Et si on jetait des Roses à Coeur de Pirate ?
"
Auteur·ice : Fanny Ruwet
03/09/2015

Et si on jetait des Roses à Coeur de Pirate ?

Il n’y a pas vraiment de juste milieu en ce qui concerne Coeur de Pirate. On l’aime lie on la déteste. « Elle articule pas », « Elle chante du nez », « Je ne comprends ses textes qu’après 18 shots de tequila »,.. Certes. Et j’avoue que j’aurais beaucoup de raisons de ne pas l’aimer non plus : des cheesy songs en français, on en subit des tonnes. Et pourtant.. Tous ses projets m’ont toujours fascinée – que ça soit avec Jay Manilowski pour le groupe Armistice, ses covers et collaborations (dont certaines m’échappent toujours. Poke Omnikrom), la bande son de la série Trauma sortie l’année passée ou celle du jeu vidéo Childs of Light – tout ce qu’elle fait me touche, d’une manière ou d’une autre. Et ce troisième disque, Roses, n’échappe pas à la règle.

« Cet album est celui de la maturité », « Changement de style pour Cœur de Pirate », « On est bien loin de Comme Des Enfants » : tous les articles que vous lirez au sujet de ce nouvel opus vous le diront, on va donc éviter de le répéter : Béatrice (oui, après toutes ces années, je l’appelle par son petit nom. Moindre des choses) signe ici des titres plus pop, plus accessibles (et pas seulement au point de vue linguistique) mais aussi probablement plus représentatifs de ses influences (des touches plus hip hop ou électroniques, des percussions qui rappellent par moments un peu Woodkid).

Ocean’s Brawl nous replonge dans le style Martin qui nous avait tant manqué (enfin moi en tous cas, c’est déjà ça). Là où le public pourrait être un peu réticent en l’entendant chanter en anglais, les plus férus s’y étaient déjà habitués depuis plusieurs années (Armistice, sa collaboration avec Bedouin Soundclash, ses covers,..). Première montée en puissance sur la fin du morceau, implosion d’amour pour Béatrice.

S’en suit le premier extrait de l’album qu’elle avait dévoilé, Carry On (Oublie-Moi). Pour ceux qui l’ignorent (on ne sait jamais), le morceau existe en versions anglaise et française. Après plusieurs mois, je suis toujours incapable de savoir laquelle je préfère : dans le doute, j’écoute toujours les deux à la suite. Une quinzaine de fois.

Crier Tout Bas lui succède et s’avère à la hauteur de nos attentes (je veux pas avoir l’air de la stalker 24h sur 24, mais ça fait plusieurs mois déjà qu’elle parlait de ce fameux titre sur Twitter et que ses connaissances proches lui jetaient des fleurs à ce sujet). Puissante et prenante, elle nous fait valser entre l’intensité des refrains et les moments de répit accordés par les violons. En fait, Crier Tout Bas est un peu le Place de la République de ce nouvel album.

I Don’t Want To Break Your Heart est une des surprises de Roses. Refrain plus que catchy, sons électroniques (méga love pour les bridges, sérieux), mais il fallait bien que le disque ait un défaut : il est ici. Gros comme une maison, véritable fléau du 21ème siècle, celui qui a pourri tant de bons morceaux, j’ai nommé le featuring (j’exagère peut-être vaguement, dans le fond l’idée n’était pas mauvaise. Mais non.). Autant j’aime quand Béatrice se la joue half-thug à chanter des « Let me mother fucking love you » de la plus mignonne des manières quand elle reprend des bonnes chansons comme celle de The Weeknd, autant ce feat. avec Allan Kingdom (et sa voix absolument agaçante) est bien pourri.

Même si Drapeau blanc n’est que la 4ème chanson du disque, elle est déjà l’avant dernière en français. Je reste relativement perplexe au sujet des couplets : on dirait pas mal une chanson « que tu fais en sachant très bien que tu vas pas la garder parce qu’elle est mauvaise ». Puis vient le refrain.. Des cuivres efficaces  tout en étant assez discrets, quelques sons électroniques, des beats agrémentés de brefs chœurs : pas si mal en fait.

Un riff de basse bien mis en valeur, de bonnes percussions, des arrangements discrets et des mélodies vocales efficaces : Undone est probablement l’une de mes favorites (mais attention, vous allez chanter « And Undone is What I Am » pendant les 20 prochaines années).

Piano et violons s’allient pour l’intro de Tu Oublieras Mon Nom, morceau plus que représentatif de ce qu’elle fait : on y retrouve d’ailleurs des phrases comme « J’ai nagé vers ton rire dans l’ombre, Dans la nuit qui se teignait d’azur », formulation typique de Béatrice et le genre de phrases qui fera dire aux plus boring « Ouais Cœur De Pirate c’est celle qu’on comprend pas ce qu’elle dit lol ».

Le disque continue avec Castaway et ses très beaux « I Don’t Know If You’ve Been Hurt Before », puis la rassurante The Way Back Home, qu’on imagine assez bien écrite pour sa fille : « And if you ever feel alone, remember that I’ll be coming back ». Au sujet de cette chanson, il semble important de mentionner LE moment, la demi seconde (vers 00:43) qui ressemble à du cassage de voix, à une erreur d’enregistrement qu’on aurait oublié d’enlever mais qui rend la chanson plus mignonne encore. Introduite grâce à des cuivres et percussions vaguement stressant, Our Love clôture finalement Roses.

Fin d’un disque ambitieux et surprenant, à écouter en boucle pour la rentrée.