On a parlé de son premier album avec Petit Prince
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Auteur·ice : Paul Mougeot
05/10/2020

On a parlé de son premier album avec Petit Prince

Petit Prince fait partie de ces artistes dont on attend les sorties avec impatience. En ce mois de septembre, le co-fondateur du chouette label Pain Surprises a dévoilé son premier album, Les plus beaux matins. Alors, comme l’année dernière à l’occasion de la sortie de son deuxième EP, on est allé le rencontrer dans son studio pour en discuter avec lui.

La Vague Parallèle : Salut ! Comment s’est passé ton été ?

Petit Prince : Bien ! J’ai hésité à partir en vacances parce que je voulais profiter du calme pour me remettre à travailler sur un projet, mais je suis quand même parti, et finalement c’était bien !

LVP : On te retrouve un an et demi après notre dernière rencontre, qui avait eu lieu au début de l’année 2019 pour la sortie de ton dernier EP, Je vous embrasse. Qu’est-ce qui s’est passé pour toi depuis l’année dernière ?

PP : J’ai beaucoup travaillé, notamment sur mon premier album. C’était assez dur émotionnellement d’être toujours seul au studio à me demander « est-ce que je vais réussir à écrire une chanson ou pas aujourd’hui ? », surtout que la plupart du temps la réponse est évidemment « non », sinon on sortirait tous dix albums par an (rires) ! Cela dit, j’ai appris énormément et j’ai le sentiment d’avoir posé les premières pierres de mon chemin. Je suis content du disque, mais je sais que c’est seulement le début : dans quelques albums, je ferai l’album ultime. Je le vis comme un premier album qui m’a permis d’apprendre beaucoup et de poser les bases d’un prochain disque.

LVP : Dans le processus de création, tu as trouvé ça plus difficile que de sortir tes premiers EP ?

PP : Oui, carrément ! Mon dernier EP, je l’avais fait en une ou deux semaines. Là, j’avais envie d’écrire des chansons plus longues, avec des structures mieux construites. Je voulais faire un truc pop mais pas simpliste pour autant. Ce que je reprocherais à mon EP, c’est que les morceaux étaient trop simples, ils me permettaient surtout d’étaler mes idées plutôt que de faire des vrais choix artistiques. Là, j’ai voulu choisir une direction et m’y tenir.

C’était beaucoup plus de travail et j’ai essayé de mettre davantage ma voix en avant. Le confinement m’a permis de beaucoup la travailler et je sens qu’elle est beaucoup plus assumée, beaucoup plus juste.

LVP : Une petite semaine s’est écoulée depuis la sortie de ce premier album, Les plus beaux matins. Comment s’est passée cette sortie pour toi ?

 

PP : Médiatiquement parlant, j’ai eu plus de retours que ce que j’aurais pu imaginer. Après, j’ai surtout envie que le public s’empare de l’album, j’ai envie de le jouer en live, mais la période n’y est pas forcément très propice…

Je suis impatient de monter sur scène, d’autant que mon live est mille fois mieux qu’avant. Avant, j’appréhendais de monter sur scène, là, je suis juste pressé de montrer ce que j’ai fait !

LVP : Il y quelque chose de l’ordre de l’hypersensibilité qui se dégage de ce disque, dans ton rapport au monde, qu’il soit négatif sur des morceaux comme JSP ou positif sur des titres comme Tendresse sur canapé. Quelles sont les émotions qui t’ont inspiré ?

PP : Sur ce disque, mon but, c’était de trouver des situations hyper simples de la vie et d’essayer d’étirer ces moments le temps d’une chanson. Ce sont des espèces d’émotions qui sont à la fois très fortes et très simples : ma mère qui pleure à chaque fois que je pars, ce moment où tu dragues une fille et que tu sens que vous allez bientôt vous embrasser… J’ai voulu parler de choses très simples pour que les gens se reconnaissent dedans.

Le fait d’être seul dans mon studio me faisait me questionner sur ce que j’aimais dans ma vie. Il y a plein de choses : les amis, regarder une série à la maison avec ma meuf, être chez moi… J’avais même envie de parler de mes insomnies de manière positive, sans avoir à dire le mot « angoisse » ou le mot « noir ». J’ai essayé de traiter ces sujets d’une manière assez naïve. En un sens, j’ai beaucoup aimé faire ça, mais de l’autre, c’était vraiment difficile : je dormais mal, j’y pensais tout le temps… Il y a des jours où tu rentres chez toi et tu te sens le meilleur du monde, et aussi beaucoup d’autres où tu te dis que tu n’es pas artiste, que tu ne vaux rien…

LVP : Le gros point fort de ce disque est aussi son côté instrumental : c’est un vrai bel album de pop, au sens noble du terme, qui parvient à faire ressortir toute la puissance et la richesse du rock. Est-ce que tu joues tous les instruments qu’on trouve dessus ?

