Rone : « On a vraiment la possibilité de changer les choses »
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Auteur·ice : Guillaume Scheunders
03/05/2020

Rone : « On a vraiment la possibilité de changer les choses »

Avec son cinquième album, Room With A View, Rone nous offre une œuvre planante et engagée. Initialement le fruit d’une collaboration avec le Théâtre du Châtelet, le collectif (La)Horde et le Ballet National de Marseille, le disque prend la forme d’une délicate suggestion de prise de conscience environnementale. Il marque aussi un retour à une musique intégralement instrumentale, contrairement à ses derniers opus. Interview pleine de bonne humeur avec l’un des producteurs les plus talentueux du moment.

La Vague Parallèle : Bonjour Rone ! Alors, comment se passe ton confinement ?

Rone : Ça va, j’ai traversé différentes phases. Ça a commencé un peu comme tout le monde par un choc, je n’étais pas tout à fait préparé à quelque chose de cette ampleur-là. C’est arrivé au moment où j’étais en train de présenter un gros spectacle au Théâtre du Châtelet. J’avais dix représentations avec 18 danseurs, plein de contacts, des portés…Donc la transition a été un peu brutale. Il y avait aussi de la frustration parce que sur les dix représentations, les deux dernières ont dû être annulées. Ça donne la sensation de ne pas être allé au bout de ce spectacle. Et donc ensuite évidemment une grosse redescente après deux semaines très émouvantes, puis quelques jours après je suis tombé malade. Je n’ai pas fait le test pour savoir si c’était le coronavirus mais j’ai fait une téléconsultation avec un docteur qui m’a dit qu’a priori c’était ça puisque j’avais tous les symptômes. C’était assez fulgurant mais c’est parti assez vite. Mais voilà, maintenant je suis en pleine forme, je suis confiné avec ma femme et mes deux enfants, donc je profite d’eux, je profite de la famille.

LVP : C’est une période propice à la production ?

R : Justement, ça me fait rire parce que je vois beaucoup de trucs sur internet genre « le confinement, c’est le moment pour apprendre à jouer d’un instrument, pour lire l’œuvre complète de je-sais-pas-qui, ou regarder telle série ». Moi c’est complètement l’inverse. Mes enfants sont petits, ils ont 4 et 6 ans donc je me retrouve à faire le maître d’école, je m’occupe beaucoup d’eux. Normalement je suis complètement libre, je suis mon propre patron donc je gère mon temps un peu comme je veux. Et là ce sont un peu mes enfants les patrons, donc j’ai un peu du mal (rires). De plus, je n’ai pas récupéré tous mes instruments de musique, ils sont restés au Théâtre du Châtelet. Par contre je peux quand même bricoler des petits trucs avec mon ordinateur, avec Ableton, etc. J’ai pu produire un morceau pour une compilation de musique d’ambient qui s’appelle Music for containment. Tous les dons seront reversés à la Fondation de France, donc je me suis dit que je pouvais faire quelque chose d’utile. Mais en dehors de ça, je suis en créativité 0, je n’arrive pas à faire de sons.

LVP : Dans quel état d’esprit es-tu avec la sortie de ce cinquième album ?

R : Je suis super excité et en même temps c’est très curieux parce que je ne m’attendais pas du tout à sortir l’album dans ce contexte-là. Normalement, une sortie d’album c’est vraiment un moment joyeux, que tu fêtes et que tu enchaînes avec une tournée. J’ai super hâte de le jouer. Là évidemment je sens qu’il va y avoir un gros décalage entre la sortie et la première date, parce qu’on ne sait toujours pas quand les concerts vont pouvoir reprendre. Au départ je pensais faire tout de même quelques festivals d’été, mais a priori c’est mort. Après on s’est dit que la tournée commencerait probablement vers septembre ou octobre, mais maintenant ils commencent à parler d’une reprise des spectacles en automne 2021, donc c’est un peu flippant. Mais je suis super content de partager ma musique, on avait hésité un tout petit peu à décaler la sortie avec mon label. On a vu qu’il y avait plein d’artistes qui préféraient attendre la fin du confinement. Mais je me suis dit que ça n’avait pas trop de sens. L’album est là, il existe, on me le demande pas mal sur les réseaux sociaux donc je me dis que ça ne sert à rien de faire patienter les gens. Au contraire, c’est un moment où beaucoup ont besoin de son, de découvrir des nouvelles choses…

LVP : La tournée se déroulera avec le spectacle, ou bien ce sera un simple live ?

