Donna Blue sublime les sixties au goût d’aujourd’hui
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Auteur·ice : Joséphine Petit
11/10/2022

Donna Blue sublime les sixties au goût d’aujourd’hui

Si l’on a découvert Donna Blue par hasard au printemps dernier, nous ne pouvons que nous en réjouir aujourd’hui. Dark Roses, dernier disque en date du duo, aura illustré notre été du début à la fin. Il suffit de peu pour faire de cet album aux teintes de cinéma la bande originale d’une saison, voire plus si affinités. Après un concert intimiste au Pop Up du Label en juin dernier, la venue de Danique et Bart à Rock en Seine était l’occasion parfaite pour nous de les rencontrer. Si vous décidez de prêter une oreille curieuse à leur musique, nous vous aurons prévenu·es : un seul morceau et vous risquez de devenir accro à leur irrésistible touche vintage.

La Vague Parallèle : Salut Danique et Bart, on se rencontre juste après votre concert à Rock en Seine. Comment vous vous sentez ?

Danique : Très bien. On a un peu chaud. C’était un beau concert, et l’ambiance est super. C’est parfait pour commencer la journée. 

LVP : Quel est votre rapport à la scène ? C’est quelque chose qui vous plaît ?

Bart : Oui, surtout dans des festivals comme Rock en Seine, parce que c’est très spécial pour nous de jouer en France, comme on vient des Pays-Bas.

LVP : Il y a quelques mois, vous avez joué dans une petite salle parisienne, le Pop Up du Label, devant une petite foule qui était là rien que pour vous. Aujourd’hui, vous avez joué dans un grand festival devant une foule qui pour certain·es vous connaissent, et pour d’autres vous découvrent. Est-ce que vous ressentez une différence en jouant ?

Danique : C’est d’abord différent parce que c’est dehors et en plein jour. On aime les deux tout autant ! Au Pop up du label, il y avait peu de public, mais le show était très intimiste, ça nous a semblé très spécial. Le concert d’aujourd’hui était tout aussi bien mais pour des raisons différentes. C’est aussi une belle chose d’avoir un public plus large avec des gens qui nous découvrent. 

Bart : Oui, c’est l’avantage des festivals : découvrir de nouveau artistes !

LVP : C’est la première fois que l’on se rencontre en interview pour La Vague Parallèle. Est-ce que vous pouvez nous présenter votre projet pour ceux qui ne le connaissent pas encore ?

Danique : Bien sûr, on s’appelle Donna Blue et nous venons d’Amsterdam. Notre musique est plutôt du indie pop cinématographique avec une touche de vintage. On adore les bandes sons des vieux films italiens et la French wave, on essaie de mettre tout cela dans nos morceaux. 

LVP : Danique, j’ai lu que vous aviez décidé de former un groupe après que tu aies écrit une chanson à Bart pour la Saint Valentin, mais qu’à l’époque, tu ne savais pas jouer d’un instrument, et que tu as appris après avoir pris cette décision. Est-ce que ça vous a pris longtemps avant les débuts de Donna Blue ?

Bart : C’est vrai, j’ai tellement aimé ce morceau que je lui ai dit qu’on devrait monter un groupe.

Danique : Je crois que c’était il y a cinq ans. On n’a pas mis très longtemps à écrire notre première chanson ensemble. Depuis, ça a été tout un processus d’apprentissage, et je pense que je m’améliore encore aujourd’hui chaque fois que je joue. 

Bart : C’était aussi très naturel. On a écrit et composé les chansons chez nous, puis commencé à faire des vidéos, ce que Danique faisait déjà, comme elle est photographe de métier. L’angle était parfait pour nous. 

Danique : Combiner la musique et la photographie, c’était un beau projet artistique. 

LVP : Donc à vos yeux, le projet n’est pas seulement musical, mais plutôt artistique dans un sens plus général ?

Danique : Oui, ça nous plaît de créer un monde dans lequel laisser vivre notre musique. C’est ce vers quoi on tend.

Bart : Absolument. On utilise tout cela comme moyen d’expression. C’est aussi agréable de pouvoir le faire ensemble. 

LVP : Comment vivez-vous le fait d’être ensemble dans la vie comme sur scène ? Est-ce que c’est parfois difficile ?

Bart : On peut voir ça comme des vacances. Aujourd’hui on est ici, on fait de la musique ensemble, c’est l’une des meilleures choses à faire. 

Danique : Je ne dirais pas que ce sont des vacances (rires), mais c’est agréable de pouvoir voyager ensemble. Souvent, c’est plus facile de travailler ensemble car on se connaît si bien que l’on comprend instantanément ce que l’autre veut lorsqu’on écrit, sans avoir à utiliser beaucoup de mots. Mais parfois c’est plus compliqué, parce qu’on est tout le temps ensemble et qu’il faut aussi savoir garder un peu de distance pour avoir une bonne relation. Tout est une question d’équilibre.

 

LVP : Votre premier album, Dark Roses, est sorti au printemps dernier. Avec quelques mois de recul, comment avez-vous vécu cette sortie ?

Danique : C’était particulier, et aussi très difficile. Sortir un album demande une charge de travail que j’avais personnellement sous-estimée. Mais c’est génial d’avoir enfin quelque chose que l’on peut toucher du bout des doigts. Avec un album, tout semble réel. On avait sorti des EP avant, mais c’était différent. En plus, on a eu beaucoup de bonnes réactions jusqu’ici. 

