First Shot : découvrez LO, les cris du cœur d’une génération paumée
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Auteur·ice : Flavio Sillitti
20/11/2020

First Shot : découvrez LO, les cris du cœur d’une génération paumée

Dans First Shot, la rédaction de La Vague Parallèle mise une pièce sur des artistes qui font tout juste leur entrée sous les projecteurs. Aujourd’hui, c’est la puissante fibre spoken word de LO, auteur-compositeur-interprète et pianiste bruxellois, qui nous a fait frissonner. Sur fond de notes électroniques, son premier single, Mort-né, aborde les plaies d’une génération à l’avenir brumeux, qui décide de jeter le masque et de faire face à ses multiples failles. Une ode à l’acceptation de soi, aussi complexe soit-elle.

Comme mon père

Je suis borné

Si j’ai des absences

C’est peut-être parce que je suis mort-né

Car si Loïc Bailly parvient à transmettre un sentiment majeur à travers ce premier partage, c’est la vulnérabilité. Celle d’un jeune homme de 28 ans qui décide de transformer ses démons en art. Sa musique se veut alors purgatoire et exutoire à la fois, écoulant ses doutes et ses angoisses le long de sonorités trap envoûtantes aux arrangements signés Olvo, le Namurois maître des rythmes. La superbe plume du Bruxellois avait d’ailleurs déjà fait mouche lors de l’édition 2020 du concours Du F. dans le texte qui met chaque année en lumière les artistes francophones des régions wallonne et bruxelloise. La finale du concours ayant été annulée au vu de la crise sanitaire, les délicieux piano-voix de LO n’auront pas eu la chance de fouler les planches du Botanique en mars dernier. Ce n’est que partie remise. Heureusement, les Internets nous permettent aujourd’hui de découvrir sa sensibilité musicale captivante. Et c’est une sacrée claque.

 

Le texte de LO renferme une kyrielle de blessures dont certaines résonneront peut-être en vous comme un témoignage familier. On y parle de le pression corrosive exercée par les autres (“Ma pire phobie c’est pas que je me trompe, c’est que les gens le voient”). On y parle des relations sentimentales alambiquées (“Quand j’y mets tout mon cœur elles finissent par se raviser. Je crois que je leur fais un peu peur.”). On y parle des difficultés qu’apporte le temps qui passe (“C’est tellement triste l’adolescence et ma peau me fait tant souffrir”). Plus largement, on y parle du quotidien désabusé d’une génération un peu paumée face au monde qui l’entoure, à travers des mots criants de justesse et de pertinence.

Autre point fort de l’œuvre : ces sons envolés et distordus sur les refrains. Donnant l’impression d’un synthé désaccordé et affolé, les sons lustrés par Olvo élèvent l’intensité du morceau de façon intermittente, ponctuant Mort-né de sections plus soutenues, entre des couplets vaporeux de spoken word.

«mort-né » parle d’une génération qui parvient difficilement à s’accomplir, à être confiante, à voir sereinement l’avenir, car elle est constamment ramenée au fait que le monde se meurt et que l’avenir de l’être humain est en pointillé. En 2020, cette situation est d’autant plus parlante, avec les projets de chacun qui doivent être avortés ou retardés, et les objectifs, remis en question. Tout cela est exacerbé par le fait que nous sommes constamment exposés (sur Internet et les réseaux) à la réussite ou l’échec des autres, et que l’on passe son temps, consciemment ou non, à se comparer et à concevoir la réussite comme une question de visibilité, « se montrer ». Si on ne nous voit pas, on n’existe pas.

Le clip est signé Simon Vanrie et met en scène le chanteur dans des séquences à l’esthétique abstraite et plaisante. Jouant avec les couleurs et les textures, le visuel corrobore l’esprit tourmenté du titre. Mort-né est le premier extrait d’un EP à venir en 2021 chez 30Février/PIAS. Et que ce soit sur des nappes électro ou des compositions plus épurées, en piano-voix, il nous tarde d’écouter le reste des cris du cœur de LO.


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