Bien plus qu’un festival de musique ! L’expérience Horst, c’est la rencontre effervescente de l’art plastique, de l’architecture, des musiques électroniques, mais aussi (et surtout) d’une certaine philosophie hédoniste du vivre-ensemble et de la transmission. Après avoir investi ces derniers mois l’incroyable site de l’ASIAT à Vilvoorde pour conjuguer sa froideur bétonnée poétique à des initiatives engagées diverses, le Horst Festival clôture sa saison avec l’événement electro de l’été belge. Rendez-vous du 10 au 12 septembre prochain.
Ce week-end, c’est au son des beats effrénés et des nappes envoutantes de la septantaine d’artistes programmé·es que vibreront des milliers de festivalier·ères en quête de reconnections tant rythmiques que corporelles. Une affiche qui fait la part belle aux productions locales et internationales, mais également aux jeunes pousses de la nouvelle scène. On a eu la chance de visiter les lieux et de discuter avec Simon Nowak, bookeur du festival à l’origine de cette effusion de talents et de découvertes en tout genre.
De la techno au pied de l’art
La véritable tête d’affiche de ce festival, c’est son concept. Niché au cœur d’un ancien site militaire à Vilvoorde, c’est au milieu d’œuvres plus conceptuelles et modernes que jamais que le Horst Festival compte faire danser ses invité·es. Avec une poignée d’autres journalistes, on a eu la chance de visiter les lieux au moment de la création des différentes compositions, durant le Lab, un concept pédagogique né en partenariat avec l’université KU Leuven. Une période de plusieurs jours au début de l’été, durant lesquels 100 étudiant·es et passioné·es, inscrit·es au préalable, ont pu bénéficier d’une formation tant pratique que théorique sur les métiers de la création plastique et bien d’autres domaines. Au menu : talks avec des professionnel·les, participation aux différents projets de construction et véritable expérience communautaire au cœur de l’ASIAT. Avec comme fil conducteur cette année cette notion de “refaire du lien social” après une année où celui-ci a été condamné de façon plurielle.
Après avoir servi de vitrines tout l’été durant les deux mois d’exposition, les différentes œuvres – dont la conception fut orchestrée à distance (ou non) par la crème des créateur·rices contemporain·es – sont fin prêtes à servir de dancefloors. C’est donc au pied des structures lumineuses de l’Italienne Marinella Senatore ou dans l’antre vernaculaire de Leopold Banchini que s’opéreront les différentes communions corporelles sur fond de techno acide ou moelleuse en ce second week-end de septembre.
Parmi les différentes infrastructures mises en place, on retrouve également l’espace Unglued : une espèce de serre géante qui servira à la fois de scène (accueillant entre autres ascendant vierge, Teki Latex ou encore Juliana Huxtable) mais également de lieu de rencontre pour des talks en début d’après-midi le samedi et le dimanche. Un rendez-vous à ne pas manquer (à condition de trouver le courage de sortir de votre tente après une courte nuit) et qui se déclinera en quatre thématiques différentes : “Becoming better in doing good”, “Makers of their own time : feminist relational activism”, “Searching for the body” et “Temporary architecture, permanent communities”.
Un line up faisant rimer qualité et diversité
Lorsque l’on discute brièvement avec Simon Nowak, programmateur du festival, on se rend vite compte que le Horst Festival a bien intégré l’importance capitale de faire de son affiche une véritable déclaration semi-politique. Car, qu’on se le dise : en Belgique et en France, les programmations ont encore du boulot. Une sélection d’artistes ne devrait plus être le simple produit d’un bouche à oreilles, ou d’une réutilisation des circuits qui nous ont permis de bâtir l’affiche de l’année précédente.
Comme nous l’affirmait Elise Dutrieux, fondatrice de la plateforme SCIVIAS (visant à instaurer une certaine parité entre artistes de genres différents en Belgique francophone) : “Je pense que c’est une question de circuits. Il faut sortir des circuits habituels car beaucoup de femmes artistes se trouvent dans des réseaux plus “confidentiels”. Cette recherche demande du travail. Les talents, qu’ils soient féminins ou masculins, se trouvent désormais ailleurs que là où l’on avait l’habitude de les trouver.” Une philosophie que l’on retrouve chez Simon Nowak :
Chez moi, j’ai affiché les line up de toutes les précédentes éditions du Horst Festival. Et j’en avais marre de voir l’omniprésence de tous ces hommes blancs. Tu as assez d’artistes femmes, non-binaires ou autre. Tu dois juste prendre ce “risque” de les programmer, de miser sur des noms qui rapporteraient peut-être moins en termes de chiffres, mais qui nous aideraient à nous aligner dans notre philosophie d’inclusivité. Et, au final, ça va profiter à l’affiche en ramenant une diversité bénéfique.
| Simon Nowak
Une décision qui fait la différence et qui permet de mettre en lumière la maestria d’une DJ Marouchka, productrice bruxelloise aux sonorités wave eighties et post-punk qui saisit ses sets comme des tribunes pour laisser la parole aux discographies de femmes artistes engagées et queers. L’opportunité aussi de retrouver, en clôture de la soirée du vendredi, une affiche 100% féminine sur les quatre scènes principales du festival : l’acid house froide d’Helena Hauff, les sonorités infinies de la prodige belge AliA, la techno-garage solaire de India Jordan ou encore l’électro spirituelle de la Genevoise Aïsha Devi. En bref : un choix qui porte ses fruits, qu’on aimerait ne plus avoir à applaudir mais qu’il est nécessaire de souligner et encourager tant la diversité des affiches manque cruellement à l’appel lorsqu’il s’agit de creuser dans des genres plus définis, à l’instar de la scène techno.
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Au-delà de la venue prophétique du grand prêtre de la techno Jeff Mills, on se réjouit également de découvrir tout une pléthore de jeunes pousses de la scène électronique des quatre coins du monde. Il faut dire que ces derniers mois de confinement ont pu servir de véritables hiatus de production pour certain·es, et que les nouveaux talents ne cessent de fleurir ci et là avec des compositions léchées sous le bras. L’occasion pour nous de mêler dans notre programme des incontournables de nos sets de teufs et des découvertes totales.
L’année passée, au moment d’annuler, on avait seulement 70% de notre line up qui était bouclé. Ce qui est une bonne chose, car cela nous a permis de rappeler tous les artistes à qui on avait réservé un créneau, tout en comblant les 30% restants avec les nouveaux talents qui se sont fait un nom pendant le confinement.
| Simon Nowak
À noter également, la présence de Kiosk Radio qui établira son domicile le vendredi et le samedi sur la scène impressionnante du Moon Ra afin de mettre en scène les pépites de Bruxelles et d’ailleurs qui leur ont tapé dans les oreilles : des beats ésotériques de Strapontin au bruitisme expérimental de Tzii sans oublier la productrice Lyio, fondatrice du collectif bruxellois HE4RTBROKEN qui partagera les platines avec Paul Seul.
Vous l’aurez compris : le Horst Festival sera la réunion incontournable du week-end pour tout bon aficionado de techno qui se respecte. Si les places combi et du samedi sont sold out, vous pouvez toujours vous procurer des sésames pour le vendredi et le dimanche juste ici : https://horst.tickoweb.be/selection. Et pour les plus motivé·es d’entre vous qui ne peuvent pas rater le samedi du festival, il y a toujours moyen de choper une entrée en donnant de sa personne en tant que bénévole – et vous faire plein de potes par la même occasion. Inscriptions juste ici : https://planning.weneedyou.be.
Caméléon musical aux allures de mafieux sicilien.