Originaire de Liège, Absolem commence le rap avec son acolyte Slÿ. Après un premier projet avec son groupe Hesytap Squad, il décide de se lancer en solo et sort deux EP courant 2018. Il revient avec une nouvelle mixtape, Toxcity, avec laquelle il espère bien montrer toute sa palette artistique et technique. Rencontre avec un friand de rap… et de frappes à la Ronaldinho.
© Photo : Lucas Matichard
La Vague Parallèle : Salut Absolem ! Tu viens de sortir ta nouvelle mixtape, Toxcity. Avant de parler de ce projet, je voulais qu’on évoque rapidement ton EP précédent, qui est sorti il y a un an et demi. Qu’est-ce que RYDE t’a apporté et quel bilan en tires-tu ?
Absolem : Dans l’ensemble, j’en tire de bonnes choses. C’était un projet d’expérimentation et c’était aussi le premier projet entièrement produit par Dee Eye. Aussi, ça m’a permis de prendre « des risques », en essayant d’amener quelque chose que je n’entendais pas ailleurs. L’originalité et l’expérimentation, c’est vraiment les deux mots que je pourrais utiliser pour parler de RYDE. D’ailleurs, on a réécouté le projet avec Dee Eye il y a deux semaines et on trouvait que ça sonnait assez actuel en termes de sonorités. C’est un point positif selon moi, et ça m’a prouvé qu’il y avait un aspect un peu futuriste dans ce projet-là.
LVP : RYDE t’a aussi permis de faire quelques grosses scènes…
A : Oui, ça m’a ouvert quelques portes à ce niveau-là ! J’avais déjà fait quelques scènes avec mon ancien groupe, Hesytap Squad, mais c’est vraiment à partir du moment où j’ai commencé à partir en solo que j’ai pu découvrir de nouvelles salles un peu partout. On a fait des dates à Paris, par exemple. C’est vraiment des chouettes trucs qui me sont arrivés !
LVP : Ta nouvelle mixtape, Toxcity, est entièrement produite par le talentueux Dee Eye ! Tu peux nous parler de ta relation avec lui ?
A : Dee Eye, je l’ai rencontré par hasard quand je travaillais avec Phasm (producteur bruxellois). Ils étaient voisins de chambre à l’époque. Dee Eye faisait des prods depuis quelques années déjà, mais il n’avait pas encore atteint ce niveau et ce professionnalisme qu’il a maintenant. Avec Venlo (rappeur et ami d’Absolem), on a directement remarqué qu’il avait une certaine originalité dans les productions. Et surtout, il ne voulait pas rentrer dans le moule et dans ce qui se faisait déjà à l’époque. On s’est rendu compte qu’on avait plein de points communs et on a commencé à travailler ensemble. Ça s’est fait très naturellement, et maintenant on habite ensemble (rires) ! Dee Eye c’est un charbonneur !
LVP : C’était une évidence de travailler à 100% avec lui ?
A : À fond ! Ce que j’aime bien chez lui, c’est qu’il fait plein de choses différentes et il n’a pas peur d’en créer des nouvelles. Une de ses forces, c’est qu’il s’adapte très facilement et rentre dans ton univers. En plus de ça, c’est un super musicien et une énorme source de motivation pour moi. Donc, oui, c’était une évidence de taffer avec lui !
LVP : Pourquoi avoir choisi le format de mixtape ?
A : Pour tout te dire, je ne savais pas trop quoi faire après RYDE. Certes, j’ai eu quelques invitations sur des projets par-ci par-là, mais je me suis un peu enfermé dans un délire avec RYDE. Avec Toxcity, j’ai vraiment envie de montrer aux gens ce que je sais faire et prouver que je sais aussi bien rapper sur des instrus boombap que sur de la grosse trap. Ce format de mixtape me donne une certaine liberté au niveau des choix artistiques, que ce soit au niveau des personnes que j’invite ou sur les sonorités que je propose. C’est vraiment à partir du moment où j’ai eu ce format en tête que je me suis moins mis la pression et que j’ai réussi à me lancer dans la réalisation de Toxcity.
LVP : On retrouve pas mal de propositions différentes sur ce nouveau projet. Time est un son très trap, mais il y a aussi des morceaux plus ouverts. Je pense notamment à Puissance 4. Tu peux nous parler des différentes sonorités et couleurs que tu as voulu amener ?
A : Le morceau Choc, par exemple, c’est un son que je kiffe et qui représente vraiment les années 2000 au niveau des mélodies. Avec cette mixtape, je peux passer du coq à l’âne avec une track comme Puissance 4, qui est un peu futuriste et plus américaine dans la direction artistique, ou un morceau comme Tant que ça rentre, qui est un « boom bap moderne », où le but est de cracher un maximum de flammes ! J’aime tellement de facettes différentes du rap, que je voulais vraiment faire tout ce qu’il me plaît. Au début, on ne s’est vraiment donné aucune limite et aucune direction générale.
LVP : Sur ce projet, tu partages évidemment un son avec Venlo et Slÿ, mais il y a aussi un feat avec Slimka et Jean Jass. Tu peux nous en dire plus sur ces différentes connexions ?
