Patate dans ta gueule : ECHT! présente INWANE au Beursschouwburg
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Auteur·ice : Caroline Bertolini
19/10/2021

Patate dans ta gueule : ECHT! présente INWANE au Beursschouwburg

| Photo : Flor Huybens pour ECHT!

ECHT!, le live band qui plie la musique dans tous les sens nous a fait l’honneur de présenter son premier album INWANE au Beursschouwburg à Bruxelles. Le groupe, bien qu’il se base sur une sous-couche de jazz, repousse toutes les limites et se place comme porteur de la vague belge avant-gardiste du son. Une vague qu’on pourrait tenter de qualifier de nu-jazz ou de jazz fusion d’avant-garde si on tentait de la décrire. On peut dire qu’elle commence à se faire remarquer avec des groupes comme STUFF., TUKAN, The Brums, PAARD., Steiger, BeraadGeslagen, … qui se font petit à petit une place dans une scène belge alternative et progressive pour mélomanes désireux·ses d’intensité.

On avait déjà eu l’occasion de voir ECHT! par le passé, mais dans une tout autre configuration. Délivré de la contrainte de jouer en festival à la lumière du jour, le quatuor se concentre sur la grosse claque musicale qu’il se prépare à nous envoyer. Car énorme claque musicale, il y a. Apparemment il “suffirait” de quatre musiciens, très très bons musiciens, pour nous livrer du live comme on n’en voit que peu. Envahir la petite salle du Beursschouwburg avec une release party sold out pour un 9 titres en béton, c’était le pouvoir du groupe le 7 octobre dernier. On fera tout de même un gros shoutout à Ashley Morgan qui était venu assurer la première partie et poser sa voix sur quelques sons du groupe.

Le premier titre de l’album en dit long sur la libération qui va suivre. Permanent passe par des phases d’intensité si profonde qu’on passe près de la  rupture d’anévrisme, mais termine par un sentiment presque biblique. ECHT! nous plonge directement dans son univers sombre, mystérieux, franc et instrumental. Mais la track qui restera à jamais dans les esprits, en streaming et en live, c’est le fameux 500gr – la fameuse patate dans ta gueule. Après avoir saigné le titre du fin fond de notre chambre comme des dégénéré·es, il était temps de vivre le chaos en vrai. Le groupe a déjà produit un des meilleurs sons de l’année qui en envoie par ses cuivres et la diversité de sa proposition ; à la fois fine et lourde. Il fallait évidemment faire encore plus lourd en ramenant les cuivres sur scène. À coups de soubassophones, on ne nous laisse aucun choix que d’abdiquer et nous laisser aller dans le retentissement solennel aux sonorités électroniques qui s’offre à nous.

 

Une belle équipe pour un beau son : Federico Pecoraro, bass boss. Martin Méreau, batteur sniper. Florent Jeunieaux, guitare caméléon. Dorian Dumont, claviers wizard. L’ingéniosité émane donc de ces quatre cerveaux passionnés et c’est revigorant. Ils nous ramènent aussi de temps en temps à un peu de douceur qu’on n’a malheureusement pas observée en live et qui mériterait de se retrouver sous les spotlights ; celle de Parakeet. Mais l’humeur était à la fête et à raison. Dans l’obscurité totale, aux antipodes de ce dernier, on peut y trouver le cœur de Drache. Un ovni qu’on appelle à nous envahir façon Atreides dans Dune.

| Photo : Flor Huybens pour ECHT!

Et en parlant de Dunes, c’est un des derniers titres qu’on ne peut manquer de vous présenter. Ce piano qui remet le jazz au milieu du village et son pouvoir d’ensorcellement pour une transe aussi douce que gore. Le meilleur reste ces riffs qui se fondent dans la track jusqu’à presque disparaître grâce aux effets, pour les retrouver transformés dans l’électro du set. Parce que oui, on parle d’un set servi par un live band. C’est ce que le groupe dit dans la courte bio qu’on peut trouver sur Spotify : “With their totally homemade sound, they play their set like a DJ would”. C’est exactement la force de ECHT! qui arrive à nous faire nous demander si on est en boîte, en concert ou téléporté·es de l’un à l’autre. Au fur et à mesure du concert, l’atmosphère tire vers des sonorités presque techno et fait transpirer la salle à grosses gouttes. Je me souviens avoir écrit à propos d’un passage : “Si Turn Down For What avait pu être un bon son, ça aurait été ça”. Ça en dit long sur le croisement des genres opéré par le groupe.

Le meilleur de la scène belge nous a montré de quoi il était capable pour une soirée littéralement en éruption. On ne sait pas ce qui est mieux qu’une standing ovation, surtout quand les gens sont déjà debout, mais si le public avait pu donner son corps en offrande, il l’aurait fait. Comme quoi la fusion des genres est ce qui peut arriver de mieux à la musique pour l’instant. On laisse un peu de côté le hip hop et la pop qu’on a déjà entendus quinze mille fois et on fait une vraie place à l’expérimentation. Si on repart de la volonté du dieu tout puissant Miles Davis, c’est l’évolution (du jazz) et l’ajout de sonorités des quatre coins de la musique qu’on y trouve. C’est cette même volonté de fusion qu’on observe ici, ne cloisonnant en rien le son, mais le libérant. ECHT!, you made daddy proud.


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