Into Pieces, le nouveau projet délicatement intime de Corentin Ollivier
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Auteur·ice : Hugo Payen
30/04/2021

Into Pieces, le nouveau projet délicatement intime de Corentin Ollivier

Dans la vie d’un musicien, il y a des albums qui s’imposent comme des évidences. Des disques imprévus, qui naissent soudainement, autant comme un aboutissement que comme un nouveau départ. Ce nouveau départ, c’est celui de Corentin Ollivier. Après s’être aventuré dans un univers plus électronique et introspectif sous son pseudonyme Faroe ou dans le monde de l’indé-pop avec son groupe The Dancers, c’est avec un véritable retour aux sources que Corentin Ollivier nous revient pour nous proposer un premier album acoustique des plus intimistes. Avec Into Pieces, Corentin Ollivier jongle avec ses émotions les plus personnelles, en compagnie de sa guitare comme seul exutoire.

Si le nom de Corentin Ollivier vous semble inconnu, vous le connaissez peut-être de par ses chapitres avec Faroe, The Dancers, Concrete Knives ; ou encore quand il a accompagné sur scène Lomepal ou Camélia Jordana. Mais aujourd’hui, c’est sous le nom de Corentin Ollivier qu’il a décidé de nous retrouver pour un nouveau projet qui a vu le jour il y a près d’un an et demi lors d’un séjour à La Réserve, en pleine résidence artistique.

 

Parti armé de sa seule guitare et sans projet particulier en tête, Corentin imagine déjà le premier album de Faroe, nom sous lequel il a déjà publié deux EP électroniques. Ce que Corentin ne savait pas, c’est que la vie et l’inspiration allaient en décider autrement. De cette résidence, deux titres voient le jour. Deux morceaux sans artifices, authentiques, où la voix chaude de l’artiste se mélange aux doux accords de sa guitare. Corentin revient à l’essentiel, il met à nu ses sentiments, couche sur papier ses émotions aussi brutes que délicates.

Ces deux chansons à la guitare acoustique étaient plus fortes que tout ce que j’avais chanté auparavant. Elles sont nées et sont sorties naturellement. Comme si elles avaient toujours été là. Je n’avais jamais osé les laisser sortir, par manque de courage ou de maturité. Je n’étais peut-être pas prêt.

Et comme un élément déclencheur, ces deux titres libèrent quelque chose de spécial chez Corentin. Sa vision artistique change et l’album de Faroe est rapidement mis de côté. Comme une révélation, Corentin reprend sa plume et la magie opère. Écrire est alors un véritable processus cathartique pour l’artiste qui vit la fin douloureuse d’une longue relation sentimentale. Et si habituellement, le temps guérit toutes les blessures, pour Corentin, écrire est indéniablement synonyme de guérison et de réconfort. Il passe alors la majeure partie de son temps accompagné de sa guitare, et les mélodies de Into Pieces naissent rapidement.

J’étais en pleine rupture quand a débuté l’écriture de ces chansons. J’ai fini par me séparer et ce disque a été un moyen d’analyser la fin d’une relation de plusieurs années. J’étais en pièces à ce moment-là et je cherchais à recoller les morceaux du puzzle pour comprendre pourquoi il avait volé en éclats.

Into Pieces voit le jour au fur et à mesure et prend la forme d’un dernier au revoir pour l’artiste, encore étourdi et ébranlé face à la fin douloureuse de son histoire d’amour. Corentin se nourrit ainsi de ces émotions qui le traversent depuis des semaines, il écrit, sans pudeur inutile, sans filtres. Il se demande alors comment deux personnes qui s’aiment peuvent arriver à un point où elles ne peuvent plus s’aimer, jusqu’à devoir se séparer. Into Pieces est alors traversé par ce thème bouleversant qu’est l’amour et ses complexités, mettant nos pauvres cœurs en émoi pendant près de quarante minutes.

Ce premier album sous son vrai nom reflète les véritables facettes musicales de l’artiste. De l’écriture honnête de Leonard Cohen, à la vulnérabilité de Joni Mitchell, Corentin ne recherche que deux choses : la simplicité et la profondeur. Un pari réussi quant à la pureté que nous propose l’artiste avec Into Pieces. Trouvant que l’on oublie trop souvent l’émotion au profit de la perfection, Corentin décide que cet album sera avant tout quelque chose de « brut ». Un choix qui lui permettra d’enregistrer Into Pieces seul, durant le confinement, avec un magnétophone quatre pistes acheté dans une brocante. L’artiste décide alors de s’éloigner des studios et tables de mixages le temps d’un instant, non pas par refus de modernité, mais bien pour être le plus en accord possible avec la forme de ses titres et ce qu’il veut nous y raconter.

J’ai privilégié la vérité de l’émotion. Et tant pis s’il reste des imperfections.

Un album tout simplement beau, qui s’ouvre avec des titres forts comme I Shot An Arrow ou Wilderness Inside, sur fond de boîte à rythmes simple mais efficace. Par la suite, Heal nous ouvre les portes d’un univers pur nous rappelant les grands espaces américains, avant d’enchaîner avec Everything You Thought Would Last. Corentin se livre et se dévoile titre après titre, nous immergeant dans cet étrange mélange d’émotions, entre lucidité et impuissance. Pendant ces premiers titres, l’artiste cherche à comprendre les raisons de cette situation désastreuse, sans forcément trouver les réponses qu’il attend.

 

Quand enfin arrive Exhale en guise de point d’orgue de l’album. Au final, Corentin réalise qu’en amour, il ne suffit pas toujours de chercher toutes les réponses. Corentin respire enfin, et prend du recul sur sa quête personnelle qui était de recoller les morceaux de ce puzzle ayant volé en éclats. Par la suite, on découvre alors Forever, une ballade à la guitare où honnêteté et résilience s’entremêlent avec maîtrise. Un titre élégant dans lequel Corentin prend conscience de l’éphémérité que peut avoir l’amour, tout en acceptant la finalité des choses.

I climbed a mountain

Just to place you at the top

Thought I knew who you were then

Maybe I knew who you were not

I thought I would love you forever

Cette introspection continue ensuite sans difficulté avec An Ear And A Shoulder et The Tide, deux titres dans la lignée des précédents où la quête du pourquoi a laissé sa place au questionnement plus général, à savoir, ce qui aurait pu être fait pour éviter toute la situation actuelle. Into Pieces arrive alors à son terme, et ce sous les derniers accords de Corentin en guise de clap de fin sur Foverer After.

Avec Into Pieces, Corentin Ollivier s’est laissé emporter par la simplicité des choses malgré la complexité de la situation amoureuse qu’il a vécue. Abordant le less is more avec brio, c’est un véritable bijou que nous propose Corentin pour sa première expérience sous son vrai nom. Les arrangements électroniques et la pop de ses débuts laissent place à l’honnêteté et l’intime. Corentin Ollivier cherchait à comprendre, il cherchait à se libérer d’un poids dont il n’avait pas forcément connaissance. Mais ce que Corentin a compris grâce à sa sublime plume, c’est qu’au fond, certaines questions ne méritent pas forcément de réponses.

Into Pieces est un album qui parle d’amour, de ses bons moments comme de ses mauvais côtés. Un album épuré, où les artifices électroniques des débuts ont laissé place à la sensibilité de l’artiste sous sa forme la plus pure et la plus touchante. Au travers de ces dix titres, Corentin Ollivier a voulu nous raconter une histoire d’amour, son histoire. Et si chaque histoire d’amour est différente par nature, Into Pieces arrive pourtant à réveiller nos émotions et ce, de la plus belle des manières.


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