Sulfureuse, vaporeuse ou ensorcelante, décrivez-la comme bon vous semble mais ne laissez pas cette bouille angélique vous tromper : la musique de cette Kwamie Liv est tout sauf sage. Si l’univers de Lana Del Rey commence à vous manquer, trouvez le réconfort dans le premier album de cette jeune Dano-Zambienne, qui vient nous raconter les nocturnes de ses ébats sentimentaux. À la fois familières et surprenantes, c’est aux travers des douze titres de Lovers That Come and Go que les sonorités envoûtantes s’entremêlent et offrent une explosion de tons et d’univers variés rythmant le premier jet de cette artiste aux multiples talents.
Déjà remarquée pour son EP Lost In The Girl paru en 2014 et qui regorgeait déjà de quelques joyaux tels que le sombre 5 AM ou encore le tonique Comin Thru, elle sortait début novembre son premier long-format attendu de pied ferme par les mordus de R’n’B expérimental (et oui, c’est possible). Première rencontre avec le grain si particulier de cette artisane du rythme qui ne correspond à aucun style en particulier mais plutôt à des ambiances, des moments. Si un titre vacille du côté de l’électronique, le prochain vous surprendra aussitôt avec sa soul moelleuse. Des nuances assumées qui prouvent la versatilité et la créativité de cette pépite made in Danemark qui s’apprête à faire du bruit mais surtout de la musique.
À l’heure où les réseaux sociaux des artistes à la cote nous permettent de fouiner dans leurs vies personnelles autant qu’on le souhaite, la chanteuse se la joue plutôt low-key. Ses émotions et ses états d’âmes, n’espérez pas les retrouver sur sa page Instagram, le privé c’est privé et c’est mieux ainsi. Une certaine pudeur virtuelle qui justifie ainsi la profusion de mots doux et langoureux sur ses morceaux. Utiliser sa musique comme un purgatoire, comme une urgence sentimentale : c’est un peu l’esprit ici. Du coup, ça pardonne un peu le côté “fleur bleue” qui pourrait vite lasser. Le fait est que la force de Kwamie Liv ne réside pas dans ses paroles, même si certaines lignes font sourire ou frémir. Sa force, c’est l’esthétique de sa musique, sa forme et sa couleur. Artiste dessinatrice à ses heures perdues, sa musique est structurée comme les cases des somptueuses bandes-dessinées qu’elle crée : avec logique et cohérence. Tout a sa place. L’album est organisé de façon à ce que les voyages entre les différentes facettes de l’univers musical de la belle brune cadencent la lecture de l’histoire intemporelle d’une femme passionnellement amoureuse.
Chill assuré avec le nonchalant Blasé, balade coeur d’artichaut avec Look What I’ve Done, piano-voix arrache-coeur sur Higher, beats électroniques avec Follow My Heart, riffs à la Clara Luciani avec New Boo et même quelques vibes d’Aya Nakamura sur Mama’s A Millionaire, détestez en certains et adorez les autres mais laissez vous emporter par le caractère disparate des premiers pas de Kwamie Liv dans la cour des grands.
Caméléon musical aux allures de mafieux sicilien.