R : C’est marrant parce que c’est un truc un peu schizophrénique, ce qui est prévu c’est d’avoir deux tournées en parallèle. Ça dépend en fait de ce que veulent les lieux et les festivals qui me reçoivent. Parfois ils préfèrent que je sois tout seul, parfois ils ont envie d’avoir les danseurs. Ça dépend aussi de la taille de la scène, il nous faut de la place. J’aime beaucoup l’idée d’avoir la possibilité de partir tout seul avec une valise de matos et deux petits spots, ou au contraire de faire un gros show avec 18 danseurs et toute une scénographie.

LVP : Comment est venue l’idée de la collaboration entre le Théâtre du Châtelet, (La)Horde et le Ballet National de Marseille ?

R : C’est parti d’une invitation du Théâtre du Châtelet, qui m’a contacté à la fin de ma précédente tournée. Ça faisait deux ans que je tournais avec mon dernier album Mirapolis, et j’étais bien chaud pour faire un nouvel album. Et à ce moment-là, le Théâtre du Châtelet m’a proposé de faire l’un des premiers spectacles pour la réouverture du théâtre, puisqu’il était en travaux depuis longtemps. Donc ils m’ont donné carte blanche pour faire une nouvelle création sur deux semaines. C’était un peu nouveau pour moi parce qu’habituellement, quand je joue quelque part c’est juste une fois, comme la plupart des musiciens. Occuper les lieux pendant deux semaines, dix représentations, j’aimais bien l’idée mais j’ai senti comme une espèce de responsabilité. On me donnait les clés d’un gros théâtre, et je ne pouvais pas me contenter de faire un spectacle musical qui fasse danser. J’avais envie que ça ressemble vraiment à un spectacle avec du fond, du sens, faire passer des idées, des messages. Et c’est là que je me suis dit que c’était avec des danseurs qu’il fallait que je bosse. J’avais envie de le faire depuis très longtemps, parce que j’adore la danse. J’ai pensé à (La)Horde, parce que c’était un collectif avec lequel j’étais déjà en contact et que j’aime bien. Il a justement une espèce de dimension politique dans son travail et je me suis dit qu’avec eux, on pourrait exprimer des choses juste à travers la musique et la danse. Et c’est ce qu’on a essayé de faire avec les danseurs du Ballet National de Marseille.

LVP : Pourquoi le Théâtre du Châtelet t’a choisi toi, et pas quelqu’un d’autre ?

R : Je pense qu’ils aimaient mon travail, déjà. Mais c’est vrai que c’est une bonne question, que je me pose un peu moi-même. À chaque fois qu’on m’invite dans un lieu comme ça, je suis hyper flatté, un petit peu surpris. Je trouve ça assez audacieux de leur part, de la même manière qu’en 2017, où c’était la Philharmonie de Paris qui m’avait invité à jouer. Pareil, j’étais un peu surpris parce que j’étais le premier producteur de musique électronique à jouer là-bas, normalement ce sont plutôt des orchestres symphoniques. Je pense qu’ils ont dû recevoir quelques critiques de leurs vieux abonnés, mais ils l’ont fait quand même et ça a ouvert une porte, parce que depuis il y a plusieurs musiciens électroniques qui y ont joué. Et je pense que le Théâtre du Châtelet a vu que ça s’était bien passé pour moi à la Philharmonie. Le concert avait gagné le prix des Indés du meilleur live en 2017 et je pense que ça a peut-être fait réfléchir des grosses institutions, en se disant qu’ils doivent un petit peu faire confiance aux nouvelles musiques.

LVP : La musique « underground » arrive de plus en plus dans les sphères réputées classiques. Comment perçois-tu ça ?

R : Je pense que ça a toujours été. (La)Horde, avec qui j’ai travaillé et qui est un collectif qui a vraiment commencé dans l’underground, se sont fait un peu plus critiquer que moi sur le fait de jouer au Châtelet. Mais ils ont une très bonne réponse là-dessus, ils disent que peu importe l’endroit où tu présentes ton spectacle ou ton art, c’est le message qui est important. Eux, leurs danseurs sont de toutes les couleurs, il y a autant de filles que de garçons… C’est ça qu’il faut regarder, plus que l’endroit où tu joues. Plutôt que de rester enfermé dans l’underground, c’est plus intéressant de s’exprimer dans l’overground, devant un public le plus large possible.

