Opal, premier album de Cesar Quinn, ou comment décrire l’indescriptible
"
Auteur·ice : Caroline Bertolini
29/04/2021

Opal, premier album de Cesar Quinn, ou comment décrire l’indescriptible

“This is Opal, let it rain over you”. Les premiers mots de l’album concept du grand Cesar Quinn. Déjà dans les lettres de son nom de scène, Frederik Daelemans inspire la grandeur, du haut de ses 19 ans. Ce producteur, multi instrumentiste qui a déjà collaboré avec beaucoup de ses congénères belges lance son premier album Opal, dans la créativité et la poésie qui conviennent à son talent. Dès lors, impossible de décortiquer la musique de l’artiste tellement elle est complexe, conceptuelle et expérimentale, il est de notre devoir d’essayer de reproduire l’atmosphère qui règne dans le projet. Nous ne chroniquerons pas ce projet car il n’est pas chroniquable.

Il est important de comprendre avant toute chose qu’Opal n’essaye pas de plaire, ni aux radios, ni aux réseaux, ni aux plateformes. Opal est directement la volonté de Frederik, sans compromis. On le comprend dès son introduction, titre éponyme de l’album. Dès la fin du morceau on se fait emporter dans la tornade poétique de Cesar Quinn. Chaque morceau a alors le nom d’une pierre qui a sa propre atmosphère tout en servant la sphère globale. Il ne s’agira donc pas de vous en donner tous les secrets directement, mais de vous laisser vivre l’expérience mystérieuse qu’est l’écoute de ce projet.

 

Ce qu’on ressent d’abord c’est la douceur d’un déchirement. Lent, calme mais lourd. Chaque silence est pesé, chaque note est déposée, délicatement, faisant du son stéréo dans un casque, la plus belle chose qui pourrait nous arriver à ce moment précis. Cesar Quinn nous présente une poésie qui calme et étonne, une poésie bleue.

De la légèreté, on passe à la lourdeur, au lâcher-prise. Des notes semblent se perdre par moment, alors qu’elles sont exactement où elles doivent être. Peu importe où nous croyons que la mélodie va nous emporter, elle va autre part, ce qui en fait sa qualité la plus grande. Les progressions nous rendent confus avant le vrai départ d’une voix profondément sombre qui semble amère presque, maladive par moment.

L’envoûtement prend alors racine lentement, de façon presque létale pour disposer de nous. Un vrai serpent doré qui fait son chemin dans nos esprits, lancinant à la façon du violoncelle. Les mille voix de Frederik se rejoignent après avoir chacune vécu mille vies. Une oscillation s’opère, c’est le dynamisme à la Cesar Quinn.

C’est étrange quand quelque chose vous touche sans raison évidente. Cet ensorcèlement dure encore, dans un doux drame complexe pourtant très simple à l’esprit. Les ingrédients se superposent et tout y est à sa place. Le sentiment est semblable à l’attraction d’un aimant qui rend tout évident, solide comme l’alliage.

Passion et urgence sont maîtres-mots. Rouge et rose réfléchissent leur lumière sur nos oreilles agitées.

Aigreur, colère. « Everything’s a lie ». La saturation rend le son omniprésent, ne laissant que peu de place pour quoi que ce soit d’autre. C’est déchirant et libérateur. On a l’impression d’avoir purgé toutes nos erreurs, ça nous laisse adouci.

Solide comme de la pierre, surprenant et multiple – presque bipolaire. Comme une claque dans la figure de sentiments, on est témoin de la beauté grandiose d’un son que l’on n’a pas l’habitude d’entendre. Si nous devions remettre notre vie en question, il serait assurément le moment.

C’est la tristesse qui suit cette remise en question. Cette impression d’avoir laissé quelque chose sur le côté. L’obscurité se teinte de bleu et d’or, comme une renaissance finalement. On laisse le superflu pour se livrer à quelques notes d’espoir minimalistes.

On se laisse alors emporter par un sentiment d’accomplissement et de presque joie. Du cuivre assuré, une atmosphère paisible nous laissant le sourire aux lèvres. Content d’avoir fait le voyage, notre esprit se voit grandi.

 

 

Cet album c’est une expérience, une introspection. Il nous permet de réfléchir sans trop se poser de questions. La poésie y est indescriptible. Elle s’impose à nous sans demander la permission et encore moins pardon. On y trouve des arrangements de free jazz qui perturberaient les oreilles les moins avisées. On se fiche de la note, on se fiche de tout, la musique devient le meilleur moyen pour véhiculer des émotions fortes et elle ira où bon lui plaira pour arriver à ses fins. À vivre cette expérience, on comprend la complexité des connections du cerveau de Frederik, ne faisant que rajouter à son talent qu’on connaissait déjà en surface. C’est une porte ouverte, une vitrine pour observer son esprit sans jamais pouvoir le comprendre. On laisse planer cette sphère autour de nous, on navigue dedans sans chercher à savoir où il nous mène et c’est très bien comme ça.


@ET-DC@eyJkeW5hbWljIjp0cnVlLCJjb250ZW50IjoiY3VzdG9tX21ldGFfY2hvaXNpcl9sYV9jb3VsZXVyX2RlX3NvdWxpZ25lbWVudCIsInNldHRpbmdzIjp7ImJlZm9yZSI6IiIsImFmdGVyIjoiIiwiZW5hYmxlX2h0bWwiOiJvZmYifX0=@