(Le lendemain de l’écriture de cette chronique, on apprend via un communiqué Facebook, que le chanteur et guitariste (Gabriel) quitte Wall of Death. Les prochaines dates sont donc annulées et ce concert fut le dernier concert du groupe 1.0. Me voilà triste, ce trio portait à ravir l’étendard du rock devenu psychédélique grâce à leur talent. Merde !)
Mardi 25 mars j’avais rendez-vous au Marché Gare pour passer la soirée en compagnie du trio Wall of Death. Après un premier album, Main Obsession, profondément noir obscur où leur rock virevolte de propositions, les Frenchies viennent de sortir un deuxième album, Loveland, plus lumineux, plus psychédélique. Preuve de leur évolution, le groupe a enregistré cet opus en Californie en compagnie d’Hanni el Khatib (s’il vous plaît!) qui les a signés sur son label Innovation Leisure.
Les locaux de Satellite Jockey ouvrent le bal. Le groupe est composé de six membres et d’une foultitude d’instruments. Ici une guitare électrique, juste à côté une guitare acoustique, sur la droite un trompettiste/guitariste/percussionniste, à gauche un synthé, encore plus à gauche la basse, cachée derrière la batterie. Une multiplicité d’instruments pour un concert en deux parties. Dans un premier temps, Satellite Jockey nous livrera une dreampop douce, vacillante et trop tendre pour mes oreilles. Le chanteur a la dégaine d’un Ellis Ludwig-Leone (San Fermin) qu’on aurait mélangé avec Will Toledo (Car Seat Headrest), les pieds nus en plus.
Le guitariste de droite sort du lot par son assurance et sa musicalité. Quelques fausses notes se font entendre au chant par-ci et par là, la chanteuse tousse beaucoup entre les chansons, ceci explique cela. Le set débute réellement lorsque le violon fait son irruption dans les morceaux. Celui-ci enflamme les derniers titres et réveillent ses acolytes du soir. Satellite Jockey livre une deuxième partie de concert plus plaisante. On découvre des passages shoegaze teintés parfois de sonorités alternatives. La basse sera maltraitée à l’aide de l’archer du violon, le synthé résonnera sous son meilleur jour et les chants finiront par trouver leurs rythmes. Ainsi, malgré une première moitié difficile en leur compagnie, le groupe aura su nous montrer de quoi il était réellement capable sur la fin de sa performance.
Adam Ghoubali (batteur), Gabriel Matringe (guitariste) et Brice Borredon (pianiste au mellotron et vêtu d’un t-shirt Allah-Las) prennent place dans un Marché Gare aux trois quarts plein. Les trois membres sont très espacés, un énorme triangle de vide se forme (Illuminati spotted) entre eux. Le vide, on ne le connaîtra pas ce soir. La prestation sera noble, envoûtante et aérienne.
Et comment ne pas commencer ce concert avec Loveland. Le premier morceau du nouvel album est choisi pour entamer le voyage en leur compagnie. Loveland montre un Wall of Death plus lumineux, plus calme, plus éblouissant, plus psychédélique aussi. For a Lover prendra doucement la suite. Le groupe rentre tranquillement dans sa prestation du soir. Le son est au point, les claviers commencent à résonner, tout s’annonce excitant.
Sur l’album, For a Lover est le morceau suivant Loveland … cette présentation confirme que Loveland est un album qui se veut être écouté dans sa totalité. Une sorte d’escapade solitaire en leur compagnie accompagnée d’envolées plus célestes les unes que les autres.
Encore une fois, les trois prochains titres se suivent lors de l’écoute de Loveland. D’abord le titre plus rock Dreamland qui emmènera le public encore un peu plus loin et lancera le concert. L’intensité se fait plus forte. All Mighty prendra dignement la suite, les frissons m’envahissent à l’écoute de ce crescendo appuyé par les chœurs criés de Brice et terminé par un solo psychédéliquement ravageur.
Ce concert ne me laissera pas indifférent. Coup au cœur du soir sur Little Joe, après l’excitation et l’énergie des morceaux précédants place à l’émotion. Le morceau est présenté comme un film, rempli de péripéties et de dialogues qui te transportent.
Le live continue avec Mother Tongue qui, bien que présent sur le deuxième album, sera l’un des morceaux les plus rocks de la soirée. La version live est ici peaufinée, agrémentée d’aigus séducteurs à l’unisson.
Deux morceaux du premier opus suivront, Thunder Sky et Away et j’accroche un peu moins. Le voyage s’arrête le temps de quelques instants face à ces deux titres moins accrocheurs en live malgré la sérénité rassurante et ensorcelante qui se dégage de nos acolytes.
S’en suit une reprise qui mettra tout le public d’accord, c’est au monument The Doors que le trio s’attaque ce soir avec Light My Fire. 50 ans plus tard, le morceau est emmené dans un univers psychédélique assurément doux qui sied au morceau. Le public répond présent. Des sourires, des corps qui se dandinent, des bras levés. A ne pas en douter, ce titre est une pièce importante et incroyable de ce set.
Le groupe s’en ira après avoir interprété Blow The Clouds et Marble Blues. Deux titres sur deux albums différents mais qui se rejoignent parfaitement en live. Les huit minutes du premier nous emmène çà et là, me transportent, me baladent au gré de ce solo de guitare électrique qui résonne encore en écho dans ma tête. Le deuxième titre tire le blues vers des harmonies presque country toujours plus fort en intensité, en propositions.
Quoi ? Ils partent sans avoir jouer Memory ? Morceau de 10 minutes, véritable destination finale de Loveland ? Impossible. C’est parti pour 10 minutes religieusement cathartiques et libératrices. J’avais beaucoup d’attentes face à ce morceau qui pour moi est l’un des meilleurs titres proposés en 2016. Aucune déception. Les morceaux d’avant ont fait leur boulot et m’ont emmené dans des conditions optimales pour être présentés face à ces envolées magistrales et purificatrices. C’est beau, plein de talent. J’en redemande.
Wall of Death a présenté ce soir-là un set complet bourré de sérénité. Le spectateur est pris dans la torpeur délicieuse du voyage proposé. Un trip aux allures psychédéliques composé d’invitations au lâcher-prise et à l’introspection. Le tout, facilité par des solos guitaristiques et pianistiques percutants. Le trio est une pièce nécessaire dans le paysage musical français actuel.
Epicurien musical des temps modernes, la découverte comme leitmotiv. Adule Matt Shultz, l’alternatif, Darwin et le rock qui dépote.