LVP : Comment as-tu appréhendé la combinaison de la danse et de ta musique électronique ?

R : C’était passionnant pour moi. C’est ce que j’ai adoré faire sur ce spectacle-là, parce que finalement je ne connais pas grand-chose à la danse. J’adore ça mais je suis un novice, un naïf. Là, je rencontrais des danseurs qui pour moi étaient des extraterrestres, de la même manière qu’eux me regardaient un peu comme un extraterrestre, parce qu’ils ne savent pas du tout comment je fais de la musique. C’était une belle rencontre, où l’on s’est pas mal observé au départ. Après sont venues les séances de répétition où je jouais de la musique et ils dansaient par-dessus. Je me suis rendu compte de plein de trucs, notamment qu’il fallait que j’aille à l’essentiel dans ma musique, c’est-à-dire que plus ma musique était épurée et plus ils pouvaient s’exprimer facilement. Si ma musique était chargée, qu’il y avait trop de sons, que c’était trop massif, ils étaient un peu étouffés là-dedans et ça ne rendait pas très bien chorégraphiquement. Ça m’a obligé à vraiment aller à l’essentiel et à épurer ma musique, ce que j’ai trouvé très intéressant. C’est l’une des premières leçons que j’ai tirées de cette collaboration. Mais il y en a plein d’autres. Le côté très humain, collectif. Habituellement je travaille seul dans mon studio, et tout d’un coup on travaille tous au service d’une même œuvre. Un peu comme je m’imagine un tournage de film où, du script à la costumière, tout le monde va dans le même sens, et je trouve ça super fort.

LVP : Tu as été composer l’album dans une propriété de Georges Sand où Frédéric Chopin a également séjourné, cet endroit a influencé ta création ?

R : Oui ! Ce n’est pas tant le fait d’être dans une maison prestigieuse, qui ait un gros passé. C’est que de toute manière, à chaque album, j’ai besoin de m’isoler, de me couper un peu de ma famille, de mes amis, de ma ville. M’éloigner pour me retrouver seul et faire du son, c’est un peu ma recette depuis le premier album. En fait, je rencontre beaucoup de gens en interview, et du coup, à chaque album, on me propose plein de lieux de résidence. Là, le Centre des Monuments Nationaux m’a proposé de travailler dans la maison de Georges Sand. Je me suis dit « Bon OK, pourquoi pas ? », même si je n’y croyais pas trop. Effectivement c’est une très jolie maison, complètement isolée dans le centre de la France, au fin fond du Berry, qui est une région que je ne connaissais pas du tout. Je n’ai même pas le permis donc on m’a vraiment déposé là et j’y suis resté deux semaines. Et en fait j’ai super bien bossé, c’est là où j’ai posé une bonne base de l’album. D’abord, c’est un endroit très calme, au milieu de la forêt, mais effectivement aussi chargé d’histoire. Et de fantômes même. J’avais l’impression d’être le gardien dans Shining, parce que j’étais là pour travailler et composer, mais j’étais seul. Dans la journée, il y a des visites, mais vers 17-18h ça ferme et je me retrouve tout seul. Dans le jardin, il y a un petit cimetière dans lequel est enterrée Georges Sand, donc il y a un côté très fantomatique, c’est vraiment chargé. Ce que je trouve super intéressant, c’est que Chopin, donc l’amant de Georges Sand, a composé les deux tiers de son œuvre là-bas. Il n’arrivait pas à travailler à Paris, un peu comme moi, donc il allait se réfugier chez sa maîtresse, six mois dans l’année, pour composer. Et donc, dans un de mes morceaux il y a un petit clin d’œil, une petite ritournelle de Chopin que j’ai calée. Il y a aussi le morceau Sophora Japonica, qui est le nom d’un arbre que l’on trouve dans le jardin, etc.

