L’interview 7-6 Empire de MNNQNS
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Auteur·ice : Adrien Amiot
08/11/2018

L’interview 7-6 Empire de MNNQNS

Au MaMa Festival, j’ai eu la chance de rencontrer le groupe MNNQNS qui, après avoir remporté le prix Ricard Live Music, n’en finit plus de monter. Programmés le mercredi soir au Backstage by the Mill, nous leur avons posé quelques questions un peu plus tôt dans la journée pour éclaircir certains points de leur jeune mais foisonnante carrière. Rendez-vous donc avec Adrian, le chanteur, et Grégoire, le batteur, au cœur de l’Elysée Montmartre, dans le XVIIIème arrondissement de Paris.

LVP : Hello les gars ! Je vous ai connus il y a quelques années à Rouen, c’est là que tout s’est créé pour vous. Parlez-nous d’abord de votre rencontre.

Adrian : Pour être honnêtes, l’aventure MNNQNS n’a pas commencé à Rouen mais au Pays de Galle, à Cardiff. J’ai écrit les premiers morceaux du groupe là-bas. À mon retour, j’ai trouvé des gens pour jouer. Le line-up a été pas mal fluctuant au début, on a eu une douzaine de musiciens différents. Là, c’est le bon line-up insh’allah ! (rires) C’est beaucoup plus stable maintenant, c’est cool.

Grégoire : Moi je suis arrivé il y a deux ans maintenant parce que le batteur de l’époque, Woods, qui fait nos clips maintenant, voulait arrêter le groupe. J’avais déjà dit à Adrian que s’il virait Woods, j’étais là ! (rires) Non, je déconne… Je suis rentré dans le groupe à ce moment-là, Félix et Marc sont arrivés un an après. Adrian écrit, je commence à écrire, Marc aussi un petit peu, Félix met son grain de sel. Ça commence vraiment à être le noyau qui marche, tous les quatre. On n’a jamais fait autant de concerts qu’avec cette formule là.

LVP : La chanson Bored In This Town parle de Rouen, tu t’ennuyais là-bas ? Est-ce que tout ça aurait pu exister sans cette ville ?

Adrian : Ça aurait été sûrement très différent. Il y a une vraie scène musicale en ce moment, depuis 3-4 ans et c’est hyper identifié rock, avec plein de sous-genres différents, tu vois. C’est pas du tout cloisonné à un type de truc, c’est qui est très bien. Les gens qui jouent avec moi aujourd’hui, je les ai rencontrés à Rouen donc c’est à la base du truc. Pour ce qui est de l’ennui, Greg a une très belle théorie là-dessus, je te laisse la développer.

Grégoire : Je dis souvent que Rouen est une ville parfaite pour s’ennuyer. Il y a un truc sain quand tu t’ennuies à Rouen. Ça fait partie du dispositif mis en place par la ville ! À Paris, c’est un peu moins normal de s’embêter je dirais, ou même d’autres villes, mais à Rouen ça fait partie du truc. Il y n’y a pas beaucoup d’endroits “logiques” pour aller faire un concert avec ton groupe. Je pense que c’est voué à changer. Maintenant le patron du 3 Pièces (un bar/concert dans le centre ville, épicentre de la scène musicale Rouennaise, ndlr) bosse avec le 106 (la grande salle de musiques actuelles de Rouen), c’est hyper prometteur. Surtout pour les prochains patrons de bar qui voudront faire des choses sérieuses par rapport à la culture.

LVP : C’est un peu unique comme exemple, un patron de bar qui devient un acteur majeur de la scène musicale d’une ville ?

Adrian : C’est un cas de figure qu’on retrouve beaucoup. Le grand classique c’est le CBGB à New-York. Au début c’était un mec qui n’en avait rien à foutre des jeunes, le C c’est pour country et le B bluegrass, tu vois ! Alors qu’au final, les groupes qui passaient c’était Television, Talking Heads… C’est quelque chose qui est sain, que des gens qui possèdent des lieux s’investissent la vie musicale d’une ville.

LVP : Vous avez ensuite gagné le tremplin Ricard, qu’est-ce que ça a changé dans le fonctionnement du groupe ?

