Poupie : “L’authenticité, ça me gagne à tous les coups”
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Auteur·ice : Flavio Sillitti
04/01/2020

Poupie : “L’authenticité, ça me gagne à tous les coups”

Les rues de Bruxelles sont grises et pluvieuses en cette matinée de décembre, mais voilà qu’un rayon de soleil va venir égailler notre journée. Cet éclat, c’est Poupie. Si son nom vous est familier, c’est que la jeune Lyonnaise en a fait du chemin avant de venir discuter avec nous. Forte de sa participation à deux télé-crochets en France et en Espagne, c’est avec des bagages solides que, du haut de ses 21 printemps, Poupie s’apprête à réchauffer la chanson française. Avec un premier tube Ne m’invite pas, la chanteuse nous a déjà conquis et nous invite ici à découvrir ses inspirations, ses envies et ses projets. Entre rires et câlins, la solaire Poupie ne nous a pas laissé indifférents et on en ressort même avec quelques coups de soleil. Retour sur une rencontre colorée avec notre nouvelle meilleure amie. 

La Vague Parallèle : Hello Poupie, bienvenue en Belgique ! Poupie, c’est quoi ? 

Poupie : C’est une petite boule d’énergie un peu insolite qui a des subtilités autant dans l’extraversion que dans l’introversion. Poupie c’est très authentique, très sincère et ça bouge beaucoup. Et musicalement, je dirai que c’est différent. Poupie, c’est moi.

La Vague Parallèle : Tu le dis toi-même : ta musique est différente. On décèle un mélange de chanson fançaise, de reggae jamaïcain ainsi qu’un brin de pop excentrique à l’américaine. Est-ce complexe d’articuler ensemble toutes ces influences ?

Poupie : C’est très naturel voire instinctif. Ces genres que tu évoques, ce sont ceux qui m’ont bercé. Du coup, au moment où je me suis demandé quel style de musique je voulais proposer, je me suis rendue compte que je le savais déjà quelque part. Du coup, en rentrant au studio, j’ai eu une sorte de déclic et j’ai naturellement sorti un univers que j’avais déjà en moi de façon inconsciente. Et il y a beaucoup de choses à propos de moi qui suivent cette idée là : je peux avoir beaucoup de ressources sans forcément le savoir et, à un moment donné, tout va sortir naturellement. Mais d’un côté, c’est cool !

La Vague Parallèle : C’est l’Instint Animal, en fait.

Poupie : Exactement ! (rires)

La Vague Parallèle : Tu as atteint la demi-finale de X-Factor en Espagne et tu as participé à l’émission The Voice en France. Qu’est ce que ces différentes expériences t’ont apporté au niveau artistique ? 

Poupie : Artistiquement parlant, c’est difficile à dire. C’était deux expériences totalement différentes mais je crois qu’elle se retrouvent dans le rapport aux autres. Que ce soit avec les autres candidats ou les personnes qui nous ont accompagné et coaché, on a tous appris l’un de l’autre et c’était très enrichissant. Aussi, j’ai appris à gérer l’“humaine-artiste” en quelque sorte. Trouver ma place dans une communauté artistique, écouter l’autre et trouver des compromis pour réussir à mêler mon univers artistique à celui de quelqu’un d’autre. Mais en soi, je ne pense pas que j’aie appris quoique ce soit de révolutionnaire au niveau artistique car ce sont des choses que j’avais déjà en moi.

La Vague Parallèle : Sur ton audition de The Voice, tu te lançais le pari fou de revisiter un tube anglophone en version hispanique et on retrouve l’espagnol sur ton EP éponyme sorti en novembre dernier. Penses-tu que le boom international de la musique hispanique avec des artistes telles que Rosalìa ou encore Kali Uchis t’a aidée à assumer cette facette de ta musique ?

Poupie : Je ne pense pas forcément que cette nouvelle vague d’artistes hispaniques justifie la présence de l’espagnol dans mes morceaux. Vers 2016, j’ai découvert le reggaeton. Parallèlement ont eu lieu mes premiers contact avec la langue espagnole grâce à des amis hispanophones que j’ai rencontré lors d’un voyage en Angleterre après mes études. Du coup, je suis tout simplement tombée amoureuse de cette culture et de ces gens et j’imagine que c’est surtout ces éléments là qui m’ont poussée tout d’abord à apprendre la langue en 2017 et ensuite à l’infuser dans ma musique. Mais les deux artistes que tu cites et que j’adore d’ailleurs, je les écoutais déjà bien avant qu’elles n’explosent. Ce sont des artistes qui m’inspirent.

