Good Morning TV : “On a voulu faire un disque qui vieillisse bien dans le temps.”
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Auteur·ice : Marion Fouré
02/09/2021

Good Morning TV : “On a voulu faire un disque qui vieillisse bien dans le temps.”

Broadcast, Autolux, et même un soupçon de Crumb… Les meilleures références de la galaxie indé anglo-saxonne se rappellent subtilement à notre bon souvenir lorsqu’on écoute Good Morning TV, une jeune formation française qui n’a pas fini de faire parler d’elle. À travers un premier album intitulé Small Talk sorti le 18 juin dernier, le quatuor nous prouve qu’en 2021 la pop peut encore prendre de nouvelles formes. Tantôt dream, tantôt weird, cette pop contemporaine, délicate et spleenétique, a le don de nous captiver dès les premières mesures et tout au long du disque. On est d’ailleurs frappé par la cohérence de l’ensemble sublimée par une production impeccable. À l’occasion de leur release party sur la terrasse du Trabendo en juillet dernier, nous avons eu la chance d’échanger quelques mots avec la bande composée de Bérénice Deloire, Barth Bouveret, Thibault Picot et Hugo Dupuis.

La Vague Parallèle : Salut Good Morning TV ! Alors, qu’est-ce que ça vous fait d’être au Trabendo ce soir ?

Bérénice : En fait on avait vu la première édition de Take Me Out l’été dernier et on trouvait ça super chouette ! Le Trabendo c’est une salle qui nous évoque beaucoup de concerts très chouettes et puis l’événement de ce soir est organisé par le Supersonic, un lieu où nous avons déjà joué plusieurs fois. 

Barth : Cela faisait longtemps qu’ils voulaient nous faire rejouer aussi donc ça tombait bien ! 

Thibault : C’est cool d’être ici ce soir ! Ça fait trois ans qu’on couve ce disque. On a mis deux ans à le faire, à attendre qu’il sorte, puis il a été encore retardé d’une année à cause du covid. Aujourd’hui c’est un peu particulier. 

LVP : C’est la première fois que vous jouez votre nouvel album ?

Barth : On a fait une petite date en Bretagne en juin mais sinon ce soir c’est la première date parisienne.

Hugo : On avait déjà joué quelques morceaux de l’album mais là c’est la première fois qu’on le présente en entier au public. 

Bérénice : Cette release party a une saveur particulière ! C’est chouette de pouvoir réunir aujourd’hui tous les copains, le label, pour fêter la sortie de l’album.

LVP : Votre dernier EP date de 2016. Pourquoi avez-vous attendu autant de temps pour sortir un nouveau disque ? 

Bérénice : En fait ça a été un peu progressif car au départ Good Morning TV était un projet solo. Je travaillais juste avec Barth.

Barth : Je n’étais pas encore musicien dans le projet mais on travaillait déjà ensemble avec Bérénice sur la production de l’EP.

Bérénice : Petit à petit on a commencé à travailler tous les quatre et à composer l’album comme un vrai groupe, où chacun a pu apporter sa pierre à l’édifice. 

Barth : Le groupe s’est vraiment formé après la sortie de l’EP. 

Thibault : Cela explique aussi le temps de composition, d’enregistrement, car il a fallu se trouver, comprendre comment la formation fonctionnait pour savoir quelle direction on voulait prendre. 

LVP : Votre premier album Small Talk est sorti le 18 juin. Pouvez-vous nous raconter la genèse du projet et la façon dont il a été composé ? 

Bérénice : Au départ j’ai amené des compositions personnelles et ensuite nous les avons retravaillées à quatre. Les autres morceaux ont été composés en répèt, tous ensemble. 

Thibault : Il y a pas mal de morceaux de l’album qui partent de jams et qui ont été un peu apprivoisés avec l’enregistrement. On a fait beaucoup de tri, de choix, pour arriver à ces morceaux qui finalement sont assez pop. 

Bérénice : On met toujours un point d’honneur à sortir de vrais morceaux pop dans la forme. On les travaille toujours pour qu’ils aient une structure et un sens de bout en bout. 

LVP : Et l’enregistrement ? 

