Alors que l’on commence petit à petit à quitter la nôtre, Roméo Elvis continue de teaser sa Maison. Après une promo intelligente et sans filtre gérée de main de maître par le jeune Bruxellois lui-même, le mini-EP que personne n’attendait demeure, plus d’un mois après sa sortie, un incontournable avant-goût de la suite des aventures de Monsieur Strauss. La promotion reprenait d’ailleurs cette semaine, avec un nouveau clip survolté pour notre coup de cœur de l’opus, Défoncé. Au programme : trip hallucinatoire, réveil difficile et placement de produit incognito pour Nike. Sans oublier l’humour grinçant d’un personnage complet, capturé sous l’objectif expert de Romain Habousha. Tu fais tourner ?
Sur ce morceau, Elvis s’amuse à glisser des allégories malicieuses, liant son attachement à la fumette à celui au cyclisme. On retrouve d’ailleurs de façon explicite la figure importante de cette bécane, bolide indispensable du jeune artiste, qui se voit représentée de façon semi-divine au début du clip, baignée d’un faisceau lumineux céleste. Un deux-roues qui représente bien plus qu’un simple moyen de locomotion pour Roméo, véritable symbole d’une passion partagée de père en fils depuis trois générations. Loin de nous l’envie de nous lancer dans une psychologie de comptoir, mais ce Défoncé semble bien plus profond qu’il n’y paraît. Plus qu’une simple ode à l’adulation cannabique du chanteur, le titre se dresse comme une véritable exécution introspective des fluctuations tiraillantes du jeune penseur, bloqué entre défonce et angoisses. L’instru flûtée étourdissante et la structure descendante du refrain l’indiquent aussi : l’intention est de faire ressentir la défonce. Non seulement celle provoquée par la consommation de substances illicites, mais aussi celle que l’on ressent une fois seul·e, soumis·e à ses doutes ou ses inquiétudes.
Pourquoi j’arrive pas à dormir ? J’suis sur le vélo ou l’ordi.
Même quand je rentre dans un rêve, je veux essayer d’en sortir.
Coup de maître, donc, de la part du rappeur, qui parvient subtilement à aborder le sujet délicat qu’est la santé mentale, sous les traits d’un banger efficace et enjoué, porté par des touches d’humour. Un procédé qui ne va pas sans rappeler son brûlant Diable, sur lequel il réglait ses comptes avec ses démons du passé, sur des rythmes dansants et vivaces.
S’il y a un maître-mot qui résume assez bien le projet Maison, c’est “équilibre”. L’artiste semble, en effet, avoir trouvé la parfaite balance entre la spontanéité authentique de ses débuts et l’intellectualisation léchée du personnage façonné sur Chocolat qui fait parler de lui. On retrouve ces mêmes ingrédients dans le visuel, qui s’appuie sur la sobriété d’un décor blanc pour mettre en scène un Roméo Elvis à l’allure tourmentée et… défoncée. Effets stroboscopiques, jeux de lumières rouges fiévreux, mouvements fuyards de caméra : les éléments sont réunis pour transmettre cette idée vertigineuse de défonce. En attendant la suite des festivités, streamons Maison généreusement et restons à l’affût des prochaines sorties du rappeur. Que du bon à l’horizon !
Caméléon musical aux allures de mafieux sicilien.