Lorsque l’on prend la route pour le Botanique, en cette première semaine des festivités, une émotion particulière nous gagne. La frustration tassée au fil des derniers mois semble alors nous échapper pour laisser place à une excitation qu’on se languissait de ressentir à nouveau. Ce n’est pas seulement le retour des lives pour nous (n’ayant pas pu nous empêcher d’aller divaguer dans d’autres salles de concert ouvertes avant l’heure), mais le retour des lives au Botanique. Et la nuance n’est pas négligeable : c’est le retour de ce décor empli de lyrisme, de cet écrin verdoyant de musique niché au cœur de la vibrante capitale bruxelloise.
Dans le cas malheureux où vous n’avez pas pu obtenir vos précieux sésames (ou un Covid Safe valable), l’équipe de La Vague Parallèle vous immerge dans l’ambiance si particulière de ces rendez-vous au cœur du Jardin Botanique et entre les murs de ce trésor d’architecture. Récap de la première semaine avec This Is The Kit, Pomme, Juicy Orchestra et Mansfield.TYA.
08/09 | Turner Cody & The Soldiers Of Love + This Is The Kit
Revoilà enfin les lives intimistes dans l’antre de la Rotonde, incontournable salle du Botanique, au sein de laquelle on se faufile pour assister à la performance de This Is The Kit, précédée d’un show survolté avec Turner Cody and the Soldiers of Love. Alors que le band s’élance dans une enfilade de tubes à l’esprit folk-rock western, nos yeux et nos oreilles ne peuvent s’empêcher de sautiller d’un instrument à l’autre, de la classe innée de Nicolas Michaux à l’extravagance du frontman moustachu new-yorkais. « Fun. That’s all that matters » lance-t-il à la foule, imposant le mot de la soirée et l’atmosphère qui va avec.
Autant se le dire : les raisons qui nous ont poussé·es vers Turner Cody ne sont pas les mêmes que celles qui nous guideront vers la folk hautement émotionnelle de This Is The Kit. Ou peut-être que si, finalement : la recherche d’une musique de sincérité, guidée par la vocation de transmettre et réchauffer la foule. En ce sens, le collectif mené par Kate Stables a su assurer la seconde partie de soirée avec une folk intimiste et touchante, guidée par la force de son banjo, la synergie des deux voix féminines, et l’efficacité d’une setlist variant d’une folk-rock plus soutenue sur This Is What You Did à une mélancolie bouleversante sur Bullet Proof ou encore sur le céleste Riddled With Ticks.
| Photo : Laura Franco
09/09 | Pomme
Si son album les failles n’a pas quitté nos chevets et nos playlists depuis sa sortie en novembre 2019, il nous tardait de découvrir cette collection pleine de transparence et de vulnérabilité en live. On en frémit encore. Sous la chaleur d’un Chapiteau comble et grouillant, à l’abri de la pluie diluvienne de fin d’été, on a témoigné de la magie enfouie en Claire Pommet, qui donne à ses textes et ses arrangements un souffle nouveau à travers une scénographie et des jeux de lumière minutieux.
Et si on a adoré son dernier album, on craignait tout de même une certaine monotonie au vu de l’ambiance globalement mélancolique de l’opus. Il n’en est rien : Pomme se saisit de ses hymnes pour les retourner et nous les offrir sous un jour nouveau, laissant place à quelques battements de nuque et autres roulements d’épaules. Et pour éveiller la foule, rien de mieux qu’une reprise de Mylène Farmer, dont le Désenchantée trouve en la voix de Pomme un écrin idéal pour renaître. Mais, finalement, c’est dans les instants de pleine quiétude que la chanteuse nous gagne. Une communion rêveuse s’empare ainsi de la foule sur les bouleversants grandiose, on brûlera ou encore les oiseaux, pour de purs instants de communion à en tirer quelques larmes.
| Photo : Laura Franco
10/09 | WAYI + Juicy Orchestra
C’est avec WAYI que s’ouvre la soirée, assurément l’une des futures voix d’or du Plat Pays. Avec un univers r’n’b acoustique rappelant les débuts d’une certaine Mahalia, la jeune Belge n’a rien à envier à ses modèles de référence tant sa plume fleur bleue et son sens de la mélodie semblent déjà maîtrisés. Sobrement accompagnée d’un guitariste et d’une choriste, la chanteuse nous livre son jeune répertoire marqué par sa voix cristalline et son allégresse communicative.
Création pensée pour l’occasion, Juicy Orchestra vient mêler son registre à l’ensemble Vibration de Denis Menier (constitué de 14 cordes, 7 flûtes et une guitare), le tout dirigé par le compositeur Jean-Marie Rens. Le résultat : une véritable claque. Tant au niveau sonore que visuel, c’est avec ébahissement qu’on a témoigné de la puissance et de la technique d’une telle alchimie entre l’élégance organique des instruments et la fougue des deux sœurs d’armes, venues présenter leur discographie passée et de nouvelles compositions à paraître sur leur prochain album attendu pour février prochain. Mention spéciale pour leur délirante réinterprétation d’une œuvre de Bach, sur laquelle se pose un texte empli de malice et d’humour.
| Photo : Paul-Louis Godier pour le Botanique
12/09 | Mansfield.TYA
Julia Lanoë ne tient pas en place. Aussitôt clôturé le remarquable épisode qu’a été KOMPROMAT, voilà qu’elle réactive Mansfield.TYA, le duo qu’elle forme avec Carla Pallone. Autant dire que la confiance régnait dans l’Orangerie, pleine à craquer pour l’occasion. D’entrée de jeu, la magie opère et on se retrouve aspiré·es par une énergie aussi sombre que fascinante, accentuée par cet immense drap blanc recouvrant la scène, et ne laissant d’abord entrevoir que des silhouettes.
Mais la froideur fait rapidement place à la fête. La voix nous invite au lâcher prise sur des mélodies synthétiques qui nous ramènent d’un bond à l’âge d’or de la cold wave tandis que le violon, omniprésent, donne au tout une aura plus organique. Alors on s’exécute, en admirant l’alchimie palpable du duo ainsi que l’aisance avec laquelle elles exploitent la porosité des frontières entre pop, variété, électronique.
| Photo : Fabian Braekman pour le Botanique
C’est comme les Power Rangers, parfois on unit nos pouvoirs pour faire de plus grandes choses.
