Petit Prince, de l’ombre à la lumière
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Auteur·ice : Paul Mougeot
16/02/2019

Petit Prince, de l’ombre à la lumière

Petit Prince est de ces artistes qu’on voit peu mais dont on ressent toute l’influence. Homme de l’ombre du génial label Pain Surprises, c’est pourtant lui qu’on retrouve cette fois sous le feu des projecteurs avec Je vous embrasse, un joli disque pop et poétique aux accents psychédéliques. On a rencontré Petit Prince dans son studio tout neuf du XVIIIe arrondissement pour un entretien à retrouver sur La Vague Parallèle.

La Vague Parallèle : Hello ! Tu as sorti ton deuxième disque, Je vous embrasse, il y a quelques jours. Comment s’est passée cette sortie ?

Petit Prince : Très bien ! J’ai eu de très bons retours de la part des médias et j’ai également reçu beaucoup de messages vraiment positifs de la part des gens sur les réseaux sociaux.

Ce n’est pas un buzz incroyable non plus mais j’ai l’impression que ma musique plaît vraiment. Comme c’est une musique qui est très intime, elle touche sans doute moins de monde, mais elle touche plus profondément.

LVP : On te présente souvent comme l’homme de l’ombre de Pain Surprises, celui qui garantit la cohérence artistique des projets et l’identité musicale du label mais cette fois, tu te retrouves sur le devant de la scène. Comment est-ce que tu jongles entre ces différents rôles ?

PP : Au début, c’était assez difficile parce que c’est compliqué d’alterner entre la casquette d’artiste, celle de producteur et celle d’ingénieur du son. Chaque projet demande un temps fou et une réflexion intense, on ne voit pas forcément tout le travail qui se cache derrière.

C’était essentiel de nous organiser et de bien séparer ces différents rôles. Du lundi au mercredi, je travaille sur le label : j’ai mixé le prochain EP d’UTO, avec lesquels j’ai collaboré pour mon morceau Un écho dans le vent, je commence à travailler sur l’album de Basile Di Manski et je fais vivre notre nouveau studio. Le reste de la semaine, je travaille sur ma musique.

LVP : Ce nouvel album, tu l’as terminé il y a un an. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de le révéler ?

PP : Lorsque j’ai sorti mon premier disque, j’ai tout fait à la va-vite, c’est-à-dire qu’on l’a uploadé très rapidement sur les plateformes de streaming et qu’on a construit le reste ensuite. Mon live, je l’ai préparé en quelques jours et je suis monté sur scène sans doute un peu trop vite.

Cette fois, j’avais besoin de prendre mon temps pour réfléchir à l’image de ma musique. Par exemple, j’ai pris le temps de partager au fur et à mesure toutes les photos que j’avais prises en voyage pour nourrir cette ambiance de vacances qui colle à ma musique.

LVP : Quel regard portes-tu sur ce disque un an après ? Est-ce qu’avec le recul, tu vois des choses à modifier ?

PP : Oui, bien sûr ! Forcément, quand je réécoute mon disque, il y a des parties dont je me dis que je pourrais les améliorer. J’y pensais ce matin, je voulais envoyer un message à Jacques parce qu’il a tendance à déconstruire en permanence ses chansons, à les décomposer et à les recomposer, mais à ce rythme, on peut vite tomber dans un processus infini !

Le disque est comme ça, je l’accepte et ça me donne surtout envie de recommencer à créer, de travailler sur un album. J’ai envie de couper mon portable et de m’enfermer dans mon studio, d’y faire venir des gens et de me remettre à jouer. Il y a eu une très grande évolution entre Deux mille dix, mon premier EP, et ce disque. Je pense que l’album sera plutôt dans la veine de ce nouveau disque parce que j’ai adoré travaillé de cette manière, réfléchir à de nouvelles techniques d’enregistrement, de production, et je vais continuer dans cette voie.

LVP : Est-ce que tu peux nous parler de la manière dont tu as composé et enregistré ce disque ?

PP : Je l’ai composé très vite, en deux semaines. Je l’ai enregistré dans mon ancien studio à Ivry, qui était un peu plus grand mais un peu moins pro.

