Billie Eilish invite à s’affranchir du regard des autres avec un court-métrage puissant
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Auteur·ice : Caroline Bertolini
28/05/2020

Billie Eilish invite à s’affranchir du regard des autres avec un court-métrage puissant

Dans une société où l’apparence est au centre de l’attention, des âmes s’engagent et militent pour l’acceptation de la beauté de chaque corps. Une en particulier, Billie Eilish, a sorti un court-métrage sous le signe de la bienveillance, mais aussi de la souffrance. Une souffrance qui touche beaucoup d’êtres humains d’abord, dans un contexte où la critique n’a jamais été aussi facile, et plus particulièrement les femmes. Billie s’exprime sur le constant examen du monde sur nos corps, et en particulier sur le sien, qui est fort médiatisé depuis quelques temps déjà. 

Si vous êtes une femme et que vous lisez ceci, vous savez. Vous savez ce que ça fait de vivre dans un corps et d’être consciente de chaque coin de chair, chaque imperfection. Vous savez le temps que ça prend sur votre vie de penser et repenser votre apparence, de ne pas toujours bien se sentir dans sa peau. Si vous êtes un homme et que vous lisez ceci, peut-être le réalisez-vous en partie, à cause des codes qui vous sont imposés par la société sur ce qu’est “un vrai homme”. Si vous avez décidé de ne pas vous réduire à une étiquette, vous savez aussi. Vous vivez aussi avec le regard des autres constamment, vous demandant de rentrer dans des mécanismes de vie qui ne vous correspondent pas. C’est pourquoi, tous et toutes, devraient être attentifs·ves au message de Billie Eilish dans le court-métrage qu’elle a publié en ce 27 mai 2020.

do you know me?

really know me?

you have opinions

about my opinion

about my music

about my clothes

about my body

some people hate what I wear

some people praise it

some people use it to shame others

some people use it to shame me

but I feel you watching

always

and nothing I do goes unseen

C’est lors de sa tournée que Billie montrait ces images d’elle se déshabillant dans une marée noire, un statement sur son corps qui est investigué à chaque apparition. L’artiste avait déjà expliqué dans plusieurs interviews que si elle s’habille avec des vêtements larges, c’est parce qu’elle ne veut pas donner l’opportunité d’avoir une opinion dessus ou de juger. Un sentiment que chaque femme connaît. Mettre des vêtements larges, c’est plus facile. Personne ne peut juger ce qu’il·elle ne voit pas. Parce que même si votre but n’est pas de juger, autant femme qu’homme, votre cerveau va scruter et se faire une opinion. Cela montre à quel point il est habitué à analyser ce qu’il voit, à croire connaître une personne avec, comme seul indice, son apparence. Faire des suppositions : “si elle montre sa peau, c’est qu’elle adore son corps”, “si elle met des vêtements oversized, c’est qu’elle est complexée”. Au-delà de l’apparence de Billie Eilish, c’est tout son être et ce qu’il produit qui est jugé, au vu de son statut très médiatisé.

so while I feel your stares

your disapproval

or your sigh of relief

if I lived by them

I’d never be able to move

would you like me to be smaller?

weaker?

softer?

taller?

would you like me to be quiet?

do my shoulders provoke you?

does my chest?

am I my stomach?

my hips?

the body I was born with

is it not what you wanted?

if I wear what is comfortable

I am not a woman

if I shed the layers

I’m a slut

C’est ce qu’elle explique ici : rien n’est jamais assez conforme. Tout en se déshabillant, en montrant pour la première fois son corps, elle fait un rappel sur l’absurdité de ces codes. Doit-on (elle) être plus petite, plus faible, plus douce, plus grande ? Plus masculine, plus féminine ? “Le corps avec lequel je suis née, ce n’est pas ce que vous vouliez ?” – peut-être une des phrases les plus marquantes de ce texte. C’est ce corps dans lequel nous habitons tous les jours, ce corps que nous n’avons pas choisi, qui est défini comme incorrect, comme non-accepté par autrui, qui ne passe pas la grille de validation façonnée par des humains qui ne sont plus de ce monde et rendue, par extension, complètement obsolète.

though you’ve never seen my body

you still judge it

and judge me for it

why?

we make assumptions about people

based on their size

we decide who they are

we decide what they’re worth

if I wear more

if I wear less

who decides what that makes me?

what that means?

Même si peu de gens voient vraiment notre corps, il va être jugé, et ensuite notre personne. En lisant ceci, il est presque absurde de penser qu’il soit possible de juger de la valeur d’une personne uniquement en fonction de son apparence. La norme du bien proportionné, la suprématie de ce qui a été moulé par la société, et le rejet du reste. La valeur des êtres humains se retrouve trop souvent dans les yeux de celui ou celle qui regarde. Qui décide de ce que ça fait de nous ? Si tout le monde a sa propre opinion, il est donc impossible de satisfaire chacune d’entre elles. Mais si on arrêtait d’essayer ?

is my value based only on your perception?

or is your opinion of me

not my responsibility

C’est avec ces trois dernières phrases que la vidéo se termine. Alors, ma valeur est-elle vraiment définie par ton opinion ? Toi qui me vois passer devant tes yeux ? Ou n’est-ce simplement pas ma responsabilité de vivre avec et en fonction de ta perception de moi ? 

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