A : Time est un des premiers sons que j’ai faits pour la mixtape. Ce qui m’a plu dans ce morceau, c’est qu’on a tous mis maximum 30 minutes pour faire notre partie. J’adore faire ce genre de son, tu sens qu’il y a un feeling, que tout le monde est inspiré et ça ne chipote pas. On va droit au but et c’est efficace ! C’était important pour moi d’inviter les personnes avec qui j’ai commencé dans la musique. Ça permet de montrer au public l’école d’où je viens, et c’était important de représenter mes origines dans le rap. Liège, le kickage et la famille. Pour Black Ops, Dee Eye faisait un morceau avec Jean Jass et Slimka et j’étais avec eux ce jour-là. Ça faisait quelques fois déjà que Slimka passait au studio, donc on a sympathisé et on a fait ce morceau tout naturellement. Ça s’est fait dans ma cave (rires). C’est ce qui est le plus cool avec ce projet, c’est que tous les morceaux sont faits à la maison. Je trouve ça assez incroyable.
LVP : Tu as teasé la mixtape en sortant le clip de Time il y a quelques semaines. Chaque partie a son thème et ça donne un visuel très cohérent. Tu peux nous parler de la réalisation de ce clip et des personnes qui ont bossé dessus ?
A : J’ai taffé avec mon label TNF pour ce clip. Au niveau de la direction artistique, c’est Tonton Chami qui a bossé là-dessus. Il est allé voir des lieux, il a cherché des tenues, puis il m’a fait des propositions et on a tourné le clip. On voulait créer ces trois ambiances différentes en fonction de chaque personnage, et je savais que je pouvais faire confiance à Tonton Chami sur ce coup. Il assume de plus en plus cette position de DA au sein de l’équipe ; en tout cas pour ce qui est du visuel et des accessoires. Je sais très bien que si j’ai besoin de fringues pour un concert, je vais aller chez lui pour qu’il me trouve des tenues qui correspondent à mon univers.
LVP : Tu peux nous parler de tes influences dans la musique, des artistes que tu écoutais plus jeune ?
A : J’écoute du rap depuis que je suis tout petit. Un des premiers CD que j’ai écoutés, c’est : Urban Peace. Cette compilation regroupait plein de rappeurs qui faisaient un concert au Stade de France. J’ai découvert des rappeurs incroyables dès mon plus jeune âge, comme NTM, Oxmo Puccino, Lord Kossity, Disiz La Peste, etc. J’ai toujours gardé cette compil’ en tête depuis que je suis gosse, je l’ai écoutée des dizaines et des dizaines de fois. Sinon, mon grand frère et ma grande sœur ont été des influences. J’ai pu découvrir plein de styles de musique différents grâce à eux, et élargir ma palette dès le plus jeune âge.
LVP : Tu devais faire le festival des Ardentes, en juillet. Malheureusement, tous les festivals sont annulés cet été…
A : Oui c’est dommage, parce que c’est un des objectifs qu’on s’était fixés avec Venlo. On voulait commencer à jouer dans les gros festivals et défendre cette mixtape sur scène. On était super impatient de jouer dans notre ville, c’était la récompense de notre charbon. Ça se fera plus tard !
LVP : En cette période où tout le monde est chez soi, est-ce que tu aurais des albums de rap à conseiller ? Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment ?
A : C’est marrant que tu me demandes ça, parce que justement je réécoute beaucoup d’albums classiques du rap français. Je conseillerais aux gens d’écouter le CD Urban Peace, Temps mort de Booba, Poétiquement correct de Danny Dan et Hot Shot de Shaggy. Mais je pense que c’est aussi important de découvrir de nouvelles choses. Parmi les sorties de 2020, j’ai beaucoup aimé Trinity de Laylow.
LVP : Le rap va de plus en plus vite, les jeunes qui débarquent sortent des albums de plus en plus rapidement. Est-ce que tu réfléchis déjà à faire un album, ou ce n’est pas du tout dans tes plans pour l’instant ?
A : Je n’y pense pas encore ! Pour moi, un album, c’est vraiment quelque chose de travaillé à fond et qui rentre dans un concept. Je n’ai pas encore envie de me mettre cette pression. Je suis jeune et je considère que j’ai encore beaucoup de choses à expérimenter avant de me lancer là-dedans. Je ne me considère pas encore prêt pour faire un album comme je l’entends. C’est un format qui doit être respecté. Le jour où j’en sortirai un, j’aimerais que ce soit un disque qui reste dans le temps. Un disque que je peux écouter 10 ans plus tard et me dire « ah ouais, c’est toujours lourd ». Il faut qu’il y ait une âme dans un album. Faire un projet avec beaucoup de titres et appeler ça un album, ce n’est pas le but. Ce qui est problématique, c’est que beaucoup de personnes veulent sortir des albums, mais ils n’ont pas d’âme et ne restent pas dans le temps. Pour moi, un album, ça ne doit pas être éphémère !
Culture musicale inexistante car, pour certains, le rap n’en fait pas partie.
https://www.paullouisgodier.com/