours en route et on aime faire ce bout de chemin avec eux. Comment ne pas citer les « Die Antwoord » où la folie plus présente est commune aux deux groupes. Aujourd’hui, leur messe est dite et leur messe est réussite.

On vous laisse sur cette reprise aérienne du groupe d’«Instant Crush» des Daft Punk avec Julian Casablancas.

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