La musique de Jadu Heart ? Une histoire qu’il faut raconter à qui veut l’entendre, à la façon d’une légende païenne que nous retiendrons, et ce pour longtemps. Le groupe s’était démarqué en 2019 avec son album Melt Away qui intriguait énormément, nous laissant un goût de trop peu, même. On avait d’ailleurs eu la chance de voir Dina et Faro le 26 février sur la scène de l’AB Club pour un concert sombre et intense. De retour plus créatifs que jamais, les Anglais•es nous attirent tels un aimant et nous touchent en plein cœur avec un projet aussi envoûtant que romantique : Hyper Romance.
Jadu Heart a toujours eu un rapport à la sombre spiritualité. Le duo en jouait dans ses clips en s’inspirant de mythes païens, dans ses visuels aux dessins presque satanistes et son utilisation de la typographie gothique, sans oublier les masques. Tout est façonné dans un monde où l’amour est si beau qu’il ensorcèle. Ici l’influence folk se voit plus présente que dans leur dernier album, une influence discrète qui s’offre une couche électro, par opposition à l’acoustique – tantôt comme élément principal du titre, tantôt aérant les morceaux. Nous avions déjà pu découvrir les titres Another Life, Dead Again, Suddenly I Know Who You Are, Walk The Line, Caroline et Burning Hour. Les trois premiers faisaient la transition avec le dernier album, avec des guitares saturées et une intensité dosée qui se rejoignaient pour piquer notre curiosité. Walk The Line, Caroline et Burning Hour venaient alors nous apporter la douceur qu’on mérite, ou plutôt, nous donner envie de la mériter.
Une sensation assez spéciale émane de cet album. La bienveillance incarnée se mêle à l’amour damné de la façon la plus vraie possible. Un mélange sordide qui se définit par un esprit presque gothique et nous emmène vers la plus belle des malédictions. Woman se voit attribué le rôle de titre porteur de l’album, avec un clip simple et efficace qui reprend une performance de Danni Spencer. “Fell in love with the devil. She got snakes in her hair. She could take all she wanted. And leave I won’t really care”. Des lyrics qui ne résument que trop bien le projet, une production dreamy, à mi-chemin entre instru acoustique et sombre électro. Day By Day arrive alors comme une tendre caresse inattendue qui illustre la lumière dans l’obscurité. Ce titre nous apporte sur un plateau le prochain morceau, Metal Violets, et sa ligne de basse qui se démarque de l’omniprésence de la guitare dont on a l’habitude.
Le plus surprenant arrive seulement dans l’avant-dernier titre de cet opus, avec la chanson éponyme Hyper Romance. C’est le calme. On discerne quelques chuchotements, au milieu d’une production timidement électro qui tend vers l’ambient. L’hyper romance prend alors tout son sens, avant de nous laisser avec ses pleurs discrets et son beat insistant. C’est déjà la fin : Pink & Blue se charge de nous conquérir aux moyens des deux voix de Dina et Faro, qui s’harmonisent avec beaucoup de délicatesse. Envoûtant et mélancolique comme toujours. Pleine d’esprit et de contraste, c’est la musique qui parle à nos oreilles contemporaines. C’est le rose et le bleu, le mélange qui produit le mauve – entre autres, couleur du vinyle de l’album.
Alors, la musique de Jadu Heart, c’est très simple : ça coule de source. On s’y immerge très rapidement. À la source de ce fleuve romantique, on retrouve tout ce qu’il y a de plus naturel : de la pierre et de l’eau. C’est brut. C’est beau. C’est beau parce que c’est brut, même. Une musique conceptuelle pour laquelle il n’est pas question d’enjoliver les choses, et qui n’est comparable qu’à peu d’autres. Point de nunucherie, les Londoniens•iennes nous servent ce qu’ils ressentent dans son état le plus pur, le plus cru. L’amour dans son plus simple appareil, dénudé de toute fioriture pour n’en garder que l’essentiel : l’intensité et la douceur. C’est ça, l’Hyper Romance.
Mes articles sont plus longs qu’un solo de jazz.