Adrian : Ça a beaucoup accéléré les choses. Plein de choses nous sont arrivées depuis. Je pense qu’on aurait fini par les atteindre, mais là ça a vraiment facilité les choses en très peu de temps. Ça a mis un boost dans nos négociations avec les tourneurs, chez Alias par exemple, ça a clairement mis le paquet avec cette boîte-là. C’est un effet boule de neige. Ça nous a permis ensuite, via Alias, de faire le support de Franz Ferdinand au Zénith de Caen. Ce truc là nous a permis de signer chez Coda, un tourneur en Angleterre, parce que leur manager a adoré ce qu’on a fait. Finalement, Ricard ce n’est pas la base de tout mais ça a énormément accéléré le processus.

Grégoire : Pour donner un exemple hyper représentatif, on était en discussion avec Alias avant de gagner Ricard, ils nous disaient : « on a besoin de temps ». Et bizarrement, une fois qu’on a été lauréats Ricard, ils ont fait « c’est bon, on vous signe ». Le fait qu’on signe avec Alias ça nous fait plein de dates, le fait d’avoir plein de dates nous a permis de devenir intermittents, ça change la vie. J’ai arrêté de donner des cours, les gars n’ont pas encore le statut mais c’est imminent. Rien que ça, le fait de passer de te faire chier avec ton taf quand même quand t’as pas de concerts – enfin c’est hyper dur de faire les deux je trouve – à juste faire ça, c’est la belle vie. Maintenant, j’ai juste à faire ça : me ramener en concert, aller en studio, etc… C’est un gros changement qui est super appréciable. En plus, on a un tourneur qui a compris le message et qui nous donne énormément de dates. Nous, on aime bien jouer et lui il aime bien faire jouer les groupes dont il s’occupe. Il dit que les groupes de rock doivent tourner beaucoup, c’est sa philosophie.

LVP : Ce n’est pas le cas de tous les groupes émergents, dont on a l’impression qu’ils doivent être préservés parfois… En particulier sur les projets pop.

Adrian : L’esthétique est hyper importante parce qu’avec de la pop, tu peux générer des thunes avec des pubs notamment. C’est hyper courant. Nous dans les trucs plus rock ou indie, c’est pas le même créneau.

Grégoire : Pour gagner de la thune avec un groupe comme nous, le mieux c’est de le faire jouer un maximum. Parmi tous les groupes que je connais plus vénères que “juste” pop, les trucs qui marchent bien jouent beaucoup à chaque fois. Nous, on joue beaucoup mais c’est le minimum. Si on jouait encore plus ça m’irait.

LVP : Où est-ce que vous aimeriez jouer, justement ? En Europe ? 

Grégoire : On vient de jouer en Allemagne et en Angleterre. On va jouer au Luxembourg, en Suisse, en Hollande bientôt. Pour l’année prochaine, on va continuer la France évidemment mais on va encore plus jouer à l’étranger.

Adrian : Surtout qu’on est rentré chez Coda,  un tourneur basé à Londres qui s’occupe du monde entier, à part les US. Ça va nous ouvrir plein de trucs.

Grégoire : Et puis on est lauréats du Fair 2019, ils sont en partenariat avec des Instituts Français, le Bureau Export par exemple. Ils font jouer des groupes en Asie, en Amérique du Sud… Prochainement, on jouera encore plus à l’étranger.

LVP : On en parlait tout à l’heure, est-ce que c’est un objectif à terme d’atteindre les US ?

Grégoire : J’aimerais beaucoup. Mais les US c’est spécial, ça coûte carrément plus cher que tout le reste, c’est encore plus compliqué. Les visas de travail coûtent super cher. C’est 1500 balles par personne. S’il faut ramener son matos en avion, c’est l’horreur. Il y a aussi plein de problèmes avec le visa. Plein de groupes se sont fait renvoyer à cause de ça. De toutes façons les US, tant qu’on nous en parle pas…

Adrian : C’est pas urgent, ça arrivera si ça doit arriver !

Grégoire : Si on doit le faire on le fera bien. Surtout qu’il existe plein de choses aux États-Unis en mode découverte, par exemple South by Southwest (SXSW) si on y va c’est qu’on aura calculé le truc avant pour le faire bien avec plusieurs dates. Mais sinon les États-Unis j’aimerais bien y jouer, j’aime bien !

LVP : Parlons de vos projets. Vous avez un disque en préparation ? Vous pouvez nous en dire quelques mots ?

Grégoire : On a enregistré notre premier album cet été, qui est bientôt fini d’être mixé, donc après mastering… La pochette est finie et on espère qu’il sortira en avril ou mai 2019. On l’a fait entre nous, cet été, à la campagne… Maintenant on va peut-être bosser avec des gens en plus via notre label, on est en train de voir si on inclut quelqu’un d’autre dans le travail ou pas.