Barth : On est partis s’isoler dans le sud une dizaine de jours en 2018. On a pris tout le matériel et on est allés s’installer dans une vieille maison en pierre, où on avait déjà enregistré le premier EP d’ailleurs. C’était très calme et donc parfait pour enregistrer, arranger, etc. On a même collé des matelas aux murs pour insonoriser !

Hugo : C’était la débrouille ! (rires)

Barth : On dormait au milieu de la batterie et des amplis ! (rires)

(c) Alice Sevilla

LVP : Comment s’est passée cette session à huis clos ? 

Bérénice : À part Barth qui ronfle (rires), ça s’est super bien passé ! C’était vraiment chouette de se retrouver tous les quatre en tant que groupe et de formaliser tout ça. 

Barth : On enregistrait en bas et quand certains ne bossaient pas, ils allaient faire d’autres trucs à l’étage, comme du synthé par exemple. On a fait de la musique h24 !

LVP : Quand on écoute Small Talk d’une seule traite, on perçoit une cohérence aussi bien dans le son que dans la structure des morceaux. C’était une volonté de votre part de créer un album relativement uniforme ?

Barth : À la base, on est tous un peu perfectionnistes, du coup lorsqu’il y a quelque chose à améliorer, il y a toujours quelqu’un pour le dire. En fait, tout le monde a été très investi dans le processus, du coup je pense qu’il y a une dimension très personnelle.

Bérénice : Cette idée de cohérence, de fil rouge tout au long de l’album est peut-être aussi due à l’intimité du lieu de l’enregistrement. On voulait créer un disque qui nous soit propre, qui sonne Good Morning TV !

LVP : D’ailleurs d’où vient le nom de votre groupe ? 

Thibault : C’est en référence à un morceau de Blur qui s’appelle End of a Century. À un moment Damon Albarn dit “Good Morning TV” et on trouvait que c’était cool ! Cela correspond bien au style du groupe où il y a toujours des choses numériques qui se mélangent à des trucs plus sensibles, avec des aspérités.

Bérénice : Il y un côté un peu nostalgique aussi dans le fait d’allumer la télé et d’être un peu léthargique devant un programme ; de ne pas voir sa journée défiler. Ce truc nous évoquait pas mal de choses. 

LVP : Comment pourriez-vous décrire votre musique à une personne qui ne la connaît pas ? 

Barth : Moi je dis qu’on fait de la pop maintenant !

Hugo : De la pop indé ?! (rires)

Bérénice : Moi j’aime bien le terme weird pop, qu’on utilisait beaucoup à l’époque d’ailleurs. C’est-à-dire qu’on fait des choses dans des formats pop, avec des mélodies accrocheuses mais on les triture pour que ce soit un peu différenciant dans les sons, dans les textures.

LVP : Il y a quand même un petit côté dream pop dans votre musique…

Thibault : On nous le dit beaucoup, c’est rigolo. C’est marrant parce qu’il n’y en a aucun de nous qui est vraiment un fan de shoegaze. 

Hugo : Moi j’ai eu ma période ! 

Bérénice : C’était peut-être plus le cas sur le premier EP mais pour l’album on a essayé de se détacher de ça. On ne voulait pas forcément noyer les sons dans la reverb comme on avait pu le faire avant pour avoir un résultat beaucoup plus lisible, plus subtil sans tomber dans les codes de la dream pop. 

Thibault : On voulait vraiment faire un disque qui soit un disque de 2021, sans être ultra référencé. En tout cas on a essayé. Mais effectivement il y a des jeux de textures qui sont très importants dans Good Morning TV.

LVP : Selon vous, quel est le moment idéal pour vous écouter ? 

Bérénice : On nous dit souvent qu’on fait de la musique solaire alors que nous on la voit plutôt nocturne, une musique d’automne voire d’hiver. 

Thibault : Une musique introspective que tu écoutes au casque, ou dans les transports avec des lumières qui défilent. 

Barth : Soit très tard, soit très tôt ! 

Bérénice : On en revient toujours au domaine de l’intime. Je ne sais pas si c’est une musique qui se partage beaucoup. 

Thibaut : Oui ce n’est pas le genre de musique que tu vas mettre en soirée !

LVP : Qu’est-ce que vous voulez transmettre à travers votre musique ? 

