(Découverte) Ravages conjugue la synth-pop au français
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Auteur·ice : Charles Gallet
14/03/2018

(Découverte) Ravages conjugue la synth-pop au français

Le reboot est une idée bien ancrée dans le cinéma moderne, et plus particulièrement dans la grosse industrie hollywoodienne qui joue au chien qui se mord la queue, rebootant des reboots encore et encore. Mais le reboot existe-t-il dans la musique ? Cette envie de remise à neuf, de nouveauté et d’exploration sans limite a dû titiller les deux membres de Ravages.

Échappés de Exsonvaldes, quatuor pop qui a sorti quatre albums et connu son heure de gloire en Espagne notamment, Simon et Martin ont finalement troqué les guitares pour les synthés, toujours dans la pop mais vers d’autres horizons, plus personnels, davantage guidés par un amour de la science fiction, quelle soit littéraire (le groupe tire son nom d’un roman de René Barjavel) ou cinématographique.

Conjuguer la synth-pop et le français peut être assez casse-gueule. Il y a bien eu des succès récents, Lescop en est l’exemple parfait, mais l’envie de produire une musique à la fois dansante et écrite, qui plus est, influencée par une esthétique et des références plantées dans un univers parfois dystopique, a tout du projet casse gueule.

Pourtant ici, l’ensemble fait sens et cohésion. Lettré sans être prétentieux, extrêmement bien produit par Tobias Wilner, la musique de Ravages nous emmène et reste en tête. Car rien n’est laissé au hasard et les compositions répondent avec bonheur à des textes ciselés. En ce sens, et bien loin de toutes les influences marketing qu’on voudrait  leur coller, c’est plus du côté de NZCA/LINES, et de son exceptionnel album Infinite Summer qu’on se retrouve, même si la musique des Français se veut un peu plus positive par moment.

Qu’ils nous invitent à nous échapper avec Syracuse, qu’ils se fassent acteurs sur Disparition Totale et Définitive ou spectateurs externes sur la très bonne Abraxas qui cloture cet EP cinq titres, ils naviguent avec bonheur entre envies futuristes et influences 80’s, nous laissant toujours maîtres de notre écoute et de l’interprétation que l’on peut faire de leur musique et de leurs paroles. Un vrai gage de qualité et surtout de confiance envers l’auditeur qui fait plaisir, à une époque où beaucoup préfèrent se faire servir de la bouillie auditive plutôt que de se laisser emporter, parfois se perdre, par une musique qui amène à la fois un plaisir immédiat tout en poussant à la réflexion (un peu à l’instar du dernier album de Barbagallo).

Page blanche réjouissante autant que déclaration d’intention, Renaissance permet à Ravages de s’échapper vers une musique qui semble leur ressembler et les faire vibrer. Entre rétro et futurisme, ne sacrifiant jamais les paroles sur l’autel de l’efficacité, leur musique s’attache à nos oreilles dès la première écoute. Une belle Renaissance en somme.

Photo : Christophe Crénel