Sans Contact, Gwendoline attrape tout sur son passage
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Auteur·ice : Joseph Lanfranchi
03/12/2022

Sans Contact, Gwendoline attrape tout sur son passage

Leurs paroles claquent les vérités sinistres avec un flegme à la limite de l’indécence. Mais c’est sur la crête que brille Gwendoline. Perché sur la cime, risquant à chaque morceau la chute vers la désillusion de façade à gauche, le dérapage vers un nihilisme rétrograde à droite. Pour l’instant, tout va bien. Sans doute car les deux Bretons ne sont pas du genre à zieuter sur les côtés, mais plutôt à fixer leurs regards usés droit devant eux, sur l’horizon grisâtre ou le prochain PMU. Et en passant le studio d’où sort tout juste leur dernier EP aussi brûlant que les engelures, Sans Contact.

Synthé monotone répétitif, ligne de basse glacée, voix traînante qui jette les couplets avec mépris, Gwendoline casse l’ambiance. Mais quelle ambiance ? Celle de la start-up nationale, des CSP+ bourré·es au Xanax qui mettent leur santé dans les mains de leurs cavistes ? Celle qui repousse les pauvres hors des centres-villes pour que la vie se calque sur les open spaces aux dents blanches et parfaites ? 

 

Tout en froidure, Gwendoline rabâche une poésie alourdie par le marasme économique ; la poésie de la catastrophe écologique et du génocide social. Une poésie écrasante qui plaque au sol nos émotions et inonde nos estomacs malades. Une poésie de la fange dans laquelle il vaut mieux se jeter la tête la première plutôt que de rejoindre la cohorte pyromane de Dimitri

À la haine de la poésie du startuper en Veja, le duo oppose une musique qui tient lieu à la fois d’exutoire et de déclaration d’amour. Car quoi qu’ils en disent, malgré leurs paroles apathiques et alcooliques qui lorgnent vers la cirrhose, Gwendoline ne sait pas s’en foutre, ne sait pas dormir des mois entiers, ne sait pas vivre loin de vous et voudrait seulement vous embrasser dans le débarras. Loin de moi mais proche du cœur.