Peach Pit ressort sa fougue détendue sur You and Your Friends
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Auteur·ice : Caroline Bertolini
14/04/2020

Peach Pit ressort sa fougue détendue sur You and Your Friends

Le quatuor canadien Peach Pit nous revient plus fort que jamais en ce 3 avril 2020. Les indie boys nous régalent avec leur album You and Your Friends, de quoi remplacer les vôtres en cette période aliénante. Peach Pit nous entraîne dans une sonorité conflictuelle qui perd sa tournure négative pour gagner en beauté. L’agressivité contenue que nous attendions cette année. Peter Wilton (basse), Mikey Pascuzzi (batterie), Chris Vanderkooy (guitare) et Neil Smith (guitare, chant) se rassemblent autour d’un deuxième opus qui crie euphorie et mélancolie. Comme le dirait la bio du groupe Instagram : wedding cover band. Ou encore sur leur page Facebook : eat shit peach pit. L’humour absurde et gênant nous a déjà convaincu·es.

Il est facile de décrire un groupe indie pop, aussi faut-il savoir en quoi un son est indie pop par définition. Peach Pit en est un exemple parfait. Leur son dégage l’influence punk de l’indie avec une austérité qui se marie au glamour de la pop DIY pour un chaos contrôlé, une douce irrévérence. Ce qui est sûr, c’est qu’ils maîtrisent à merveille le conflit amené par le genre – entre fun et mélancolie – depuis leur premier EP Sweet FA. Le single du même nom nous avait d’ailleurs ébloui·es par son solo. Les premières bribes de leur son se confirment avec leur album Being So Normal en 2018. Ils ont trouvé leur créneau, et ça fonctionne parfaitement. Mention spéciale pour Alrighty Aphrodite qui marque tous les esprits avec un punch bien dosé et un solo percutant. Au niveau visuel, on est toujours dans les codes de l’indie : des couleurs qui détonnent, un look de skater BCBG et beaucoup d’autodérision. Petit plus pour ce nouvel album, une animation différente a été créée par Gaya Kesten pour chaque titre, le tout disponible sur YouTube.

Cet album-ci se placerait-il plus sous le signe de la sérénité ? Il est clair que le groupe sait quand se taire. Si certains morceaux se partagent les riffs catchy, le sentiment général qui se dégage de You and Your Friends est un sentiment de calme souligné par une discrète provocation. Même sur Feelin’ Low (F*ckboy Blues), malgré le clip dans une arène de catch, on garde ce sentiment d’intimité. Un sentiment qui pourrait s’effriter éventuellement, mais il n’en est rien. Il n’y a qu’à écouter Black Licorice, et on se réveille dans les bras de Neil Smith qui nous raconte une histoire. Un storytelling maîtrisé sur un fond explosif par moment et une voix presque au ralenti, tout comme le clip. Peu étonnant qu’il ait été influencé par le grand Andy Shauf qui lui a fait découvrir une autre dimension de l’écriture. Black Licorice fait référence à la réglisse qu’on laisse dans le fond du bol de bonbons, tout comme le protagoniste de la chanson – entre second degré et intelligence. On retrouve ce procédé dans Shampoo Bottles, allégorie de la disparition d’un amour fort et de son amertume. Sortir ces trois singles avant l’album était risqué. Mais tout s’agence plutôt bien car il reste quelques pépites à découvrir.

Le morceau You and Your Friends emporte tout sur son passage – rare pour le titre éponyme d’un album puisqu’ils semblent tous souffrir de l’attente trop grande liée à leur place. Le titre fait preuve d’une extrême simplicité, ou plutôt d’une évidence grâce à ce calme dans le chant qui défie même les sons les plus upbeat, une caractéristique du groupe. Sur le refrain de Thursday, guitare saturée et batterie se mélangent pour surprendre. Le groupe souffle sur Your Teeth pour nous offrir ce qu’il fait de mieux, une balade à la prose mélancolique. « For holding her to he. As she grabbed a kiss so tenderly ». Encore un titre qui a l’air un peu anodin à travers son titre comme ses copains Black Licorice et Shampoo Bottles, mais qui en cache bien plus.

Le titre peut-être le plus faible (parce que oui, il en faut bien), c’est Camila, I’m at Home. Un peu à la façon de Chagu’s Sideturn issu de Being So Normal. Un son en milieu d’album qui reste mignon mais sans plus, et donne plus de puissance aux autres titres. Dans ce cas-ci, c’est Second Life with Emily qui prend de la force pour un titre assez diligent qui tombe à pique, nous invitant à « perdre un peu de temps » avec eux (toujours avec plaisir). Figure 8 et Brian’s Movie nous apportent un peu de douceur sur plus ou moins le même tempo, plus la guitare mélancolique et les riffs entêtants. C’est sur ce genre de sons qu’on peut observer la voix de Neil devenir presque fainéante pour se confondre avec la guitare. Parfois c’est réussi, et parfois ça nous empêche de garder la mélodie en tête. Puppy Grin est tout de même là pour rappeler la hargne du groupe et les solos de Chris dont on se languit à chaque fois. Tantôt sur une agressivité retenue, tantôt sur une fainéantise charmante, Peach Pit arrive à nous plonger dans son univers authentique et décalé. Facilement et avec beaucoup de second degré.

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