LVP : C’était une volonté de rapprocher l’album de la nature et de l’humain en général ? Avec des titres comme Gingko Biloba, Sophora Japonica

R : Oui. L’album est fortement lié au spectacle. Quand on a commencé l’écriture avec (La)Horde et qu’on s’est demandé ce qu’on allait raconter, je leur ai dit tout de suite que pour moi il y avait un thème incontournable qu’on devait traiter : c’était l’urgence climatique. Ça me semblait vraiment être le thème le plus énorme et le plus envahissant. En même temps, j’avais conscience que c’était un peu casse-gueule. On pouvait soit faire un truc un peu gentillet, naïf, écolo, du style « On est les gentils, il y a les méchants qui polluent ». Évidemment, c’est beaucoup plus compliqué que ça. Moi-même je me sens responsable, d’une certaine manière, de l’effondrement climatique. Tout l’album, je l’ai composé en me questionnant sur ces thèmes-là. Et c’est vrai que les titres sont venus tout seuls. Human, c’est vraiment la place de l’homme dans la nature. Ce bras de fer entre la nature et l’homme, qui parfois est un accord parfait quand on est seul sous un arbre, puis d’autres fois on se rend compte qu’on est en train de détruire la nature. Ou bien, c’est la nature qui reprend ses droits. Donc j’ai essayé de retranscrire ça. Musicalement c’est très abstrait, parce que je ne pense pas que ce soit évident pour les gens qui écoutent la musique, mais plus à travers les titres, en donnant des noms d’arbres, le crapaud doré aussi, qui serait le premier animal qui aurait disparu des suites du réchauffement climatique. J’essaye de poser des petites clés de lecture.

LVP : On sent l’album assez engagé, est-ce qu’il peut devenir en quelque sorte le symbole d’une lutte pour l’environnement ?

R : Ce serait super ! Après, je n’ai pas cette prétention-là du tout. C’est juste que je réfléchis à comment je peux me rendre utile en tant que musicien. Je me dis que ça ne suffit peut-être pas de faire danser des gens dans des clubs. Maintenant que je suis papa et que j’ai deux enfants, je m’inquiète un peu pour eux, pour leur avenir, le monde que l’on va leur laisser. J’aimerais bien essayer d’agir à mon échelle. Je me suis demandé comment je pouvais essayer de porter des messages à travers ma musique. Étant donné que je ne suis pas rappeur ou chanteur, je ne peux pas dire des choses à travers des mots, à part en interview. Ma musique est instrumentale, donc je sais peut-être plus comment porter le message de personnes qui me touchent, comme Alain Damasio l’écrivain, ou Aurélien Barrau le scientifique. Ils disent des choses qui m’interpellent et j’essaye de porter leur message sur un plateau, qui est ma musique.

LVP : Est-ce que, dès lors, l’album a un rôle politique ? Et même la musique au sens large ?

R : Clairement, je pense que oui. Je m’en rends compte vraiment, là, avec le spectacle qu’on a fait au Châtelet. Il n’y a pas un seul mot de prononcé, il n’y a pas de dialogues, ce n’est que de la danse et de la musique. Mais pourtant, je crois qu’on a réussi à faire passer quelque chose. Aujourd’hui encore je reçois plein de messages de personnes sur les réseaux sociaux, qui me disent que ça les a fait cogiter. En fait je crois qu’à travers l’art, on peut vraiment arriver à toucher les gens de manière très efficace, parce qu’on touche l’affect. On entend partout maintenant que c’est l’effondrement, la fin du monde, on nous parle de collapsologie. Et on continue à vivre un peu comme des zombies. Comme dit Alain Damasio dans le morceau Nouveau Monde, il faut que la perception tourne, que l’on prenne vraiment conscience de choses. Et parfois l’art permet de plus marquer les esprits, d’ouvrir les crânes. C’est là où on a un rôle à jouer, les musiciens, les peintres, les réalisateurs, les artistes.

LVP : Le titre de l’album peut être relié à la vue que chacun a sur le monde. Quelle serait la tienne, de vue sur le monde ?

R : C’est exactement ça, pour moi c’est une des interprétations possibles. J’ai choisi ça car je ne voulais pas me poser comme un moralisateur, à donner des leçons sur l’écologie, alors qu’encore une fois, je me sens responsable aussi. Le problème, c’est nous tous, mais la solution c’est nous tous aussi. Donc je me posais plus comme un observateur. Et quand je dis Room With A View, ce n’est pas forcément la fenêtre, ça peut être aussi l’écran du smartphone qui nous bombarde d’informations, comment on reçoit ces informations-là, comment on les digère. Et comment j’en fais de la musique, par exemple. Moi, personnellement, je dirais que tout cela est très anxiogène, très angoissant. Surtout en ce moment avec ce qui nous arrive, où l’on a l’impression d’être dans un film de science-fiction. Le futur n’a jamais été aussi incertain. Mais en même temps, je me dis qu’il faut être optimiste. J’ai la sensation qu’on a vraiment, maintenant, la possibilité de changer les choses. Ce sont les derniers moments pour redresser la barre. Sinon on sent qu’on est dans un système qui se fissure et qu’on arrive au bout d’un truc. Alors soit on arrive à rebondir derrière, et ce serait magnifique. Soit c’est la fin d’une civilisation, la fin du monde, je ne sais pas. Mais il faut rester optimiste et positif, sinon autant se tirer une balle tout de suite.

