Ballade Transatlantique avec Séverin
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Auteur·ice : Charles Gallet
26/02/2019

Ballade Transatlantique avec Séverin

La musique fait voyager. Dans ses couleurs, ses influences, sa nationalité, la musique invite à l’évasion et à sortir de chez soi tout en restant les pieds cloués sur le sol de son appartement. On ferme les yeux et on s’envole loin, les images nous attrapent et nous emmènent vers des univers, des chaleurs, des ailleurs. Ce genre d’album met du baume au cœur et le sourire aux lèvres. Transatlantique, le nouvel album de Séverin, est l’exemple parfait de ce type d’expériences.

Quand on lance Transatlantique, on ne peut s’empêcher de sourire et puis de rire franchement. Pourquoi ? Parce qu’avec L’interview, on ne peut pas s’empêcher d’imaginer Séverin s’adresser directement à nous. Absurde, drôle et superbement écrite, le premier titre de l’album compte l’histoire d’une interview foireuse, que ce soit de part les questions mais aussi les réponses qui y sont apportées. Alors comme il nous le demande tout du long, on s’est mis à “écouter son disque“.
L’interview est un titre narratif, en forme d’histoire qui ouvre les portes d’un album ou il sera surtout question de Séverin, l’artiste assumant pleinement devoir se plonger en lui même pour pouvoir créer. 10 chansons dans lesquelles il s’amuse et nous amuse. Mais il n’utilise jamais l’humour comme un cache misère mais plus pour renforcer son propos, l’alléger pour le rendre plus percutant et compréhensible. De son air distancié, Séverin brode des histoires, dans lesquelles il transforme son quotidien, de cette voix chanté-parlé qui fait tout le sel de sa musique sur laquelle il coup des ambiances musicales douces et rêveuses, des compositions classieuses qui prêtent à tourner la tête vers l’ailleurs.

On pourrait ainsi  diviser cet album en trois axes distincts : tout d’abord la partie ou il parle de sa vie d’artiste. L’interview tout d’abord bien sur et puis Elle est là, où il traite avec douceur et tendresse du rôle de compagnon d’artiste, là à chaque instants, bons comme mauvais, supportant les crises, le stress et le quotidien auprès d’un musicien. Il y a aussi la féroce 30 minutes après la mort, à l’humour noir, une charge aussi réjouissante que violente sur la mode du “RIP réseau social“, où chacun cherche à s’accaparer le deuil d’un artiste que souvent on a que peu connu, aimer ou écouter mais à qui on veut rendre hommage malgré tout. Une manière aussi de dire qu’au lieu de regretter les morts, on ferait mieux de célébrer les vivants et de les honorer, de les aimer tant qu’ils sont encore là pour le voir et le ressentir.
Ce titre qui clôture l’album est sans doute l’un des plus intenses, celui qui montre que Séverin observe son quotidien mais aussi celui des autres pour en la sève et la base de nombre de ses chansons.

Ce qui nous amène, à l’axe deux. Car si Séverin parle beaucoup de lui, c’est aussi pour parler des autres. Utiliser des sujets universels qu’il a lui même vécu pour créer des chansons qui frappent au cœur. Sur cet axe, on retrouvera L’abstentionniste, charge douce et distanciée sur un être pour qui le monde, la vie et la société en générale devient trop dur. Alors on s’enfuit, on s’évade et on s’éloigne du quotidien pour rêver et surtout survivre tout simplement. En vacances, nous y emmène très justement, hymne à la flânerie et à l’évasion. Et puis il y a les sujets plus sérieux, traités avec douceur et tendresse. Les points d’exclamations parlent avec justesse de ceux qui crient, rient, vivent trop fort pour cacher aux autres les failles en eux qui finissent toujours par rejaillir aux yeux de ceux qui veulent voir. Un texte qui pourrait être lourd, mais qui résonne comme un hommage à ceux qui se sacrifient parfois pour les autres jusqu’au moment ou ils s’oublient eux même. Cette veine tragi-comique, qui crée le décalage entre rythme enjoué et propos plus sérieux se retrouve aussi sur Fais Gaffe A Ta Solitude, qui parle des effrayés de l’engagement de manière poétique et drôle.

Enfin le troisième axe, celui qui finalement transpire le plus de cet album, on parle bien sur de l’amour. Cette intention elle est présente dans chaque recoin de ces 10 titres : amour de la musique, amour de la vie, amour des autres, amour des mots aussi. Mais c’est quand il le diffuse clairement que l’amour est le plus beau chez Séverin. On pourrait reparler de Elle est là,  mais c’est à travers deux titres aussi opposés que nécessaire qu’il frappe fort : l’enjouée et parfaitement rythmée Parle Moi qui joue comme un miroir avec la plus posé et mélancolique Quand Bien Même. Dans ces deux titres, Séverin laisse parler son optimisme, son envie de voir le bon dans l’amour car au final c’est ce qu’il faut y trouver. Même si ça explose, même si ça finit par nous faire péter des assiettes, l’amour reste ce qui devrait guider chaque chose de la vie.

Avec Transatlantique, Séverin nous emmène en voyage sans nous faire bouger de notre quotidien. Ce qu’il y a de beau dans sa musique, c’est qu’elle est faussement simple et pourtant chaque mot est pensé, chaque mélodie recèle de petits trésors qui les rendent toujours plus entêtantes et joyeusement addictive. Séverin reste cette observateur du quotidien et nous offre 10 chansons superbes, qui resteront facilement en tête avant de vivre avec bonheur leur vie sur scène. Parce qu’une chanson n’est belle que quand elle quitte les mains de son auteur pour aller trouver une vie dans celle de ceux qui l’écoute. En ce sens on peut dire que Séverin a plus que réussi son coup.

Séverin sera à La Maroquinerie le 29 mars prochain.
Photo : Ambroise Tezenas

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