En fait, ça s’est fait de manière très ludique. Tout le monde y laissait traîner son matériel, Pablo Padovani de Moodoïd par exemple, alors je prenais tous les instruments qui passaient et je faisais des essais avec. Je fouillais dans tous les instruments que je ne connaissais pas. J’ai aussi travaillé avec des potes à qui je demandais de venir dans le studio, je leur montrais ce que j’avais fait et je leur demandais s’ils avaient envie d’y ajouter quelque chose. Les moments que j’aimais, je les enregistrais : je faisais du sample en direct, en quelque sorte.

LVP : En l’écoutant et en me plongeant dans ses titres et ses textes, j’ai eu l’impression que cet album était une sorte de carte postale musicale. Est-ce que c’est comme ça que tu l’as pensé ?

PP : C’est exactement ça ! Je l’ai composé en septembre 2017 et je l’ai imaginé comme un souvenir de vacances d’été après une relation amoureuse très intense qui s’était terminée quelques temps auparavant.

LVP : Ta musique a énormément évolué entre ton premier EP, qui avait un côté atmosphérique et expérimental, et ce nouveau disque, qui est beaucoup plus pop. Qu’est-ce qui a changé dans ta manière de faire de la musique ?

PP : Ce côté pop, plus organique, vient vraiment de mon histoire, en fait. Quand j’étais ado, j’étais fan de rock. J’ai fait le conservatoire, je jouais du violoncelle mais j’ai aussi beaucoup appris en jouant de la guitare avec des amis dans une cave, à Strasbourg. On faisait beaucoup de jams et c’est là que j’ai appris à jouer du synthé, de la basse…

J’ai publié mon premier EP quand j’habitais à Paris dans un 10m2, je l’ai fait avec un ordinateur et une carte son pourrie. Par la suite, j’ai fait une école qui m’a formé aux métiers du son, j’ai rencontré des artistes, j’ai eu plus de place, plus de matériel. Si j’avais eu tout ça pour mon premier EP, le résultat aurait sans doute été différent. En tout cas, je suis beaucoup plus en phase avec ce que je fais maintenant qu’avec mon premier EP, qui était vraiment une photographie d’un instant particulier.

LVP : Par certains aspects, je trouve que ta musique rappelle celle de petit fantôme, dans cette forme de pop poétique pure et naïve. Comment est-ce que tu te situes dans cette grande famille de la pop française ?

PP : Ma grande référence, c’est Flavien Berger, ses textes sont magnifiques. J’aimerais faire quelque chose dans ce registre, peut-être un peu plus brut parce que Flavien est dans une forme de poésie que je ne pense pas pouvoir écrire.

Avec cet album, j’ai compris que les textes étaient très importants dans la musique. J’aime la chanson française parce qu’elle raconte des histoires, parce que tu peux t’y identifier. Les textes de Brel, de Balavoine, de Ferrer, c’est de la poésie. Je voulais arrêter de chanter en anglais et de me cacher, alors je me suis mis à écrire en français.

LVP : Tu joueras Je vous embrasse pour la première fois le 27 mars prochain au Pop-Up du Label. Comment est-ce que tu vas faire vivre ce disque sur scène ?

PP : Je prépare mon live depuis deux ou trois mois. On sera trois sur scène : Émile, de UTO, qui aura deux synthés et un pédalier, un batteur et puis moi, à la guitare et au chant.

L’idée c’est que je puisse vraiment m’exprimer. Pour mon premier live, j’étais entouré de machines avec un set-up très compliqué, c’était assez angoissant. Pour ce live, je voulais réussir à briser la distance avec la public en ne me cachant pas derrière des machines.

LVP : Pour terminer, quels sont tes coups de coeur musicaux du moment ?

PP : Je ne suis vraiment pas un digger de nouveautés… En ce moment, il y a un morceau qui m’émeut beaucoup, c’est Are You With Me Now ? de Cate Le Bon. C’est ma musique du moment.

Sinon, je redécouvre aussi l’album Electric Warrior de T. Rex.

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