La Vague Parallèle : Elles t’inspirent dans quel sens ? 

Poupie : Dans le cas de Rosalìa, par exemple, je trouve que c’est quelqu’un de très authentique. Dans le monde de la musique actuellement, beaucoup d’artistes se bornent à croire qu’ils sont supposés agir d’une certaine manière pour être appréciés. Les pauvres, d’ailleurs ! Heureusement, des artistes comme Rosalìa et comme plein d’autres artistes également, font preuve d’une vraie sincérité et démontrent la bonne démarche : les gens peuvent t’aimer pour ce que tu es, sans artifices quelconques. Ce qu’il y a de plus avec elle, c’est qu’elle ramène sa culture très profonde sur le devant de la scène tout en l’adaptant à notre ère, au goût du jour. C’est un exercice qui me paraît très difficile et quand je la regarde, j’ai l’impression que c’est très instinctif pour elle et ça fait tellement plaisir ce genre d’artiste.

La Vague Parallèle : Au delà du point de vue linguistique, qu’est ce que ça t’apporte d’écrire en espagnol par rapport à ton écriture en français ? 

Poupie : En réalité, j’imagine que la question devrait être posée à l’envers. Parce que l’écriture en français c’est tout récent pour moi, j’ai commencé début 2019. Alors que depuis que j’ai 8 ans, j’écris mes chansons en anglais et depuis 2017 en espagnol. Du coup, la vraie question ce serait plutôt “qu’est ce que la langue française m’a amené ?”. Et la réponse est plutôt abstraite. Tout ce que je sais, c’est que quand j’ai commencé à l’utiliser pour écrire, je ne voulais pas abandonner cette petite partie exotique apportée par l’espagnol. Et j’assume totalement que cette partie hispanique ne soit pas justifiée : je ne suis pas espagnole, mais j’ai besoin de l’utiliser. Du coup, j’imagine que la seule façon d’expliquer la présence des différentes langues dans ma musique, c’est par ce besoin d’exprimer toute ma personnalité et ça passe par ce genre de choses.

La Vague Parallèle : Ton EP Poupie sortait en novembre dernier. Des 6 titres qui le composent, lequel est le plus important pour toi ? 

Poupie : C’est très compliqué cette question car chaque titre à sa propre histoire et sa propre importance. Mais je dirai que le premier titre duquel je suis tombée amoureuse, c’était Ne m’invite pas. Pour la petite histoire, je n’avais pas l’habitude d’écrire mes textes en français et la plupart du temps je me remettais sans cesse en question par rapport à ce que j’écrivais en me demandant si c’était bien ou non. Et pour ce morceau là, c’est le premier texte pour lequel je me suis dit qu’il n’était pas particulièrement bien écrit mais que le message transmis était intéressant et me ressemblait beaucoup. Cette chanson est très importante aussi car je pense qu’elle peut avoir un pouvoir sur d’autres gens. Ce malaise qui est reflété dans ces lignes, c’est quelque chose de très propre à l’humain, le titre aborde des sentiments universels aux travers desquels les gens peuvent se retrouver et je trouvais ça très intéressant.

La Vague Parallèle : Quel est le message global de ce premier EP ?

Poupie : Malheureusement, ce serait très égocentrique mais ce serait voici ce que je suis(rires) Pour ce premier EP ainsi que sur l’album à venir, je me suis focalisée sur moi car je découvre ce que c’est que de pouvoir m’exprimer dans ma langue natale pour mettre des mots sur ce que je ressens et ce que je suis.

La Vague Parallèle : Sur The Voice, tu as prouvé ta capacité à nous donner les poils, notamment avec une reprise du morceau Always Remember Us This Way. Sur l’EP on ne retrouve pas forcément une mélancolie comme celle là, doit-on s’attendre à retrouver des balades sur l’album ?

Poupie : Sur l’album, il y aura des balades. Mais, je préfère le dire, pour l’instant ce ne sera jamais aussi “fort” que ce que j’ai pu faire en anglais au piano par le passé. C’est à dire que je tiens vraiment à favoriser le français sur l’album, c’est un peu mon nouveau petit joujou. Et, en écrivant en français, j’ai tendance à laisser plus de place aux mots et au sens de mon propos. Le petit bémol c’est que, du coup, la mélodie est moins mise en valeur, d’une certaine manière. Cela n’empêche pas que l’émotion s’y retrouve car elle passe aussi par le sens des textes, mais elle sera différente de celle de la cover dont tu parles dans ta question. Sur le live, par contre, vous pourrez exactement retrouver ces émotions fortes. Et je ne dis pas ça pour vendre mes lives, hein ! (rires) C’est juste que ces balades sentimentales, c’est une partie de moi que j’aime et je ne peux pas m’exprimer sur scène sans passer par ça. La pop anglophone, c’est celle avec laquelle j’ai grandi et qui m’a énormément inspirée avec Taylor Swift ou Adèle quand j’étais jeune. J’ai besoin de ce répertoire pour m’exprimer artistiquement et c’est pour ça qu’une reprise de ce style là se retrouve dans mon set. Mais sur l’album, ce sera différent.

