Le premier album de Part Company est le disque le plus sous-estimé de 2017
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Auteur·ice : Adrien Amiot
24/12/2017

Le premier album de Part Company est le disque le plus sous-estimé de 2017

2017 s’éteignant doucement, c’est l’heure des conclusions. Cette année fut indéniablement riche : l’Histoire retiendra ainsi le superbe Melodrama, le dernier Tyler the Creator et comme chaque année – ou presque – le nouveau carton de Kendrick Lamar. Impossible pourtant de clôturer ce beau millésime sans évoquer un disque ovni qui mérite définitivement toute notre attention. Premier LP de l’hyper talentueux duo Part Company, Seasons est sorti le 3 mars 2017 sur le label parisien GUM, maison historique de Woodkid et The Shoes. En dépit d’une critique élogieuse, le disque peine à trouver son public et n’a assurément pas eu le retentissement qu’il mérite : il est grand temps de rendre justice au disque le plus sous-estimé de 2017.

Yoël est américain, Damien est français d’Australie. Amis d’enfance puis colocataires à Nice, ils sortent leurs premiers morceaux sur MySpace sous le nom de Part Company, hommage à la ballade culte des Australiens The Go-Betweens. En 2015 est publié leur premier EP, Babar, dont la chanson titre est un joli succès. Puis en 2016 leur deuxième, Manfred. L’un part vivre à Bogota, l’autre s’installe à Londres ; ils continuent de cette manière à faire vivre leur projet, séparés par l’Atlantique. Mars 2017 donc, Part Company sort enfin son premier long format. Album à la fois complexe et d’une fluidité hypnotisante, le duo livre avec Seasons un panorama passionnant du psychédélisme made in 2017.

Dès la première écoute, on remarque la maîtrise pointue des codes de la psyché-pop anglo-saxonne et l’intériorisation de ses figures clés. Seasons est ainsi ultra-référencé et n’hésite pas à citer explicitement ses inspirations : le sublime Ayers est écrit en hommage au génie précurseur Kevin Ayers et l’étincelant Manfred au sculpteur hispanique Manfred Gnadinger. Malgré le foisonnement de références – explicites ou implicites – que leur musique évoque, le duo évite habilement le piège de l’album-musée, qui aurait instantanément anéanti la spontanéité de leur démarche. Comment citer sans alourdir ? En faisant appel à Luke Smith, bien évidemment. Artisan du son sonique de Foals sur Total Life Forever, le très respecté producteur anglais propulse le duo dans une autre dimension : un son en perpétuel mouvement, aux détails aussi subtiles qu’abondants. Du groove disco de My Gurl à Don’t Dance, habité par Vampire Weekend, Seasons puise son inspiration aux meilleures sources et invente un son qui lui est propre.

Une track se hisse au-dessus de la mêlée, parvenant tranquillement à synthétiser le meilleur de la  scène indépendante des trente dernières années. Véritable feu d’artifice psychédélique, Vartan oscille entre shoegaze supersonique et folk cuivrée. Merveilleusement clippée par Ramón Ayala, déjà responsable de la plus belle vidéo de Clara Luciani, Part Company signe ici une des pépites les plus excitantes de l’année.

On admire au passage la pochette délicieusement kitch signée Mazaccio & Drowilal – le format vinyle est plus qu’appréciable -, dans la lignée de leur merveilleuse série Wild Style publié en 2014. Ici aussi d’autres images nous viennent en tête : on pense bien sûr aux visuels d’Innerspeaker et aux art-works les plus chatoyants de MGMT.

  (la pochette de Seasons à gauche et ses trois variantes)

Au-delà d’être une des plus belles réalisations de 2017, Seasons prouve la vitalité et l’inventivité de la scène psyché-pop française. Part Company n’a absolument rien à envier aux anglo-saxons et se permet même parfois davantage de libertés. Ayant porté La Femme, The Limiñanas et Moodoïd sur le devant de la scène ces dernières années, la France se place enfin comme une nation qui compte dans la sphère psychédélique, grâce à un son décomplexé et aventurier, immersif et profondément humain. Impossible donc qu’un de ses meilleurs étendards passe à côté du public : Seasons est définitivement le disque qu’il vous faut pour bien commencer 2018.

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