| Photo : Alma Elste par Lucie Bascoul
Les clips du mois, c’est votre rendez-vous mensuel qui vous présente les sorties vidéos de nos musiques préférées. Composées avec amour et minutie par les oreilles de notre rédaction, ces compilations s’attèlent à vous partager chaque mois le meilleur des Internets, faisant se côtoyer les grands noms du moment et les jeunes pousses de la musique. Découvrez les pépites qui nous ont fait chavirer le cœur et les rétines ce mois-ci.
Le plus labyrinthique : Alma Elste – Let’s Have Dinner
| Sélectionné par Arthur Barbaresi
Quel est le point commun entre un match de baseball, une souris et un T-Rex ? Notre rêve de la nuit dernière ? Non, mais ça aurait pu. Il s’agit du titre Let’s Have Dinner, extrait de Welcoming the Maze, dernier album d’Alma Elste, sorti en mai dernier. Quatre ans après The Story of Alma, son premier EP, la chanteuse nous convie à une ballade pop folk sur fond d’IA et d’amour naissant. Le recours à l’intelligence artificielle, dans ce clip inventif signé gustifink, crée une atmosphère onirique et inquiétante, un univers visuel où la frontière entre le rêve et le réel devient poreuse. Une hallucination, en somme. Tout commence comme une banale rencontre sportive, qui se termine en une curieuse catastrophe… Métaphore de la rencontre amoureuse ? La voix enveloppante de l’artiste contraste avec la violence apocalyptique des scènes. Gros plans au ralenti sur des visages contrariés, regards remplis de rires et d’effroi, explosions foudroyantes et autres carambolages chaotiques… Derrière ce dédale de symboles, une seule chose à faire : accueillir sans comprendre. Et accepter ce dîner.
Le plus libéré : Mandyspie – FAIRYTALE
| Sélectionné par Arotiana Razafimanantsoa
« Là, je lâche prise. » C’est de cette façon que Mandyspie décrit son dernier single FAIRYTALE, premier extrait de son prochain EP qui sort le 13 juin. Au bord de la plage, dans une ambiance visuelle mélancolique, elle traduit à travers ce clip son envie de se libérer. Se libérer de la pression de réussir, de courir après le temps, de faire les choses parfaitement. Fidèle à son univers emo/goth, elle ne manque pas de laisser paraître ses signatures sonore et visuelle : un flow planant dans une esthétique sombre. Son prochain EP s’annonce être un projet assumé, réalisé dans cette même envie de lâcher prise et de se révéler un peu plus.
Le plus vénitien des temps modernes : Baxter Dury – Allbarone
| Sélectionné par Marthe Rousseau
C’est en amant solitaire que Baxter Dury revient avec le titre éponyme – pour le moins surprenant – de son nouvel album Allbarone. Regard dans le vide et bouquet de roses rouges dans les mains, on croirait que le crooner britannique s’apprête à rejoindre son date, seul sur une gondole à Venise. À moins qu’il ne suive une procession étrange, consistant à raviver le souvenir d’un amour révolu. Avec sa danse bizarroïde et son outfit mi-dandy mi-Don Juan, Baxter Dury joue la parodie de celui qui perd un peu la boule et parvient à nous embarquer avec lui. La prod techno sombre et inquiétante contraste avec la voix grave et nonchalante qui le caractérise. Résultat ? Nous aussi, on veut bouger n’importe comment. Plus que quelques mois avant de pouvoir le faire encore plus longtemps, avec la sortie de son nouvel album, disponible le 12 septembre et en live : le 26 novembre à l’Aéronef de Lille, le 4 décembre à la Salle Pleyel à Paris, puis le 6 décembre au Transbordeur de Lyon.
Le plus vlog : Liouba – Gentil & Sexy
| Sélectionné par Célia Heude
À la manière d’un vlog qu’on lancerait dès la notif reçue, Liouba nous embarque dans une de ses journées ordinaires : balade au parc, glace à la main, puis soirée entre ami·es. C’est ce moment de vie tout en simplicité qui sert de décor au clip de Gentil & Sexy. Après avoir marqué les esprits lors du Planet Rap de Bamby avec 98BBY, Liouba revient en s’assumant en rappant ce qu’elle mérite : un mec gentil et sexy… et l’argent du mec gentil et sexy, bien sûr. On retrouve tout ce qui fait la force de son rap : une confiance assumée, une dose d’introspection et cette nonchalance qui la rend si attachante. En mode vlog, elle partage ses états d’âme avec une sincérité désarmante — difficile de ne pas s’y reconnaître. Sorti le 30 mai, ce titre donne aussi son nom à son tout nouvel EP, composé de deux morceaux dont Yin. Elle montera sur scène le jeudi 3 juillet 2025 lors des Trois Beaux Days aux Arènes de Montmartre, un concert qui promet d’être aussi énergique que sa musique.
