Le manuel de jardinage de Feng Suave pour nous sauver de la fin du monde
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Auteur·ice : Giulia Simonetti
01/09/2021

Le manuel de jardinage de Feng Suave pour nous sauver de la fin du monde

Non ce n’est pas une blague, notre planète et notre société vont mal, et nous le savons. So much for Gardening, le nouvel EP du duo hollandais, dépeint avec douceur ce monde qui pourrit lentement, mais sûrement. Derrière leur humour décalé teinté d’émotions, Daniel De Jong et Daniel Leonard Elvis nous emmènent dans les années 60 et nous questionnent sur des sujets actuels. Bref, il ne faut pas oublier d’écouter, en faisant du jardinage, ce court chef-d’œuvre aux tonalités « joyeusement » mélancoliques.

So much for Gardening est un voyage dans le temps composé de quatre titres qui renvoient à quatre questionnements. On reconnaît leur patte musicale qui oscille entre l’indie, la pop alternative, la soul, mais aussi leur esthétique toujours aussi soignée. Cette fois la pochette du projet a été réalisée par le talentueux Armando De Cosmos qui a réussi à transmettre la fraîcheur et la sensibilité du projet. C’est aux côtés de Jasper Geluk, leur ingénieur du son, que les deux artistes ont décidé d’enregistrer pour la première fois de manière analogique, en laissant donc le côté émotionnel et spontané prévaloir sur le côté technique. Unweaving the Rainbow Forever ouvre le projet tout en délicatesse. La mélodie rappelle les fêtes de fin de film à happy end au moment du générique. Mais cette douceur ludique n’est pas si innocente que ça. Bien au contraire, elle dépeint le monde dans lequel nous vivons et que nous ne respectons plus.

“Pulling on the threads of heaven

We’re unweaving the rainbow forever

And ever “

 

Le voyage introspectif de Daniel et Daniel continue avec Come Gather ‘Round, qui les amène à parler de manière cynique et ironique de la société capitaliste dans laquelle nous vivons. Ils arrivent à souligner, toujours avec légèreté, qu’en continuant de la sorte on pourrait assister à la fin de notre civilisation. Ce qui est frappant, c’est l’oxymore présent tout au long du morceau : la juxtaposition de textes simples aux images « second degré ».

I heard the Dow Jones ended double positve
Today they’re back for more
Me and my shares are on a bubble up
And we’re never coming down
An unbelievably booming economy, now!

La nouveauté de cet EP c’est Show me, le seul titre qui n’était pas encore sorti. Ce troisième morceau est la perle du projet, à la fois personnel et très émotif. C’est ici que les influences des Beatles sont plus palpables que dans les autres morceaux. Un refrain qui donne envie de danser et d’oublier le temps présent. On se retrouve presque suspendu·es, la tête à l’envers, dans chagrin émotionnel profond. Un arrière-goût de saudade persiste, car oui, comme on le sait, le duo arrive à saisir l’essence même de la mélancolie. Le cœur gros, le voyage avec Feng Suave s’achève sur Tomb For Rockets qui arrive à bien résumer la polyvalence de ce groupe qui traite de sujets très humains. Une chanson d’amour avec un tel titre montre véritablement que Daniel et Daniel sont des paradoxes vivants. En effet, c’est une chanson d’amour à la Feng Suave où poésie, surréalisme et décalage sont les ingrédients magiques.

Quatre titres, quatre histoires pas si différentes que cela, toutes les quatre humaines et vivantes. On les vit en même temps que les deux artistes, c’est ce qui rend leur musique si belle et si pure.


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