PP : Je joue 95% des instruments sur le disque. Les batteries, je les enregistre et ensuite je copie-colle des boucles que j’aime bien, un peu comme sur du hip-hop, ce qui me permet de faire des démos. Ensuite, j’ai un ami qui s’appelle Arthur Vonfelt, qui est un excellent batteur, qui refait toute la prise en y ajoutant ses petits trucs. Le solo sur Maman 67, c’est lui ! J’ai aussi passé quelques jours en studio avec Victor Le Masne pour travailler les arrangements. Il a trouvé des petits ponts harmoniques comme sur Endors-toi, il a aussi ajouté des percussions à certains moments, il m’a aidé à enregistrer le violoncelle…

LVP : Justement, on trouve sur ce disque une grande variété de sonorités. Qu’est-ce qui t’a inspiré des morceaux comme Conte Breton ?

PP : Je pense que tous les artistes font énormément de morceaux qui n’ont rien à voir puis ils sélectionnent ensuite ceux qu’ils préfèrent. Celui-ci est arrivé à un moment où j’avais fait trois morceaux avec une basse saturée et je me suis dit que je n’allais pas faire la même chose à chaque fois : savoir m’enregistrer à la batterie avec un son hyper compressé puis enregistrer une basse saturée dessus…

Tous les premiers morceaux, je les ai composés comme ça, et j’en avais un peu marre. Je me suis dit que j’allais faire quelque chose qui n’avait rien à voir, j’ai fait un beat à l’ordi et j’ai enregistré le reste avec un vieux synthé un peu pourri qui donne ce son de flûte. Victor l’a trop kiffé et il a eu mille idées pour le prolonger. Ça a donné Conte breton.

LVP : Tu ne t’interdis pas grand chose finalement ?

PP : Si, quand même. Il y a énormément de morceaux que je ne termine jamais, parce que je ne les trouve pas assez bien. Mais je trouve ça bien d’aérer l’ensemble avec quelque chose qui n’a rien à voir avec le reste.

LVP  : Il y a précisément un morceau qu’on a adoré, c’est Chien Chinois. Il se trouve que ce morceau est né lors d’une soirée organisée par La Vague Parallèle à Bruxelles. Est-ce que tu peux revenir pour nous sur cet épisode ?

PP : L’histoire, c’est qu’on jouait au Café des Minimes à Bruxelles et c’était le jour de la pride. On était trop content de jouer à Bruxelles ce jour-là, mais le problème, c’est que le bar était situé à l’opposé de l’arrivée de la manifestation, donc il n’y avait personne. On a un peu tardé avant de commencer le concert avec UTO, mais finalement il y a avait une trop bonne ambiance dans le bar. Du coup, on a jamé hyper longtemps, on a demandé aux gens de venir chanter et c’est comme ça que Chien Chinois est né. C’est à ce moment-là qu’on a trouvé cette boucle de guitare et le lendemain, dans la voiture, j’ai demandé à Émile quels accords il avait joué sur ce morceau. Ensuite, je suis revenu en studio et je l’ai enregistré.

LVP : Quand on s’est rencontré l’année dernière, tu travaillais précisément sur le premier album d’UTO et tu nous confiais avoir un peu de mal à jongler entre les différentes casquettes de producteur et d’artiste. Est-ce que c’est plus simple pour toi aujourd’hui ?

PP : Je ne le fais quasiment plus, pour ne pas dire plus du tout. Comme j’ai mixé ou masterisé un peu tous les premiers disques des artistes du label, on est arrivé au moment où les gens avaient envie d’essayer autre chose et où j’étais moi-même plus occupé par mes propres projets. Donc aujourd’hui, je ne fais quasiment plus que des choses pour moi.

Après, j’ai assez envie de refaire des projets pour d’autres, mais plutôt en binôme, notamment avec mon batteur. On voudrait essayer de produire ensemble des titres pour d’autres.

LVP : Et si tu pouvais collaborer avec n’importe quel artiste, tu choisirais qui ?

PP : En vrai, depuis qu’elle a sorti son premier album, j’aimerais bien travailler avec Izïa. C’est assez paradoxal car je trouve qu’elle a une bête de voix et que ça a l’air d’être une personne incroyable, mais je ne suis pas forcément fan de ce qu’elle fait musicalement.

 

De toute façon, je crois que je suis encore trop timide pour ça. Même si je pouvais choisir une semaine de studio avec n’importe qui, je ne sais pas si je kifferais tant que ça parce que je ne me considère pas comme un assez bon musicien. Je suis plutôt un geek : j’utilise beaucoup de techniques de studio pour camoufler ça et je me sentirais mal à l’aise que les gens voient d’où je pars parfois (rires) !

LVP : Pour terminer, est-ce que tu peux partager avec nous une découverte, un coup de cœur musical récent ?

PP : Alors je ne suis toujours pas un grand digger, mais j’ai quand même deux-trois trucs (rires) ! En ce moment, j’écoute beaucoup l’album Teen Dream de Beach House.

Il y a aussi un podcast très intéressant qui s’appelle Broken Records, avec Kevin Parker interviewé par Rick Rubin. Je le conseille !

 

 

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