Il était une fois dans un pays pas si lointain appelé Paris, la jeune Juliette Armanet, chevaleresse en armure des sentiments purs. Star de son royaume, la jeune femme décida de partir à la conquête des autres contrées francophones avec son premier album Petite Amie. Toujours accompagnée de son fidèle piano, derrière lequel elle vit comme elle se cache, Juliette Armanet vient redonner ses lettres de noblesses à un genre musical souvent galvaudé: la variété.
Petite Amie est un disque hors du temps, beau et sensible dont l’écoute s’avère finalement assez indispensable.
A une époque où les gens adorent se montrer mais sans forcément se dévoiler, où la stratégie de la fausse pudeur mais sans vraie vérité est légion, Juliette Armanet détonne. De par la sincérité et la beauté de ses textes, travaillés à l’extrême et parfaits comme une pièce de joaillerie; de par cette façon de ne pas se cacher et de se montrer telle qu’elle est à travers eux, elle apporte un véritable vent de fraicheur dans la musique actuelle parfois trop superficielle et qui finit toujours par sonner faux en voulant prêcher le vrai. Tiraillée entre cette innocence naïve et pure et un pragmatisme froid dû à sa propre expérience, la Parisienne décortique en 12 chansons le sentiment amoureux, dans ce qu’il a de tantôt flamboyant, tantôt triste, parfois partagé, parfois solitaire, mais toujours intense et vivant. Le titre de l’album ne doit d’ailleurs rien au hasard, la petite amie étant un vecteur de fantasme et d’imagerie romantique et cinématographique absolument infini.
Plus qu’un album solo, plus qu’un exercice de style pour une voix unique et sublime, c’est un véritable duo qui se développe ici : celui d’une histoire d’amour entre une femme et son piano, qui l’accompagne sur toutes ses chansons. Il est de chaque rime, de chaque son, de chaque sensation, telle une ombre chaleureuse qui plane sur cet album magnifique. En ce sens, dans cette relation entre une personne et son instrument, on peut facilement rapprocher Juliette Armanet d’artistes comme Sebastien Tellier ou William Sheller.
Mais le grand talent de Juliette Armanet réside surtout dans le fait de ne pas se contenter de ce qu’elle sait faire, et faire bien. Héritière assumée de Véronique Sanson, elle aurait pu se contenter d’un album piano-voix grâce à des chansons sublimes et au pouvoir émotionnel intense telles que L’amour en Solitaire ou Alexandre qui auraient surement fait parler les magazines spécialisés mais n’auraient pas existé au delà de ce microcosme. La jeune femme a décidé de s’ouvrir et de prendre des risques. De la disco dans L’indien, à la langueur de A La Folie, en passant par les accents arabisants de Cavalier Seule pour finir sur la très « France Gall et Michel Berger » Star Triste, Armanet développe les genres et les couleurs d’une variété française aux multiples facettes, elle choisit de ne pas choisir, de développer tous les fantasmes musicaux qui vivent dans son esprit et de nous offrir un véritable kaléidoscope de ce que la variété française peut proposer de mieux.
Avec Petite Amie, Juliette Armanet a décidé de faire du bien à la musique française, d’utiliser les codes déjà balisés avec humour et amour, pour produire une musique tendre, mélancolique et mélodieuse qui lui ressemble. Portée par des textes sublimes et des ambiances musicales riches et diverses, il semble très difficile de ne pas tomber sous le charme de cette parfaite petite amie.
Futur maître du monde en formation.
En attendant, chevalier servant de la pop francophone.