Bérénice : En fait, quand on écoute l’album de bout en bout, il y a beaucoup de sujets récurrents comme la solitude. Globalement des sujets pas très fun. Mais ce qu’on a quand même essayé de faire, c’est de lier ces sujets à des thèmes, des mélodies assez dansantes, pour créer un équilibre. 

Thibault : C’est bien de voir ce disque comme un disque contemporain, comme un instantané, aussi bien dans les thématiques que dans la production. On a voulu faire un disque qui vieillisse bien dans le temps mais qui soit aussi représentatif d’un moment. 

Bérénice : Et le nom de l’album, Small Talk, c’est un peu ça. Ce sont des bribes du quotidien qui parlent en même temps de sujets profonds et intimes. 

LVP : Quel est votre morceau préféré de l’album et pourquoi ?

Hugo : Je pense qu’on a tous notre morceau préféré du fait de nos influences assez différentes. Moi j’aime beaucoup les morceaux très calmes de l’album comme Moving Image par exemple. Je pense que c’est ma préférée depuis toujours. 

Barth : Moi je suis fan de Tourism Business. Les deux parties. Un peu plus la deuxième…

Hugo : Ça c’est le côté krautrock ! (rires)

Bérénice : Moi j’aime bien Lethargic Way parce qu’elle condense un peu tout ce qu’on aime faire.

Thibault : Moi je dirais Insomniac parce que le final est vraiment total ! Je trouve que c’est très réussi. 


LVP : Vous parliez tout à l’heure de vos influences respectives, parfois différentes. Vous pouvez nous en dire plus ? Quel est par exemple votre ou vos artistes un peu fétiches ? 

Bérénice : Je dirais Broadcast pour le coup. Il y a aussi Autolux qui nous a beaucoup influencés pour l’album.

Thibault : Oui, l’influence d’Autolux est certainement la plus identifiable dans le disque. 

Bérénice : Dans les références un peu plus pop, il y a Homeshake qu’on aime beaucoup aussi. Chris Cohen.

Barth : Moi je dirais Françoise Hardy pour citer une référence de pop française et aussi Deerhoof pour les guitares.

Thibault : Deerhoof et Autolux sont un peu les artistes qu’on a en commun dans la galaxie Good Morning TV. 

Barth : Sinon Hugo et moi on écoute beaucoup de trucs ingérables. (rires)

Bérénice : Pas les mêmes trucs ingérables ! (rires)

Hugo : Je suis très très fan de Justin Bieber et d’Ariana Grande

Thibault : Il faut se nourrir de tout !

Bérénice : Au-delà de ça, on aime bien le fait qu’il n’y ait pas de tabou. On écoute vraiment des trucs différents et c’est ce qui alimente notre musique. 

LVP : Le choix du chant en anglais vient-il de vos influences qui ont l’air majoritairement anglo-saxonnes ? 

Bérénice : Oui, de par nos influences, on est plutôt attirés par l’anglais. Après ce n’est pas figé non plus.

Barth : Dans le fond, on ne ferme pas la porte au français, mais il y a un côté très direct en anglais où tu chantes un peu comme tu parles. C’est moins vrai pour le français. Tu peux le faire, mais ce n’est pas tout à fait le même genre de musique. Je pense que les langues sont souvent affiliées à des styles.

Thibault : En termes de composition, je trouve qu’on n’est pas si éloigné d’artistes comme Flavier Berger ou même Biche où c’est hyper réussi ! En fait, il y a des groupes qui arrivent très bien à intégrer le français, par contre il faut que ce soit parfaitement naturel, que ça vienne d’une envie, sinon ça ne peut pas fonctionner. 

LVP : Maintenant que l’album est sorti, quelle est la suite de Good Morning TV ? 

Thibault : C’est défendre l’album en live, un maximum ! Il faut qu’on joue là.

Barth : Je pense qu’on a tous envie de s’y remettre pas trop tard. 

Thibault : Ce disque était vraiment important pour trouver le son du groupe. Pour le deuxième album je pense qu’il faudra peut-être qu’on se donne une méthode, un parti pris, un thème avec une direction très claire. 

Bérénice : On n’attendra certainement pas cinq ans avant de sortir le prochain album !

LVP : Merci Good Morning TV !

 

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