LVP : Il y aura une évolution, par rapport aux deux EP ?

Grégoire : Le dernier EP on l’a appelé Advertisment parce que c’est vraiment un EP en mode “publicité”. En plus, on trouvait ça cool de faire un EP avec ce nom là sous l’étendard Ricard. C’était de la promo, de la pub donc autant y aller à fond. Là ce sera le truc fini, le vrai truc, notre premier album… Après comment ça sonne, j’ai encore trop la tête dedans, je ne sais pas… Les morceaux les plus récents de l’album ont déjà un an, en tant que démos c’est des trucs sur lesquels on bosse depuis super longtemps. Mais on a osé des choses différentes.

Adrian : Pour l’EP, on voulait quelque chose d’immédiat. Des chansons courtes, un résultat spontané. L’album est plus réfléchi, avec beaucoup de morceaux rapides comme par le passé mais aussi des tempos lents, des ambiances différentes, dreamy…

LVP : Il y a une élément assez récurrent dans vos chansons, c’est le jeu de questions/réponses entre la voix et le groupe. Ça me fait penser à une construction gospel… En vrai, vous êtes pas un groupe de gospel caché depuis le début ?

Grégoire : C’est trop bien, on nous l’avait jamais dit je crois… (rires) C’est un truc qu’on aime bien ouais ! On en discute souvent. Il y a un truc qu’on aimerait faire, c’est d’aborde le chant lead qui dit un truc puis le chœur répond en expliquant ce qu’il vient de dire. S’il dit « j’ai mal à la tête » les chœurs répondent « il a mal à la tête ». Du coup c’est hyper gospel carrément, c’est une bonne lecture. Il y a un groupe qui s’appelle Art Brut, qui faisait du rock des années 2000 mais un peu post-punk quand même, ils ont souvent ce truc là. Ils ont un morceau qu’on écoute où c’est exactement ça, le chanteur dit un truc et les autres apportent une précision. Il y a un refrain où il dit « j’étais réveillé toute la nuit », ils disent « il était réveillé toute la nuit », il dit « j’ai fait quelques erreurs », ils répondent « beaucoup d’erreurs », des trucs comme ça. Je trouve ça trop cool d’argumenter ou d’étayer le propos du chant lead.

LVP : Traditionnelle question de fin : votre meilleure expérience de scène et juste après la pire.

Adrian : Pour la pire je crois qu’on est d’accord. Printemps de Bourges 2017. Quoique Saint-Étienne c’était pas mal dans mon top.

Grégoire : Le Printemps de Bougres c’était pas nul c’était ingrat. Pour résumer, ma batte de grosse caisse s’est barrée, j’ai voulu la remettre pendant un pont où je ne jouais pas et en me baissant je tape sur ma caisse claire qui tape dans le top aigu qui tombe du pratos qui emmène le micro batterie. 

Adrian : On a continué de jouer ! (rires)

Grégoire : C’était l’horreur parce que c’était le deuxième morceau d’un set de 30 minutes pour les Inouïs. Je me suis dit « bon ok ça sera pas pour cette fois à mon avis ». C’était un peu dur à vivre au début, maintenant je m’en tape un peu. (rires) C’était le pire concert mais d’un point de vue personnel.

Adrian : Saint-Étienne c’était un peu raide. Nous on n’a pas eu de soucis mais il n’y avait personne. C’était un soir de match, à Saint-Étienne, deux concerts en ville, on n’avait aucune chance.

Grégoire : Ça tu couperas, tu diras pas qu’il n’y avait personne à notre concert (rires) ! À Amiens c’était complet ! Pour le meilleur concert, j’avais bien aimé la première partie de Franz Ferdinand parce que ça représente quelque chose. Mais pour la finale Ricard, en plus de l’avoir gagnée donc c’est trop cool, le concert était vraiment violent. On était un peu sur des oeufs parce qu’on nous avait répété pendant toutes les balances « c’est trop fort, c’est trop fort ». Le public était trop chaud et c’était trop bien.

LVP : Excellente conclusion, merci à vous ! On se retrouve ce soir !

MNNQNS en concert :

09/11 – La Poche, Béthune

10/11 – Rdv Soniques, Saint Lô

14/12 – EMB, Sannois

15/12 – Le 106, Rouen

Tags: MNNQNS
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