Le plus doux : Ed Mount – DEAD TAMAGOTCHI
| Sélectionné par Juliette Fournillon
Un morceau simple et efficace qui, par un accord de piano, nous attrape et nous emmène avec tendresse vers des mesures chaloupées où guitare et percussions rythment une production aérée. Le titre s’associe bien à l’idée, DEAD TAMAGOTCHI détourne avec douceur et connivence nos regards vers une joyeuse jeunesse. Le clip s’ouvre sur le plan d’un homme s’apprêtant à rénover un skate-park par un bon coup de peinture. En parallèle, on retrouve Ed Mount en skate loin de là, laissant paraître que le temps a passé. Il chute et se retrouve soudainement bras dans le plâtre, à jouer dans ce skate-park originel qui deviendra l’espace de la chanson le terrain de jeu de moments savoureux : le groupe joue entouré d’un skater, d’un barbecue, de cocktails, de hot-dogs alléchants devant un chien alléché. Une scène marrante et séduisante, à l’image de la finesse d’Ed Mount qu’on est heureux·ses de retrouver et qui s’impose comme le musicien idéal pour réveiller cette époque et nous rappeler à ses objets représentatifs parfois oubliés.
Le plus liminal : Elias Rønnenfelt – Carry-On Bag
| Sélectionné par Laetitia De Mesmaeker
Quoi de mieux qu’un hall d’aéroport pour illustrer ce qu’est un espace liminal ? Pour son projet solo, Elias Rønnenfelt (qu’on connaît aussi comme voix d’Iceage ou encore de Marching Church), y a également pensé. Certainement filmé entre deux dates de sa tournée, armé de son seul téléphone et d’attentes visiblement trop longues qui favorisent la créativité. Oubliez l’image typique des halls où se côtoient vacancier·ières qui sirotent déjà des boissons couleur soleil à des heures matinales face aux empressé·es en voyage d’affaires face à leur café noir. Non, juste l’artiste, des gestes inexplicables et quelques âmes en fond, de passage, anonymes. Entrecoupé de plans dans un paysage urbain tout aussi inconnu, tout aussi vide. Des incrustations surprises, qui rendent nostalgique mais surtout rajoutent au surréalisme de l’ensemble, rappellent un peu l’époque Blingee (ou ce n’est que nous ?). Un sentiment typique de ce genre d’espace nous envahit, modéré par la voix douce et répétitive, comme si on tentait de nous garder présent·es, malgré tout. Tout pour nous situer hors du temps pendant près de 3 minutes 30, presque dans une backroom. Rien pour rappeler les vacances. Une sensation d’étrange qui ne nous quitte pas immédiatement, qui colle à la peau quelque temps pour nous faire fredonner l’air.
Le plus enragé : Jehnny Beth – Broken Rib
| Sélectionné par Coralie Lacôte
Vous aussi vous sentez cette rage tapie au creux du ventre, cette colère sourde qui donne envie de hurler, ce feu qui menace de déborder quand chaque jour le monde paraît plus absurde et dénué d’humanité ? Par chance, Jehnny Beth signe son retour avec un titre indus’ à l’énergie cathartique communicative, taillé pour se défouler. Cinq ans après son premier album solo TO LOVE IS TO LIVE, la musicienne aux talents multiples annonce la sortie de son deuxième disque. Pour l’occasion, elle publie ce premier titre Broken Rib et son clip dont elle signe la direction artistique avec son éternel complice Johnny Hostile. Avec justesse, elle y dépeint la dissonance de nos vies, coincées entre des apparences lisses et l’insoutenable conscience que tout dévie. Dans un open space, archétype de ce monde-vitrine, ou dans le métro, on la découvre, essayant d’agir comme il faut mais finissant par laisser la fureur l’envahir. Elle-même le dit, cette chanson est un cri. Comme son clip, elle nous invite à sortir de nos postures et hurler avant que le monde nous silencie.
Le plus critique sociale : TVOD – Party Time
| Sélectionné par Hélène Mallet
Le 5 mai dernier, TVOD (Télévision Overdose) dévoilait Party Time accompagné du clip du titre éponyme. Mêlant krautrock, punk et synthés envoûtants, le sextuor aux multiples influences livre un album sauvage, mélancolique et dansant : un disque brut qui met une claque. Entre dessins enfantins et vices d’adulte, le clip nous emmène dans une fête où les excès sont nécessaires pour décompresser du quotidien en corporate job. Dans ce chaos visuel, TVOD offre une critique brute de l’overdose de la société actuelle : saturée, morose, mais toujours en quête de réunion autour d’un son cathartique. Alors nous aussi on a bien envie d’aller danser “butt ass naked” dans un moment de pure débauche sonore.
Le plus effervescent : MRCY – Flicker
| Sélectionné par Joséphine Petit
Alors que le duo britannique n’en est plus à son coup d’essai, MRCY signe un premier vrai clip scénarisé et exaltant pour accompagner la sortie du très bon VOLUME 2, leur second disque à ce jour. Dans une ambiance sombre mi hôtel déserté, mi bureau oppressant, on suit l’éveil théâtral de Stefano A. Addae – un street performer qu’on a déjà vu danser pour Jungle ou poser pour Ezra Collective – qui s’épuise au fur et à mesure du morceau dans une chorégraphie tout aussi hypnotique qu’effervescente. Flicker, lueur en français, parle de donner trop à celleux qui ne le rendront jamais. Comme une flamme vacillante représentée par des lumières tremblotantes et des plans très courts tenue en haleine par des refrains aux envolées grandioses, il s’agit de mettre plus d’énergie que ce que l’on devrait dans certaines relations ou certains chapitres de nos vies. Une très belle entrée en matière de clips pour MRCY dont on en attendait pas moins et avec qui on plonge tête la première dans ce nouveau disque.
C’est comme les Power Rangers, parfois on unit nos pouvoirs pour faire de plus grandes choses.