Imaina : « Artistiquement, je suis plutôt touche-à-tout »
"
Auteur·ice : Giulia Simonetti
11/08/2020

Imaina : « Artistiquement, je suis plutôt touche-à-tout »

Imaina a révélé ce vendredi Piel Canela, son troisième single qui va former son futur EP. La jeune artiste belgo-bolivienne a accepté de nous rencontrer et nous transporte dans son mood mélancolique (mais toujours emprunt de positivité) pour nous faire découvrir son univers musical, artistique, mais pas que !

La Vague Parallèle : Avant de parler de ta dernière sortie et de ton futur EP, revenons sur ton parcours. En 2018 tu t’es présentée à The Voice Belgique en tant que Fabiola Legrain, aujourd’hui c’est à Imaina que je parle. Peux-tu m’expliquer cette évolution?

Imaina : Avant de participer à The Voice, je faisais déjà de la musique. J’avais déjà des groupes, j’avais aussi un duo de pop-folk latino. Mais c’est vraiment en faisant The Voice que j’ai confirmé mon besoin de faire de la musique et de devenir professionnelle. C’est de là qu’est née Imaina, c’est ma petite transformation pokémon (rires). 

LVP : Tu es Belgo-bolivienne c’est bien ça ? Quelles sont tes influences musicales du côté européen (occidental) et du côté sud-américain?

Imaina : Du côté européen, j’écoute The Dø. C’est un groupe franco-finlandais que j’adore et je les suis depuis leurs débuts. Ils m’ont toujours influencée, que ce soit dans la musique ou dans leurs visuels, des images très fortes qui racontent des histoires. Toujours du côté européen, même si elle est Iranienne, c’est Sevdaliza qui m’inspire. Elle a migré en Hollande quand elle était toute jeune. C’est une chanteuse électro-trap et elle est juste magnifique ! Une inspiration du côté latino, c’est Selena Quintanilla, qui était la queen de la cumbia. Elle m’a depuis toujours impressionnée mais malheureusement elle est morte très jeune. Et puis une petite dernière influence, vu que j’ai vécu et grandi en Bolivie, c’est Emma Junaro, qui est une artiste du folklore bolivien.

LVP : Tu mélanges l’anglais et l’espagnol, pourquoi ? Pour une question d’identité personnelle et/ou artistique?

Imaina : C’est comme tu l’as dit : pour une raison essentiellement identitaire. Déjà à la maison, je parle français et espagnol avec mes parents. Et puis, j’ai fait mes études secondaires en anglais. Mais de toute façon, aujourd’hui on mélange l’anglais à sa langue maternelle, on va toujours intégrer des petits mots en anglais dans les phrases. D’une manière générale je voulais rester moi-même et chanter dans les langues qui me parlent. L’espagnol c’est ma langue maternelle et l’anglais l’est devenu aussi. C’est une façon de parler à ma génération et la génération plus jeune qui mélange beaucoup les langues.

LVP : Piel Canela est sorti tout récemment, quel est ton rapport à ce morceau?

Imaina : C’est la chanson d’amour et ma chanson préférée de mon EP qui va sortir prochainement. C’est le morceau le plus tendre, le plus romantique que j’ai composé pour ce projet. Cette chanson est un peu différente des autres parce qu’elle est un peu plus positive comparée au reste. Piel Canela parle de l’illusion du grand amour, du premier grand amour qui laisse une marque à jamais.

LVP : Le texte se base sur une expérience personnelle ou sur une histoire complètement fictive ?

Imaina : Je pense que pour tous·tes les artistes, cela vient un peu d’un vécu personnel : c’est une rencontre avec quelqu’un qui m’a particulièrement marquée. Je me suis dit que même si la relation se termine mal, je vais toujours en garder un bon souvenir qui restera marqué sur ma peau à jamais. Évidemment, lorsque j’écris sur un vécu personnel, j’exagère toujours un peu, je dramatise. J’aime que ce soit poétique.

LVP : On ressent, même si on peut ne pas comprendre les paroles en espagnol, une certainmélancolie et une déception amoureuse. Est-ce le message que tu voulais faire passer?

