Le 15 décembre dernier, nous nous sommes rendu·es à la Gaîté Lyrique pour assister à l’ultime date de la tournée de Prudence, avec qui nous avions eu la chance de nous entretenir au début de l’été. Tandis que cette fin d’année s’annonçait ombragée, l’artiste nous a offert le moment de grâce qu’il nous fallait. Entre ravissements et surprises, le concert fut mémorable et nous laisse un souvenir qui mérite d’être partagé.
Cate Hortl
Pour commencer la soirée, la scène est confiée à Cate Hortl. Si nous la connaissions avec les duos Ambeyance et Oktober Lieber, la musicienne vogue désormais en solitaire et n’a besoin de personne pour emmener le public avec elle. Entre nappes synthétiques, beats incisifs et réminiscence eighties, Cate Hortl crée la surprise et nous livre un live tantôt percussif, tantôt planant, magnifié par des jeux de lumières maîtrisés. Le défi de la première partie est ainsi relevé et nous sommes désormais prêt·es à accueillir Prudence.
Prudence
- © Clara Rouget
- © Clara Rouget
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Tandis que des néons violets tranchent l’obscurité, les premières notes retentissent et prennent possession des lieux. À l’image de l’album, le concert s’ouvre sur le morceau Beginnings. Sous la répétition d’un refrain devenu manifeste et encouragée par les acclamations d’un public déjà conquis, Prudence fait son entrée, rapidement suivie par ses musiciennes Zoé Hochberg et Maud Nadal.

© Clara Rouget
Dès lors, une évidence apparaît : c’est à un véritable spectacle que nous allons assister. Plus que la musique, le concert est travaillé dans tous ses aspects et la partie visuelle est loin d’être négligée. Lors de notre rencontre, Prudence nous avait témoigné son intérêt pour la mode qu’elle confirme ce soir avec un costume noir intégral signé Asquin. Les références qui nous viennent à l’esprit sont multiples, de Blade Runner à Matrix, la chanteuse semble presque sortir d’un film de science-fiction et aborde la scène en super-héroïne. Plus qu’un habit, sa veste semble presque faire partie de la scénographie lorsque les lumières s’y reflètent. Un détail somme toute insignifiant mais qui révèle l’attention portée à la part esthétique. Alors que l’artiste nous avait confié son désir de développer cette partie du live, on constate que son souhait a été réalisé, et ce notamment grâce à Bertille Friderich qui a construit cette scénographie minimaliste et efficace. Sa clé de voûte est sans doute l’installation centrale qui fait tout à tour penser à une roue astrologique, un portail spatio-temporel ou à une amulette magique. Mystique, envoûtant, hors-temps, voilà qui semble parfaitement décrire le moment que nous avons vécu.
Dans ce décor, Prudence et ses musiciennes vont ainsi interpréter l’intégralité de ce premier album qu’elle finit aujourd’hui de défendre. Cette date est l’aboutissement de ce qu’elle nomme la “tournée des miracles”.
Elle ne manquera par ailleurs pas de remercier à plusieurs reprises celles et ceux qui l’ont rendue possible et qui ont fait que dans ce contexte de reprise épidémique, nous puissions nous unir ici.
Pour rendre cette date mémorable, Prudence nous couvrira de surprises. C’est ainsi qu’au milieu du set, elle invite l’artiste Bergmann à la rejoindre sur scène pour une version aux sonorités R’n’B de son morceau Playmate. L’alliance de leurs univers est amplement réussie. Tandis que les chansons s’enchaînent, les moments de grâce se multiplient. À la fin de Pretty, le public sort ainsi de part et d’autre de la salle des briquets et des flashs, donnant corps à un champ luminescent que Prudence prend le temps de contempler. Un peu plus tard, la musicienne nous ravit avec la reprise inattendue de Despair, Hangover & Ecstasy, tube de son ancien groupe The Dø.

© Clara Rouget
Après le dansant Here & Now, la chanteuse revient sur scène pour un rappel piano-voix et interprète Be water, sous le feu d’un projecteur. Ses musiciennes font à leur tour leur entrée pour jouer l’immanquable Good Friends. Avant de commencer à chanter, le mot d’ordre est donné, nous avons “quartier libre”. Qu’à cela ne tienne, sous des lumières arc-en-ciel, la salle de concert se transforme en dancefloor, que certains moments repris de Freed from desire de Gala ne font qu’enflammer. À cet instant, Paris est une fête, que Zoé Hochberg, ordinairement à la batterie, ne manque pas d’immortaliser sur Polaroïd. Si le concert culmine, la ferveur du public appelle un nouveau morceau. C’est alors que les acclamations donnent lieu à ce qui sera sans doute la surprise ultime, un moment de ravissement auquel nous ne nous attendions pas et qui est manifestement improvisé. Prudence revient une dernière fois sur scène en chantant La nuit n’en finit plus de Petula Clark. Seule, avec puis sans micro, elle se livre ainsi au public, dans toute sa sincérité et sa fragilité, face à quoi nous sommes aussi touché·e·s que conquis·es. À cet instant, les étoiles sont alignées et on prie pour que “la nuit n’en finisse plus”. Sans doute, notre vœu a-t-il été exaucé.

Le cœur grenadine et la déclaration facile, je passe mes journées les yeux rivés sur ma platine.