LVP : On sent un certain virage de style après Mirapolis, certains disent que c’est un retour aux sources, qu’est-ce que tu en penses ?

R : Je suis assez d’accord. C’est très bizarre parce que c’est mon cinquième album, et d’un côté j’ai l’impression d’avancer, la sensation de grandir, que ma musique est de plus en plus mature. Et de l’autre côté il y a un effet un peu cyclique, où je reviens à des choses que je faisais au départ, c’est-à-dire une musique purement électronique, il n’y a pas de chanteurs. Je reviens à un truc beaucoup plus pur, comme au début. C’est peut-être l’album qui est le plus proche du premier pour ça. Mais je trouve que le premier était très naïf et spontané, c’était l’album d’un petit garçon, et maintenant c’est plus un papa qui fait un disque.

LVP : On a pu te voir en 2017 aux côtés de Jacques, Superpoze et Fakear, dans le documentaire French Waves, où vous étiez présentés un peu comme le renouveau de la French Touch. Est-ce que tu t’identifies dans la continuité du mouvement, ou plus dans un renouveau au niveau de la musique électronique en France ?

R : C’est une question qui est toujours un peu difficile, parce que cette histoire de French Touch, French Touch 2.0… Je suis complètement perdu là-dedans. Ce qui est sûr c’est que ça a du sens de parler d’une French Touch pour la première vague Daft Punk, etc. On arrive un peu à repérer l’époque et les personnalités. Après, moi, je suis perdu. Et surtout, les musiques sont tellement différentes. Curieusement, moi, les musiciens qui me semblent les plus proches, ce ne sont pas du tout des musiciens de musique électronique. D’ailleurs, les musiciens avec qui je travaille viennent souvent d’autres univers. Donc il n’y a pas ce phénomène, qu’il pouvait y avoir avant, de « scène house française ». Là, j’ai l’impression que c’est un peu plus éclaté. Donc je ne sais pas trop, je ne réfléchis pas trop à ça, en même temps. Je réfléchis plus à l’évolution du son, comment faire évoluer le son électronique. Parce que c’est vrai que je suis quand même un musicien électronique, mes instruments ce sont des machines, ça c’est clair. Mais par contre, ma musique, plus ça va et moins je la décrirais comme de la musique électronique. Parce que justement, j’essaye d’en faire quelque chose de plus organique et souvent de collaborer, comme il n’y a pas longtemps, avec un orchestre symphonique. C’est plus faire de la musique tout court, et pas un style de musique. Je ne fais plus du tout de DJ set, depuis près de dix ans je ne fais que des lives, mais quand j’étais DJ, ce côté de grosse étiquette sur plein de sous-genres de musiques électroniques, je me perdais un peu là-dedans. Pour moi c’est de la musique et puis c’est tout.

LVP : Tes influences dans le milieu, ce serait qui ?

R : Je n’écoute pas beaucoup de musique électronique. Je suis même un peu largué là-dedans. J’en écoute un peu quand même. Par exemple James Holden, il y a des personnalités comme ça à qui je me suis attaché et dont je suis un peu le parcours. J’aime bien voir comment leurs sons évoluent, d’album en album. Mais en vérité j’écoute plein d’autres choses, beaucoup de musique classique justement. Il y a un truc, c’est que quand je compose un album, je n’écoute vraiment pas de musique parce que j’essaye d’être dans ma bulle. Par contre, quand je suis en tournée, j’écoute plein de sons, je rattrape le temps perdu, je me nourris. Donc là je sors d’une phase où je n’écoutais rien du tout, donc je suis complètement à la ramasse.

LVP : Après Room With A View, quels sont tes plans ?

R : Évidemment, tout est un peu chamboulé, il devait y avoir une tournée, il y avait plein de super trucs prévus. Je suis un peu dégoûté d’ailleurs. Mais dans un premier temps, surtout retrouver mon studio, dans lequel je ne suis pas allé depuis un mois, récupérer mes machines, et me remettre à faire du son. Et puis après, le truc que j’attends avec impatience, c’est retrouver un public, sortir.


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