Imaina : Je pense que l’on ressentira toujours une certaine mélancolie dans ma musique, mais dans le cas de Piel Canela, il ne s’agit pas vraiment de déception amoureuse. C’est une chanson qui parle d’accepter que nos relations laissent des marques sur nous, comme des tatouages sur la peau !

LVP : Tu te définis comme une artiste mélancolique, peux-tu nous expliquer ce que tu veux dire par là ?

Imaina : Quand je dis mélancolique, en fait c’est le mood, la vibe que j’aime mettre dans ma musique. C’est un sentiment qui s’est installé naturellement dans mon écriture et ma composition. C’est pouvoir regarder en arrière avec nostalgie, ne jamais être totalement triste ni heureux·se et donner une grande importance aux émotions.

LVP : Cette mélancolie se ressent aussi dans le clip qui accompagne le morceau. Comment s’est passée la réalisation du clip ? Tu t’autoproduis ou tu collabores avec d’autres artistes ? 

Imaina : Pour la production même, je m’autoproduis et je suis ma propre directrice artistique. En fait, quand j’écris, j’ai déjà mes visuels et mes concepts en tête. Puis je contacte des réalisatrices ou réalisateurs qui peuvent m’aider à concrétiser ma vision. Dans le cas de Piel Canela, j’ai contacté la réalisatrice Lou West, qui est aussi photographe. Elle a directement compris ce que je voulais faire et ce que je voulais transmettre comme émotion : ça s’est fait de manière naturelle et c’était vraiment très agréable !

LVP : Tu aimes d’autres formes d’art, je pense à la danse (hip-hop) ou la mode, par exemple. On peut retrouver ce souci de l’esthétique dans les clips notamment. Est-ce que cela a une influence directe ou t’influence d’une autre manière ?

Imaina : Oui, tout à fait. Je fais de la danse depuis que je suis toute petite et je m’épanouis aussi dans le monde de la mode. Cela m’a énormément aidée à m’assumer, à assumer mon corps, à m’assumer en tant que femme. J’ai réussi à trouver ma place, par exemple sur scène ou aussi face à la caméra, que ce soit pour les photos ou pour les clips. Je donne aussi autant d’importance à ma musique qu’à mes visuels. La danse, la mode, mes looks, ce que j’exprime à travers mes vêtements est très important pour moi parce que ça permet de plonger mon public dans mon univers. Il n’y a pas que la musique, même les lumières sur scène et la manière dont je me présente font partie de mon art.

LVP : À part la mode et la danse, est-ce que ton univers musical bénéficie d’autres influences ?

Imaina : C’est toujours beaucoup dans le visuel que j’ai des inspirations. J’adore tout ce qui peinture et art ancien, les statues par exemple. J’aime bien mettre ces influences dans les clips. Mais ce qui m’inspire aussi ce sont les contes, les allégories ou des personnages mystiques comme la sirène. J’avais fait des références à cela dans la vidéo de I’m Yours où je suis dans la mer. Je puise mes influences dans des genres artistiques différents : que ce soit des textes, des romans, des peintures, des films. Comme je suis très visuelle, dès que je vois quelque chose ou que je regarde la télé ou une série, une idée va me rester en tête. J’aime aussi glisser des petits secrets dans mes clips, tout le monde ne les remarque pas (rires), mais j’aime bien quand les gens me disent j’ai vu ça à telle minute.

LVP : Le covid a ralenti ou carrément bloqué les projets de nombreux artistes, surtout celleux qui en étaient à leurs premières armes. Comment as-tu vécu cette période qui malheureusement n’est pas encore finie ? Comment es-tu en train de t’adapter à cette situation ?

Imaina : C’est vrai qu’au début c’était un peu stressant. Je suis en train de préparer la sortie de mon EP. Il est fini, mais sans tournée et sans pouvoir le défendre devant un public, c’est difficile et un peu frustrant. Je n’ai donc pas de dates précises sur la sortie de l’EP. J’essaye de m’adapter comme d’autres artistes, avec des Facebook live par exemple. On commence à avoir des concerts sur des plateformes en ligne, après il y a toujours la question du gratuit ou du payant qui se pose. Et en tant qu’artiste indépendante, le soutien du public est essentiel : me suivre sur les réseaux sociaux et aussi acheter ma musique.

