Relax, le nouveau bijou tout de perles vêtu signé Le Noiseur
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Auteur·ice : Joséphine Petit
16/11/2021

Relax, le nouveau bijou tout de perles vêtu signé Le Noiseur

Il y a bientôt deux ans, Le Noiseur se présentait à nous à travers Musique de chambre, un premier EP mélancolique et élégant qui avait su retenir notre attention. Ce mois de novembre le voit revenir avec un long format, en version enrichie de son premier disque. Relax se révèle comme un génial puzzle sophistiqué et cohérent qui navigue entre douceur et fraicheur, oscillant de titres au spleen bouleversant comme Aston morphine ou Jimi Hendrix, à des trésors plus chatoyants comme Musique de stade, Stone de toi, Week-end à Rome 2.0, ou encore l’étonnant mais addictif Douce France

Programmé sans surprise le mois dernier au MaMA Festival parmi les noms les plus en vogue des musiques actuelles en France, Le Noiseur y a délivré un concert riche en nouvelles pépites et à l’humour tendre. Quelques heures avant, nous l’avons invité à se confier sur l’écriture de son album, ses inspirations et son approche de la scène.

La Vague Parallèle : Salut Le Noiseur, comment tu vas aujourd’hui ? 

Le Noiseur : Très bien, c’est la reprise des concerts, de la vie. Aujourd’hui, c’est mon premier vrai concert avec du public depuis un an et demi, j’ai hâte ! Tout va bien, l’album sort bientôt, je suis très content.

LVP : Justement, on se retrouve quelques semaines avant la sortie de cet album. Comment tu te sens à l’idée de le révéler au grand jour ?

Le Noiseur : J’ai vraiment hâte. On a déjà sorti quelques titres qui sont sur l’album, et je suis très à l’aise avec ce disque. J’ai un peu le sentiment que c’est mon deuxième déjà, et de m’être trouvé avec cet album, ce qui n’était pas tout à fait le cas avec le premier. J’aime beaucoup ces chansons, je trouve que c’est un disque qui me ressemble, et je suis content d’aller le défendre sur scène.

LVP : C’est un disque qui a été conçu pendant une période un peu particulière, avec la crise sanitaire. Qu’est-ce que ça a pu lui apporter justement ?

Le Noiseur : La majorité des morceaux ont été écrits après le premier confinement. Ça a forcément eu un impact, ou plutôt une certaine volonté de se faire plaisir avec la musique, d’être généreux et de penser à la scène aussi.

© Alice Sevilla

 

LVP : On retrouve aussi dans ton nouvel album presque tous les morceaux de ton premier EP, Musique de Chambre, sorti en janvier 2020. Est-ce que tu considères et incarnes ces morceaux différemment aujourd’hui ?

Le Noiseur : Je les ai un peu joués sur scène après la sortie de l’EP, mais avec le confinement ensuite, ça a été très bref. Je suis content de pouvoir les retrouver aujourd’hui et de les jouer. Ils font partie de l’album, qui raconte une histoire qui s’est poursuivie avec les nouveaux morceaux. Ils s’y intègrent parfaitement.

LVP : Est ce que tu peux nous parler justement de la conception de l’album ? Qu’est-ce que tu as voulu transmettre ?

Le Noiseur : En réalité, cet album est un peu là en réaction au premier. J’avais ce sentiment d’inachevé avec le premier, comme si j’avais exploré une partie de ma personnalité et de ce que j’avais envie de dire, mais pas l’autre moi. Avec le premier disque, j’avais vraiment exprimé le versant mélancolique, c’étaient des chansons d’amour triste. Puis souvent, comme tous les grands mélancoliques, j’ai aussi ce versant un peu plus second degré, qui était déjà là, mais pour lequel je n’avais pas encore assez confiance en moi. Aujourd’hui, j’ai réussi à me le permettre, et j’en suis heureux. J’ai pu garder ce côté un peu romantique et parfois premier degré de chanson sensible qu’il y avait sur le premier disque, avec à côté des titres un peu plus second degré, qui sont plus faits pour danser sur scène. Ça me semble enfin ressembler à ce que j’avais envie d’exprimer.

LVP : D’ailleurs, le seul titre de ton EP qui n’apparaît pas sur l’album, c’est Musique de chambre, remplacé ici par Musique de stade, qui lui ressemble tout en passant du parlé au chanté avec un arrangement plus léger. Ça signifie quoi pour toi, ce changement ? Dans le morceau, tu dis justement “je monte en grade”

Le Noiseur : Évidemment, c’est un clin d’œil au morceau Musique de chambre qui était dans l’EP. C’était un état des lieux de ma situation à la fin du premier disque, dans lequel j’assumais mon ambition, j’assumais de dire que j’avais envie de réussir. Quand on est artiste, on court tous un peu après ça, mais ça m’avait fait du bien de le verbaliser à l’époque. Et Musique de stade en est l’évolution, où je sors de ma chambre pour aller vers les autres et remplir des stades (rires).

LVP : Comme entre ces deux titres, tu navigues tout au long de l’album entre le parlé et le chanté. Est-ce qu’il y a un registre dans lequel tu te sens plus à l’aise ? Comment tu trouves l’équilibre entre les deux ?

Le Noiseur : C’est plutôt que l’on n’exprime pas la même chose quand on parle et quand on chante. Les chansons parlées résonnent aussi chez moins de gens, je m’en méfie un peu parfois. Mais ça me vient plutôt naturellement, je ne me pose pas tellement la question. J’aime bien mélanger les deux. Par exemple, dans Dépression nord, qui est globalement parlée, ça chante un peu à un moment. J’aime bien passer de l’un à l’autre car ça surprend. Pouvoir faire ça, c’est aussi être libre.