La Vague Parallèle : Dernièrement, sur l’un de tes posts Instagram, tu as partagé avec beaucoup d’humour ton projet d’interview Poupie dans lequel tu te posais toi-même les questions que l’on ne te posait pas. S’il y avait une question que tu rêverais que l’on te pose, ce serait laquelle ? 

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Poupie : Ah, maintenant que j’y suis confrontée, c’est pas facile ! L’idée derrière tout ça, c’est que j’aimerai beaucoup m’exprimer sur des sujets qui pourraient aider à faire avancer les choses. Je ne fais pas seulement de la musique pour présenter qui je suis. J’ai aussi cette impression d’avoir un message à faire passer, qui dépasse le simple stade de ma musique. Avec cette vidéo, je voulais vraiment porter mon discours. Bon, c’est un peu tombé à l’eau (rires) mais l’idée derrière tout ça c’est que j’ai envie d’utiliser ma voix pour des choses plus profondes, d’être une porte-parole pour une certaine catégorie de personnes et de véhiculer des idées nouvelles sur à peu prêt tout, surtout certains sujets qui me tiennent à coeur comme la santé mentale dont il est beaucoup question ces derniers temps. Forcément, on ne peut pas encore se permettre de me questionner sur mes engagements et sur ce genre de questions plus profondes parce que, comme je n’en suis qu’à mes débuts, on s’intéresse surtout aux choses primaires : d’où je viens, ce que j’ai fais, ce que je vais faire, etc. Et c’est normal, je n’en veux à personne. Mais je suis une grande impatiente, et plutôt que d’attendre qu’on commence à me poser toutes ces questions, je me suis dit que j’allais me les poser moi-même. Voilà comment est né ce petit concept, mais en filmant la vidéo je me suis dit : “Non mais t’es vraiment mégalomane meuf, qui fait ça ?” (rires)

La Vague Parallèle : Une autre publication de ton Instagram qui nous a fait sourire, c’est cette photo. Qu’est ce qu’elle représente pour toi ? 

Poupie : Un peu toute ma vie. C’est incroyable parce qu’avant de la poster, je me disais que cette photo représentait presque un risque parce que je savais ce qui se cachait derrière ces choix, alors que pour les gens c’est juste une simple image sortie de son contexte. Elle symbolise ce côté que j’ai à ne jamais perdre de temps, cette mentalité de “voilà ma situation, je suis bloquée, qu’est ce que je fais ?” Ça fait aussi écho à mon côté très business : j’ai fait des études de management avant la musique et je pense que ça me forge beaucoup. Finalement, la photo représente mon côté terre-à-terre malgré le fait que je sois assez perchée. (rires) C’est à dire que malgré ma créativité qui vole assez loin, j’ai aussi une part de ma personnalité beaucoup plus posée et réfléchie.

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La Vague Parallèle : Tu disais début 2019 qu’il fallait être timbré pour bosser et s’entendre avec toi. C’est toujours le cas ? 

Poupie : Maintenant que j’ai travaillé avec pas mal de gens du monde de la musique, je me rend compte que je suis beaucoup plus adaptable que ce que je ne le pensais. Je pense juste qu’il faut avoir une certaine profondeur d’esprit pour comprendre ce que je suis sans se braquer ou se vexer, parce que je peux avoir ce côté très brute de décoffrage. C’est vrai qu’il faut parfois être vif pour passer du temps avec moi, au risque d’être perdu. Alors que dans le fond, mes intentions sont hyper bonnes et c’est hyper cool quand les gens restent parce qu’ils l’ont compris. Dans ce métier, j’ai remarqué qu’il n’y avait que très peu de gens qui réagissaient mal face aux différentes personnalités des autres, et j’en suis hyper contente. Avant d’arriver dans l’industrie musicale, j’avais certaines craintes car j’avais toujours ressenti un certain décalage par rapport aux autres qui étaient plus “calibrés” que moi je dirai, ou parfois l’inverse ! Mais dans le monde de la musique dans lequel je m’épanouis actuellement, je me rend compte que tout le monde est un peu comme moi et c’est très agréable.

