FORM consacre sa musique au pays du Cèdre dans son dernier EP Amal
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Auteur·ice : Adriano Tiniscopa
16/12/2020

FORM consacre sa musique au pays du Cèdre dans son dernier EP Amal

Direction Argenteuil pour rencontrer FORM et causer de leur dernier EP, Amal, sorti le 10 décembre dernier chez Nowadays Records. Aksel, le beatmaker « pur et dur » du groupe, était malade le jour de la rencontre. Qu’à cela ne tienne, Hausmane, au chant et au clavier, Adrien, au synthé, à la prod, parfois choriste, ont parlé d’une seule voix. Amal ça signifie l’espoir en arabe, mais cet EP en dit davantage. Ce projet musical est à la fois un tribut à la révolution libanaise et le porte-voix de celles et ceux qui la font.

Le rendez-vous était donné au Musée sauvage à Argenteuil donc, en banlieue parisienne (Val-d’Oise). Jadis un hôpital, devenu musée puis métamorphosé en espace collaboratif culturel et artistique, ce lieu est le QG du trio de « pop électronique ». Depuis deux ans, c’est ici qu’ils créent et « c’est royal », glisse Adrien. Pour leur troisième projet musical, Amal, il y a donc ce « côté fait maison avec toute la prod et le mix qui ont été réalisés ici », poursuit-il. Le trio s’y est retrouvé en mode « studieux studio » sur les productions principalement d’Askel pour y ajouter les synthés, pour l’écriture et faire l’arrangement.

© Yanis Hamnane

Cet EP c’est aussi un « épisode particulier », précise Hausmane. Assez court. 4 titres qui entonnent le Liban. Et qui donnent la parole à son peuple. Depuis octobre 2019, la Thawra (la révolution) anime le cœur des Libanais-es. C’est à ce moment-là que le chanteur, lui-même franco-libanais, a eu « besoin de reconnecter très fort, presque un manque physique ». Puis la tragique explosion de Beyrouth en août dernier… a été l’événement déclencheur. Hausmane suivait grâce à sa famille et ses amis ce qui se passait à des milliers de kilomètres de là. « Obsédé » par ces événements, et pour transmettre ce ressenti, il a donné l’impulsion au projet Amal. Plus proche de lui, il y avait Aksel et Adrien « touchés par l’injustice de ce monde et encore plus celle qui touche des proches. Et puis, quand ça parle de musique ça nous plaît de toute façon », ajoute ce dernier.

 

Un EP globalement électronique, harmonieux, propre et sincère. Les sonorités orientales ne sont pas surexploitées. Au contraire, finement ajoutées. Il y a la darbouka faite de sa peau en plastique au son métallique qui accompagne avec énergie le titre Thawra. Pure musique instrumentale aux percussions puissantes desquelles s’échappe avec tonnerre la colère des rues de Beyrouth. Aussi, la voix de Sofiane Saidi est appréciable. « Le petit prince du raï 2.0 » dans le titre The Switch narre son histoire. Celle de quelqu’un qui part en montage fuyant une société folle mais rappelant toutefois la nécessaire connexion à notre humanité. « Un chanteur incroyable qui a beaucoup chanté avec Acid Arab, on s’est rencontrés il y a un an presque. C’était un peu évident d’avoir sa patte là-dessus », raconte Hausmane.

 

© Yanis Hamnane

 

Et puis dans cet EP également, l’empreinte d’un véritable désir d’exposer une parole plus brute encore. Dans le titre Beirut par exemple, il y a cet extrait touchant d’un coup de fil passé à une amie trois jours après l’explosion dans la capitale. En arabe, en français, en anglais. « Elle décrit ce qu’elle voit dans la rue, que 300 000 personnes sont à la rue, qu’elle ne voit aucun militaire, seulement les gens s’entraider. Finalement, ils s’en foutent de savoir qui c’est, ils ne cherchent pas à attaquer mais à avancer », poursuit le chanteur.

Enfin, plusieurs collaborations qui donnent à voir le talent du Liban, resté ou parti du pays. Il y a Ivan Debs, illustrateur et graphiste renommé de la thawra dont les visuels couraient les rues. Et Yasmine Hilal, une amie photographe qui a filmé à la VHS les rues de Beyrouth après l’explosion, donnant au clip de Came Out Here un air presque de documentaire.

 

 

 

 

Un EP cru, pour reprendre les mots de FORM, qui donne à penser, à écouter, à voir, à s’émouvoir, à s’intéresser à tout un pays, à tout un peuple qui tête relevée rebâtit encore aujourd’hui un pays en éternelle reconstruction. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ? « Amal », répond FORM.

 

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