Keep Dancing Inc, débordants d'amour

Keep Dancing Inc a su bien s’entourer depuis la sortie de son premier EP Cold Zouk Summer Hits en 2015 : en studio, sur scène ou dans le public, Joseph, Louis et Charles semblent pouvoir s’appuyer sur des soutiens indéfectibles et sur une vibe incroyablement positive. Pour toutes ces raisons, on avait hâte de voir évoluer le trio sur la scène du Pop-Up du Label pour leur release party et on n’a pas été déçu. On vous raconte.

Il faut s’imaginer la manière dont nous nous sommes rendus à la joyeuse fête promise par Keep Dancing Inc au Pop-Up du Label pour la sortie de leur superbe nouvel EP, Initial Public Offering : mains enfoncées dans les poches d’une veste à motifs, casquette vissée sur la tête et écouteurs bien visibles. Dans les oreilles, par hasard, l’étrange ritournelle de Sébastien Tellier, L’amour et la violence, laisse traîner ses accords pleins de spleen. Presqu’un pressentiment, finalement, car les deux humeurs contraires y étaient mêlées, bien que dans le désordre.

La violence, d’abord, Superlife et Cyclisme s’en sont chargés. Sur les coups de 20h45, Fernando Dias Marques débarque sur la scène du Pop-Up en peignoir rayé rouge et noir, chaussettes hautes, tasse dans une main et micro dans l’autre, engloutissant l’espace par sa présence. À ses côtés, son acolyte, Thomas Gachod, col roulé, lunettes rondes et favoris bien dessinés, débite les gros beats et les nappes de synthé loufoques, tout en reprenant les choeurs d’une voix robotique. L’ensemble est absolument survolté et rappelle volontiers, dans une esthétique post-punk minimaliste, les performances de The Garden ou Alex Cameron, notamment sur Rats. Le duo méprise délicieusement les inventions dont on se serait bien passé sur Hoverboards et envoie des rythmes qui passent du punk à la techno à une audience qui en redemande. Alors que le groupe s’achemine vers la fin de son concert, Fernando s’interrompt : « c’est notre dernier morceau en tant que Superlife. Maintenant, on devient Cyclisme« .

Il ne plaisante pas : les deux compères se précipitent, enfilent des combinaisons dépareillées et le chanteur empoigne un petit vélo sur lequel il terminera sa prestation, devant un public qui jubile, un peu maso, malgré la claque qu’il vient de recevoir. La violence et l’amour.

L’amour, ensuite. Alors qu’on les apercevait dans la salle, Louis, Charles et Joseph montent sur scène peu avant 22h, dans un halo de lumière bleutée. Un grand sourire aux lèvres, Charles annonce : « vous êtes 160, ça veut dire que tout le monde est là ! ».

Le set de Keep Dancing Inc est lancé par une longue intro en guise de préliminaires entre le groupe et son public, qui hurle lorsque tombe le drop. Du manche de la guitare de Louis glissent de belles fioritures caractéristiques des morceaux du groupe tandis que derrière ses machines, Joseph s’attèle à donner son liant au tout. Le groupe a le loisir d’éprouver la fidélité de son audience, qui reprend immédiatement les harmonies des morceaux pop tirés de son nouvel EP, Fix Me Now et Rhum & Ginger Magic. Quand Charles dédie Life Goes On à la mémoire d’un ami, le public lui répond d’un vibrant « je t’aime ». L’émotion est palpable sur le titre Interested ?, lorsque les fans de Keep Dancing Inc joignent leur voix au falsetto de Charles : « vous êtes très forts là-dessus », sourit-il. Le trio revient parfois à ses premiers émois avec des anciens morceaux comme Back Against Yours ou le remuant No Advice, dont la cadence zouk trouve aussitôt son écho dans la foule.

Dans la fumée, les têtes dodelinent toutes d’un même mouvement alors que le groupe est rejoint par Manon, qui agrémente un tout nouveau titre, What’s the point, d’un solo de saxophone au charme joliment désuet et de Gaby, qui se faufile derrière une batterie électronique le temps de quelques morceaux. Sur le plateau du Pop-Up comme du côté du public, l’ambiance est planante et connaitra son apogée dans les versions très rock de How Should We Feel ? et Bad Born, à l’issue desquelles Charles et Louis entament un langoureux jam face à face, dans la fosse. Sous les lumières épileptiques, les premiers rangs s’adonnent à des pogos euphoriques. A cette fin de concert excitée succède un moment plus apaisé lorsque Louis entonne une surprenante reprise de Johnny Halliday, L’idole des jeunes.

Alors que le guitariste fredonne les derniers mots de la chanson, « combien je suis tout seul », il suffit de balayer la salle d’un regard pour le détromper. Aussi bien entourés sur scène que dans la fosse, débordé par l’amour donné par un public qui connaissait par cœur les morceaux d’un EP qui vient tout juste de sortir, Keep Dancing Inc a conquis une audience tantôt secouée par l’allégresse des morceaux, tantôt cajolée par la tendresse des mélodies. L’amour et la violence.