| Photo : Humbert Deschamps
Il est bien rare de voir une telle bête en francophonie : L’Étrange Histoire de Mr. Anderson, signé du visionnaire Laylow et sorti il y a plus d’un mois, revêt tous les codes d’un album concept bien ficelé. Autant dans son propos que dans son exécution, le disque jouit d’une richesse indispensable dans l’exécution d’un tel exercice, à savoir la cohérence, la narration et l’univers. Et alors que la version audio du projet nous offrait une captivante expérience de récit-fiction auditif, il nous tardait de voir les morceaux prendre vie en images. C’est Spécial, que l’artiste toulousain partageait avec Nekfeu et l’Américaine Fousheé, qui ouvre le bal, sous la caméra inventive de Osman Mercan.
Déjà aux commandes du court-métrage accompagnant la sortie du projet, le réalisateur Osman Mercan, fidèle collaborateur depuis l’ère Mercy du rappeur, signe ici un visuel cinématographique en tout point. Notamment pour ses références multiples, autant au cinéma d’un M. Night Shalayman que du controversé Zack Snyder, duquel on ne peut s’empêcher de penser au somptueux Sucker Punch. Un film qui traitait, lui aussi, de la santé mentale, tourné dans les décors lugubres et inquiétants d’un asile psychiatrique. On retrouve ce même univers dans le clip de Spécial qui vient sublimer l’hors norme et l’altérité dans des tableaux à la fois fantastiques, dérangés et poétiques. Mention spéciale également au directeur de la photographie Adrien Lallau qui livre ici un véritable travail d’orfèvre.
Gros coup de cœur de l’opus pour son atmosphère à la fois planante sur les refrains et plus soutenue sur les couplets, Spécial se distinguait également par son line-up cinq étoiles : à droite, le maître Nekfeu, discret depuis l’expansion de son projet Les Étoiles Vagabondes et, à gauche, la nouvelle pépite alt-r’n’b Fousheé qui secoue l’autre côté de l’Atlantique depuis son tube viral deep end. C’est donc avec joie que l’on retrouve les deux artistes dans les séquences de ce visuel, toustes deux embarqué·es dans des sales histoires, l’une assénant un coup fatal à un partenaire à la main lourde tandis que l’autre se voit camisolé en compagnie de Laylow, direction l’hôpital Anderson. Un nom qui fait référence au personnage central de Mr. Anderson, alter ego complexe et étriqué de Laylow auquel le projet rend hommage.
Pour les plus attentif·ves, on relève également la présence de Doums, figure incontournable du rap francophone et membre tutélaire de L’Entourage, qui s’offre un caméo cagoulé discret mais réjouissant. Autre invité de marque : le regretté Népal, qui se voit honoré par ses frères d’armes à travers une référence subtile, à savoir le 444 inscrit côté cœur sur l’habit pénitentiaire de Nekfeu, clin d’œil à son album 444 Nuits paru en 2016.
Caméléon musical aux allures de mafieux sicilien.
