Rob & Jack Lahana : « Ce disque est une utopie que seul Drake aurait pu se payer ! »
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Auteur·ice : Alexis Lacourte
04/04/2023

Rob & Jack Lahana : « Ce disque est une utopie que seul Drake aurait pu se payer ! »

Les inséparables Robin Coudert et Jack Lahana, aka Rob & Jack Lahana, sortent Summercamp (Pan European Recording), une odyssée pop-électro qui nous fait voyager en Italie, en Argentine et en Angleterre à travers des featurings (Gorgio Poi, Daniela Spalla, Chloë Alper…) toujours plus excitants. Pour le duo de parisiens, Summercamp est plus qu’un premier album : c’est une impulsion de liberté et de légèreté, sans prise de tête – le début d’une longue série de collaborations tant françaises qu’internationales… Et, c’est pour notre plus grand plaisir !

Vous ne l’attendiez pas, nous non plus et eux encore moins : et c’est justement pour ça qu’ils l’aiment. Summercamp est le produit de deux potes qui font de la musique ensemble et pour les autres depuis une vingtaine d’années, travaillant par ci avec Gordon Tracks et Phoenix, par là pour la série Le Bureau des Légendes. À la fois voyage physique et temporel, on s’est surpris·es à visualiser des paysages parfaitement ensoleillés au sein d’envolées pop, et mélancoliques, qui rappellent quelques unes de leurs nombreuses productions – comme l’album produit par Rob pour Alizée en 2010, Une enfant du siècle.

Ce treize titres lumineux à des allures de mixtape : why not ? Sébastien Tellier, Fishback, Catastrophe… La liste est, sans nul doute, celle d’un club a priori ultra select’… Finalement, après l’entretien avec ce duo de musiciens qui semblent avoir la lumière de ceux qui débutent une carrière, Summercamp nous apparaît comme une plage où les rencontres se font le temps d’un été bien arrosé, et qui a des airs d’éternité… Ouvert à tous·tes, donc !

©Manuel Obadia-Wills

La Vague Parallèle : Comment le duo s’est-il formé ?

Jack : Vers 1999-2000, j’étais ingénieur son au studio Gang (mythique studio d’enregistrement du 5e arrondissement de Paris, ndlr)Rob faisait son premier album, Don’t Kill (Source, 2001, ndlr).

Rob : Et coup de foudre : depuis ce jour-là, tout ce que je fais en musique, je le fais avec Jack.

Jack : J’ai fait un remix de Don’t Kill que tout le monde autour de nous a trouvé génial et on a fini par nous dire qu’il fallait faire de la musique ensemble.

Rob : Jack était ingénieur du son, moi compositeur. Donc, instinctivement, le duo s’est formé. Et après, on a fait peut-être une cinquantaine de disques ensemble – entre ceux qu’on a produit, ceux pour lesquels on a été réal, mes propres albums, les musiques de films, entre autres ; mais on a mis plus de vingt ans à assumer ce titre de duo.

LVP : Summercamp, c’est finalement comme un premier disque pour vous ?

Jack : Le disque s’est fait sans réfléchir. On avait une collection de morceaux inachevés.

Rob : Qui est devenue une collection d’instrus. Puis, on a commencé à imaginer les jouer avec des ami·es. Et tout le monde répondait « Ok, go », parce qu’on arrivait avec rien d’autre que l’amour de la musique, l’amour pur de fabriquer quelque chose qui nous fasse vibrer. Pas de label, pas de projet, uniquement de la liberté.

Jack : Très rapidement, on a demandé à Gordon Tracks de chanter, c’était le premier. Giorgio Pio est venu juste après. On l’avait déjà rencontré lorsqu’il faisait les premières parties de Phoenix. À partir de là, on a pensé à plein de potes.

 

LVP : Le titre Haute Saison est sorti quasiment un an avant l’album. Il a inspiré la ligne directrice de Summercamp ?

Rob : Elle est uniquement guidée par le plaisir. À chaque fois que c’était compliqué, on a arrêté. Par exemple, on avait envie de travailler avec Altın Gün, mais ils étaient trop nombreux et en tournée. On leur a donc dit que si c’était trop compliqué, on ne le faisait pas. Et c’est ce qu’on disait à tout le monde : si c’est galère, on ne le fait pas ! Chill…

Jack : Je pense que ce n’était pas facile à comprendre pour les gens qui ne nous connaissaient pas. Deux gugus t’envoient un morceau de trente secondes et te laissent une carte blanche totale…

Rob : La notion de collaboration, telle que nous l’envisageons, c’est-à-dire d’envoyer la musique à un interprète libre d’en faire ce qu’il souhaite ensuite, est peut-être un peu piégeuse. Mais c’est comme un cadeau mutuel. Si une instru te plaît, tu t’en empares et développes ta vision, ton interprétation, ton texte. De notre côté, à chaque fois qu’on recevait un morceau, on était tout excités ! Avec Summercamp, on a pris du plaisir du début à la fin, parce qu’on n’en a pas besoin, ni pour vivre, ni pour se faire connaître, pour rencontrer du monde ou pour voyager, et c’est pour cela que c’est un disque essentiel. Il y a une grande part de mystère quant au succès de cet album. Je ne suis même pas certain, d’ailleurs, que ce soit réellement un album.

Jack : C’est une fête.

 

LVP : Ainsi, plus quun simple album, Summercamp est le déclencheur d’une longue série de collaborations ?

Rob : Quatre autres morceaux sont déjà prêts ! Il y aura un morceau avec Barbagallo, avec Leo Leonard, avec Camille et Zaza Fournier et Brigitte Fontaine, on a également une instrumentale de douze minutes… La marque Summercamp existe, donc go ! C’est un projet infini. D’autres sont en train de se faire. Raphaël (qui passe alors dans le studio, ndlr) pourrait très bien être sur « Summercamp II » – et on lui a proposé. Il est au studio avec nous depuis trois semaines et on s’entend très bien. Voilà, ce sont des rencontres ! Par ailleurs, qu’il vienne d’une autre sphère musicale nous donne encore plus envie de travailler avec lui.

LVP : Quel a été le rôle du label Pan European Recording dans la structuration de Summercamp ?

Jack : En fait, dès le moment où on a dû définir le projet, le mettre dans une case, ça a été très compliqué, alors de travailler avec le label nous a aidé.

Rob : Arthur (Peschaud, ndlr), le fondateur du label, est un ami d’enfance. Aller voir un ami, comme pour toutes les collaborations de l’album, était idéal. Après, il est quand même chef d’entreprise. Donc, on a eu une phase « fin de rêve », comme un scénariste une fois le film en train d’être tourné : on a dû se confronter à un budget, à un planning… C’est une coproduction, on n’est pas en contrat d’artiste chez eux. Ce disque est une utopie : mondial, sans stars, sans nom, et avec un budget illimité, puisque c’est produit dans notre studio. Peut-être que seul Drake aurait pu s’acheter ce disque. Il n’est pas rentable et c’est pour ça qu’il est bien. C’est un disque libertaire, gauchiste.

LVP : Quels sont les disques que vous écoutez en ce moment ?

Rob : La BO de The White Lotus (série américaine, HBO, ndlr).

Jack : Kali Uchis, Red Moon In Venus.