LVP : Justement, du point de vue d’une artiste, est-ce que tu ne penses pas que les gens sont moins enthousiastes pour regarder des live en ligne que pour aller à des concerts ?

 Imaina : Je pense que ça dépend du public. J’ai personnellement un public plutôt jeune, j’ai fait 2 Facebook live pendant le confinement et je pense que ça n’a pas mal fonctionné. Mais tout le monde n’est pas prêt à se connecter à un ordinateur et c’est vrai qu’il n’y a pas de vrai échange comme dans un concert. C’est la même chose pour moi, chanter devant un téléphone c’est un peu nul (rires), mais il faudra s’adapter et trouver des solutions créatives. Justement, grâce à mes clips ou mes vidéos/photos je parviens à rester connectée à mon public via internet à distance.

LVP : Quels sont tes projets futurs ? 

Imaina : Oh, je suis trop excitée ! Cet EP est vraiment mon bébé. Il s’appelle wounds et il parle du côté obscur de l’amour. Il y aura 6 titres, 3 que vous avez déjà découverts et 3 nouveaux. Chaque chanson est associée à un mot qui décrit une dérive de l’amour. Piel Canela est liée à l’illusion de l’amour. I’m Yours est lié à l’obsession, à l’addiction et D.U.K. est lié à la rupture. Les autres morceaux vont être aussi associés à des thématiques et des mots précis. Par exemple, je peux déjà dévoiler le titre de mon prochain single Glass Box, dont le thème sera la violence. Le clip que j’ai réalisé avec OUNI et PJ Claessens est déjà prêt et j’ai hâte de montrer ça !

LVP : Avant de se quitter, comment te définirais-tu ? Et comment définirais-tu ton art ?

Imaina : Je pense que je me définis avant tout en tant qu’artiste un peu “touche-à-tout “. Polyvalente, je n’aime pas m’enfermer dans une seule case, je ne suis pas juste chanteuse. Je me définis aussi en tant que femme, femme belgo-bolivienne issue de différentes cultures. Issue du peuple quechua, je suis d’origine indigène. D’ailleurs, Imaina est un mot quechua. C’est un mot interrogatif, mystérieux, qui veut dire “comment“. C’était aussi une manière d’honorer mes ancêtres quechuas et la sonorité me plaît beaucoup. L’ancrage dans la culture indigène est très important et j’espère vraiment pouvoir le montrer dans ma musique et dans mes visuels.

LVP : Est-ce que tu sens privilégiée d’avoir cette double culture ? Comment arrives-tu à l’exprimer ?

Imaina : Ce n’est pas toujours facile d’avoir une double culture et d’être mixte, mais je suis très contente et je me sens privilégiée d’avoir cette richesse, d’avoir vécu dans plusieurs pays ou de parler plusieurs langues… L’exprimer dans mon art se fait naturellement. Comme j’ai vécu en Bolivie et que je suis née là-bas, il y a des aspects qui sont restés en moi de manière naturelle : les looks, la musique, les couleurs. Il y a des gens qui m’ont dit que mélanger les deux langues n’était pas une bonne idée parce que cela risquait de prêter à confusion… mais je ne les ai pas écoutés (rires) et j’ai continué à me faire plaisir ! Je n’avais pas envie de ne composer qu’en anglais, je n’aurais donc pas pu faire découvrir qui je suis réellement.

LVP : Le reste de l’EP reste donc à l’image du mélange et de la pluralité culturelle que tu nous as déjà offerts dans tes autres morceaux ?

Imaina : Oui, tout à fait. Dans le reste de l’EP, j’aurai d’ailleurs une chanson avec un peu de français, et ça c’est cool. Une autre totalement en anglais. C’est donc vraiment au feeling que j’avance, mais de manière générale je mélange toujours au moins deux langues.


@ET-DC@eyJkeW5hbWljIjp0cnVlLCJjb250ZW50IjoiY3VzdG9tX21ldGFfY2hvaXNpcl9sYV9jb3VsZXVyX2RlX3NvdWxpZ25lbWVudCIsInNldHRpbmdzIjp7ImJlZm9yZSI6IiIsImFmdGVyIjoiIiwiZW5hYmxlX2h0bWwiOiJvZmYifX0=@