© Alice Sevilla

 

LVP : Ton écriture est également souvent saupoudrée de second degré. Ça te parle de pouvoir alléger des textes plutôt profonds de cette manière ? Je pense à Dépression nord où l’on peut entendre parler de spaghettis à côté de désespoir.

Le Noiseur : Avec mon premier disque qui était très premier degré, je me suis rendu compte que c’est difficile de faire une bonne chanson tout en premier degré. Le second degré permet de prendre un peu de distance. Puis, il amène aussi plusieurs niveaux de lecture dans une chanson. Ça donne d’autant plus de force à la gravité qu’on exprime à travers.

LVP : Dans le même esprit, un titre comme Douce France est plutôt revendicateur alors que sa composition influencée d’eurodance orientale le rend léger. À tes yeux, le contraste, c’est un outil intéressant ? 

Le Noiseur : Oui. À la création d’une chanson, il y a le texte d’une part, la musique d’autre part, puis l’interprétation ensuite. C’est drôle de jouer avec ça, d’avoir quelque chose de très accrocheur comme Douce France, où j’avais envie de faire le morceau le plus commercial possible, un peu comme un truc qu’on entend dans les fêtes foraines, ou même un truc de tuning (rires), puis raconter autre chose dessus. Je voulais qu’on puisse s’y pencher, écouter et lire entre les lignes que ça raconte vraiment quelque chose. Dans le même sens, Relax est une chanson d’apparence très légère et pop, mais qui parle en fait d’un sujet un peu grave. J’aime de plus en plus aller vers tout ça, avoir une écriture avec des contrepoints dans mes chansons.

 

LVP : Dans Relax, le titre éponyme de ton album, ainsi que dans son clip, tu abordes le regard qu’on peut avoir sur les années d’adolescence lorsqu’on vieillit, tandis que dans Jimi Hendrix tu parles aussi de la peur de mourir. Le temps qui passe, c’est quelque chose qui t’inspire ?

Le Noiseur : Oui, j’ai toujours eu ça. Je me rends compte que depuis très jeune, j’ai toujours eu une sorte de mélancolie. Même à l’école primaire, je me souviens de sentir le temps qui passe, et de ressentir une certaine tristesse par rapport à ça. Puis j’ai aussi perdu ma mère pendant l’écriture de l’album. Il y a une chanson qui en parle. C’était la première fois que j’étais confronté d’aussi près à la mort, j’ai vu la mort, et ça a changé mon rapport au temps. J’ai toujours pris mon temps dans ma vie, là j’en suis à mon deuxième disque, et ça m’a fait réaliser que le temps passe et que j’allais devoir être plus actif pour en profiter au maximum.

LVP : On sent que le monde connecté d’aujourd’hui a pu te marquer aussi, en particulier dans les rapports aux smartphones, réseaux sociaux et autres applications de rencontres. Je pense notamment au titre Week-end à Rome 2.0 et son clip, ainsi que celui de Stone de toi. Raconter ces nouvelles relations sociales en musique, c’est une manière pour toi d’en rendre compte dans notre histoire en tant qu’êtres humains ?

Le Noiseur : Oui, Week-end à Rome 2.0 parle du fait qu’aujourd’hui, on est tout le temps avec notre téléphone, c’est omniprésent dans nos vies. Ça les a même complètement bouleversées. Ce morceau met en avant l’absurdité du téléphone. Je pense qu’on en est tous esclaves, c’est un objet tellement génial mais parfois, c’est un peu réac de dire ça, je trouve que c’était peut-être mieux avant, et que la vie avait plus de charme. Quand on sortait, on n’était pas joignables. On pouvait aussi partir, et c’était l’aventure totale. Un tas de choses ont changé depuis. Sur cette chanson, ça m’amusait de pousser le curseur un peu plus loin avec les téléphones.

LVP : Et Etienne Daho, c’est une influence ? 

Le Noiseur : Pas vraiment. Comme Week-end à Rome est une chanson que tout le monde connaît, je trouvais ça marrant de la transposer dans les tons d’aujourd’hui.

 

LVP : Sinon, on te retrouve quelques heures avant ton concert au MaMA Festival. Comment as-tu imaginé porter cet album sur scène ?

Le Noiseur : J’ai une nouvelle formule, comparée aux quelques premières dates que j’avais fait seul. C’était bien, mais maintenant j’ai un musicien qui m’accompagne. Aujourd’hui c’est ma première date avec cette formule. Je sens que ça va être plus agréable et musicalement plus riche. Je vais aussi pas mal prendre la parole entre les chansons. Ça me plaît de surprendre un peu les gens, faire des blagues et les amener quelque part. J’essaie de construire un concert avec des enchaînements de douceur et du spectacle global, quelque chose qui va au-delà du simple concert. C’est ce qui m’intéresse, et c’est la direction que j’ai envie de prendre avec cet album sur scène.

LVP : Qu’est-ce que ça représente pour toi de jouer au MaMA Festival, de figurer parmi les artistes que l’on considère les plus prometteurs du moment ? 

Le Noiseur : Je suis fier d’en faire partie. Puis, c’est aussi jouer à Paris, chez moi. J’habite juste à côté, c’est agréable. Je suis content, je trouve que c’est une belle mise en lumière.

LVP :  Il y a des artistes que tu vas aller voir ?

Le Noiseur : Oui, j’ai très envie d’aller voir Mr Giscard demain, et Naë aussi, qui joue juste avant moi.

Interview réalisée avec Paul Mougeot

© Alice Sevilla

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