Keaton Henson annonce enfin son prochain album à faire pleurer nos coeurs
"
Auteur·ice : Flavio Sillitti
24/08/2020

Keaton Henson annonce enfin son prochain album à faire pleurer nos coeurs

La musique est un purgatoire sentimental. Et si cette affirmation n’est plus vraiment à démontrer, certain·es artistes s’appliquent à nous le rappeler par des œuvres percutantes et touchantes. Keaton Henson en fait partie. Après nous avoir délivré une ribambelle d’albums et d’EPs frissonnants, exploitant un songwriting hors pair sur Dear, Birthdays ou plus récemment sur Kindly Now ainsi qu’une verve compositrice avec les recueils instrumentaux Romantic Works et Six Lethargies, la mélancolie fragile et profonde du Britannique sera de retour fin octobre dans nos oreilles. Ça s’appelle Monument, trois morceaux sont déjà disponibles et, à les entendre, ça promet de laisser des traces sur nos cœurs.

 

Après s’être aventuré sur les terres houleuses de l’amour et des relations sentimentales qui l’auront marqué au fer rouge sur ses premiers projets, Henson s’est consacré à un processus de plus en plus introspectif et personnel au fil du temps, avant de s’éclipser en 2017 sur Epilogue, un au revoir explicite et fatal, une morceau d’adieu déchirant et touchant qui marquait forcément la fin de quelque chose. S’ensuivit un album lourd mais magistral, exclusivement instrumental, baptisé Six Lethargies et qui confrontait l’artiste à la maladie mentale. Depuis, plus rien. Et alors qu’on imaginait la carrière du chanteur écourtée, Keaton avait laissé un indice, une trace cachée indiquant un potentiel retour : la phrase Emit emos eb yam dna edistuo gniog tsuj m’I” glissée à la fin d’EpilogueRetournez ce mystérieux charabia et vous obtenez “I’m just going outside and may be some time” (“Je sors juste dehors et peut-être qu’un jour”), les derniers mots du célèbre expéditeur Lawrence Oates qui, pour sauver son équipe lors de l’expédition Terra Nova dans l’Antarctique en 1912, décida de se sacrifier en s’éclipsant dans le blizzard polaire après avoir énoncé ces quelques mots. Une phrase interrompue, comme la carrière de l’artiste, mais qui s’ouvre à un retour. Ici, on peut plutôt parler de renaissance.

C’est avec Career Day, en mai dernier, que le chanteur refait surface. Sur des riffs de guitare délicats, la voix tremblante et voilée du Londonien vient personnifier le temps et chanter sa fragilité, sa fugacité, pour nous confronter au thème majeur de l’opus : la mort, le côté éphémère des instants qui nous traversent. En s’inspirant de son père, ancien acteur luttant contre le cancer depuis plusieurs décennies et décédé en décembre dernier, il questionne ainsi le temps qui passe et celui qui s’arrête, dans un premier single qui signait le retour d’une des plumes les plus larmoyantes du paysage musical actuel.

Mais alors que ce premier titre laisse présager un album morose et difficile, plus douloureux que thérapeutique, on s’aperçoit assez rapidement avec Ontariosecond extrait partagé en juin, que Henson a su trouver une part de lumière dans son approche complexe des thèmes mortuaires. Ode à la ville canadienne, mais pas que, le morceau se dresse ainsi comme la célébration du nouveau Keaton Henson. Symboliquement, le visuel en VHS nous emmène dans les décors ontariens à bord d’un véhicule en mouvement, faisant le lien avec le clip glaçant d’Epilogue qui laissait Keaton à l’arrière d’une voiture, le regard fuyard à travers sa fenêtre. Le temps d’un morceau, il chante ainsi le bonheur de pouvoir se sentir vivre à nouveau, poétisant les terres enneigées de ce petit coin de paradis froid.

Vient alors Prayer, annoncé comme le noyau vulnérable de l’album. Un titre crève-cœur (forcément) et qui aborde le deuil en deux parties distinctes : la préparation et la résilience. La première partie passe ainsi par les lignes imparables de Henson : “I know it’s ending, but I’m on the mend” reflétant le processus de préparation mentale alors que la seconde moitié s’axe autour d’une pièce orchestrale puissante et intense, symbolisant l’acceptation, l’au revoir indicible et déchirant que Keaton aurait voulu offrir à son paternel. Réalisé par Geej Ower, le visuel de Prayer projette des archives VHS de l’artiste et de son père sur les murs d’une maison déserte, représentant l’absence corrosive de l’être cher mais également la chaleur embaumante des souvenirs indélébiles. Souffle alors un vent de nostalgie mélancolique conclu par le “Keaton, wave to daddy” si plein de sens en fin de morceau, qui achève à tous les coups.

Attendu pour le 23 octobre prochain, Monument s’annonce être un condensé simple et authentique de sentiments étriqués face à la mort – mais à la vie aussi.  Le rendez-vous sera assurément bouleversant.