Bart : Tout particulièrement en France ! On est très heureux. Sortir un album, c’est toujours une grande aventure du début à la fin. C’est comme écrire un livre ou faire un film, c’est beaucoup de travail, mais une fois terminé, c’est très satisfaisant.

Danique : C’était aussi un peu étrange d’avoir travaillé si longtemps sur quelque chose de secret, que lorsque ça sort et que les gens le découvrent, ce n’est plus seulement le nôtre. On se dit alors de suite que l’on veut travailler sur quelque chose de nouveau.

LVP : Votre univers entier tourne autour du noir et blanc avec quelques touches de couleur par-ci par-là. Ce procédé est souvent utilisé pour illustrer le passé. Le temps qui passe, ça vous parle ?

Danique : Oui, je pense que le noir et blanc est une manière intemporelle d’illustrer quelque chose. En noir et blanc, on ne se réfère pas à un jour ou une période précise. J’ai aussi une certaine sensibilité avec les contrastes et les gris. Dans mon travail en tant que photographe, j’ai fait beaucoup de photographie à l’argentique, donc ça me parle. 

LVP : Est-ce que vous auriez aimé vivre dans une autre décennie, comme les sixties par exemple ?

Danique : On en a déjà parlé (rires), on aurait adoré découvrir les années soixante, mais seulement pour une semaine. Ça avait l’air super, mais il est probable que beaucoup de choses n’en avaient que l’air.

Bart : Surtout pour les femmes ! Ce serait chouette de pouvoir jeter un oeil dans ce monde.

LVP : Votre musique, votre image et vos clips ont quelque chose de très cinématographique. J’ai parfois l’impression d’écouter la bande son d’un film. Est-ce que le cinéma fait partie de vos inspirations ?

Danique : C’est un beau compliment ! Lorsque nous composons, Bart vient souvent avec une mélodie, et comme je suis une personne plutôt visuelle, j’imagine une scène, comme dans un film. On discute de ce que le morceau pourrait raconter, ou le sentiment qu’il pourrait transmettre, et on écrit à partir de tout cela. C’est un processus très visuel. 

LVP : Vos textes sont aussi très illustrés, comme de petites captures d’écran d’instants de vie. 

Danique : Oui, c’est ce qu’on essaie de faire ! 

Bart : La musique de films nous inspire beaucoup aussi dans l’écriture. 

LVP : Quels sont les compositeurs qui ont pu vous inspirer ?

Bart : Ennio Morricone est un très bon exemple. Il a fait beaucoup plus que les westerns que tout le monde connaît. Nous aimons aussi beaucoup les bandes originales des films de David Lynch, qui ont pour la plupart été composées par Angelo Baladamenti. C’était un compositeur très sensuel. 

Danique : Il y a aussi la musique des giallo, d’étranges film d’horreur italiens des sixties, qui ont des bandes sons et des couleurs géniales.

 

LVP : Vous chantez parfois en français, dans Solitaire ou 1 2 3 for instance. Est-ce que vous portez une certaine importance à la culture française ?

Danique : J’ai toujours adoré la langue française. Je venais en vacances en France tous les étés avec mes parents quand j’étais jeune, et j’étudie le français depuis des années. Comme je ne vis pas en France, c’est difficile de le pratiquer, mais j’aime beaucoup la culture et la musique française comme Serge Gainsbourg.

LVP : Oui, ça s’entend dans votre musique. Je pensais aussi à Françoise Hardy en écoutant vos titres, son nom vous parle ?

Bart : Oui, absolument !

Danique : Elle est géniale ! Il y a aussi beaucoup de films de Jean-Luc Godard qui sont importants pour nous. 

Bart : Et d’Agnès Varda. Je pense que la culture française est plus riche que la néerlandaise. L’art néerlandais existe bien sûr, mais ce n’est pas aussi sophistiqué que la culture française. 

Danique : J’ai aussi le sentiment que la langue est parfois plus sensuelle et romantique. On peut s’amuser avec le rythme entre les mots.

Bart : Quand on joue en France, c’est aussi très différent pour nous. J’ai l’impression que le public est plus attentif à la musique. 

LVP : Et les gens peuvent être surpris quand vous chantez en français au milieu du set.

Bart : Exactement, c’est une belle surprise à leur offrir. 

LVP : Comment se passe votre week-end à Paris ? La ville et le festival vous plaisent ?

Bart : On est déjà venus plusieurs fois à Paris. On y a même tourné notre premier clip pour Sunset Blvd. On écoute aussi beaucoup de radios françaises comme FIP, qui jouent nos morceaux aujourd’hui, c’est génial !

 

LVP : Une dernière question, vous pouvez nous confier un coup de cœur dans la programmation de Rock en Seine cette année ?

Bart : Nick Cave !

Danique : J’aurais aussi adoré voir Aldous Harding, mais elle jouait en même temps que nous. 

Bart : On aime aussi beaucoup Kraftwerk. C’est très différent de la musique que nous faisons, mais ce sont des légendes !

Danique : Puis, on va aussi se balader dans le festival et découvrir de nouvelles choses.

LVP : C’est à cela que servent aussi les festivals !

Donna Blue à Rock en Seine © Victor Picon

Interview co-écrite et réalisée avec Chloé Lahir

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