La Vague Parallèle : Tu fais donc tes premiers pas dans cette industrie musicale qui semble t’accueillir positivement. Est-ce que tu t’y sens à ta place ? 

Poupie : Tout à fait ! J’ai vraiment l’impression d’avoir trouvé ma voie, d’avoir réalisé que c’était là que je devais être. Je me sens profondément à ma place et ce que j’adore surtout, c’est ressentir les artistes qui m’entourent et qui, eux aussi, se sentent à leur place. C’est le genre de choses qui m’inspire énormément, ça m’élève vers cette idée de destin. Parfois, j’ai du mal à mettre des mots sur ce que je ressens, la musique ça me dépasse. Mais oui, je me sens vraiment bien.

La Vague Parallèle : Un seul EP au compteur et te voilà déjà sur les routes de France et de Belgique pour une petite tournée qui t’emmènera cet été sur la scène du Musilac, auquel tu viens d’être annoncée. Comment vis-tu tout ça : stress ou excitation ?

Poupie : Je dirai plutôt de l’excitation jusqu’au dernier moment et puis l’instant avant de monter sur scène j’imagine que ce sera le plus gros stress qui existe au monde, presque de la panique. (rires) En vrai, en plus d’être excitée je suis agréablement surprise parce que ça ne fait pas longtemps que je suis dans le milieu et les gens réagissent super bien. En général, quand je fais quelque chose, je ne m’attends à rien. Et c’est cool parce que, du coup, quand on me donne en retour c’est tout de suite incroyable pour moi, un vrai cadeau !

La Vague Parallèle : Poupie sur scène, il faut s’attendre à quoi ?

Poupie : De l’énergie positive et authentique.

La Vague Parallèle : Tu pourrais nous décrire typiquement le genre de soirées où il faut pas t’inviter ?

Poupie : Les soirées un peu superficielles. C’est à dire qu’on est tous là, tous invités, mais personne ne se connait, on n’est pas forcément des proches donc on fait un peu semblant. C’est pas incroyable ces soirées là. Après, ce qui est cool, c’est que parfois on est un peu obligés d’aller à ce genre de soirées pour le boulot, par exemple. J’ai pu l’expérimenter parce que ça fait pas si longtemps que j’ai appris le concept de la contrainte. (rires) Du coup, j’y vais et ce que j’adore faire, c’est rentrer dans un personnage. J’adore me déguiser, et pas seulement en vêtements mais aussi en termes de personnalités ! Ça me permet d’éviter les mal-êtres, de me protéger et, au final, ça se passe hyper bien ! C’est dingue mais en me mettant dans la tête de quelqu’un qui n’existe pas, j’arrive à m’ouvrir à des gens ou des choses vers lesquelles je ne serai pas forcément allée si j’étais restée “moi-même”. Bon, faut faire gaffe à pas vriller dans la schizophrénie mais sinon c’est assez sympa comme astuce.

La Vague Parallèle : On essaiera ! 

La Vague Parallèle : Un coup de coeur musical à nous partager ?

Poupie : J’ai découvert il y a quelques semaines une artiste qui s’appelle King Princess. Elle vient juste d’avoir 21 ans et elle est juste incroyable. L’authenticité, ça me gagne à tous les coups ! C’est une pépite et elle m’a directement donné envie de la suivre. C’est un peu le bébé Gaga de notre ère, je pense, et c’est vraiment beau.

La Vague Parallèle : Si tu devais décrire ta musique en un seul plat, ce serait lequel ? 

Poupie : Habituellement, je n’aime pas forcément ce qui est épicé. Mais ici, je vais être forcée de choisir quelque chose de relevé. Peut-être le chili con carne. Déjà parce que dans ce plat, les différents éléments fonctionnent ensemble. Le boeuf tout seul, c’est juste du boeuf. La sauce toute seule, c’est de la sauce. Pareil pour les haricots rouges et le riz. Alors qu’ensemble, c’est un tout. Cette idée d’unité c’est important. Vient alors le côté épicé : quand on reçoit ma musique et mes textes, il y a toujours un petit truc soit qui fait mal soit fait penser. Et puis en plus, chili con carne ça sonne espagnol !

La Vague Parallèle : Qu’est ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ? 

Poupie : D’être heureuse ! (rires) Mais vu que vous êtes là pour la musique, je dirai de m’épanouir dans le milieu artistique.


  • 13 & 27 Janvier : Popup! (Paris)
  • 03 Mars : Botanique (Bruxelles – BE)
  • 11 Juillet : Musilac (Aix-Les-Bains)
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