Sous le soleil de Beauregard
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Auteur·ice : Charles Gallet
11/07/2019

Sous le soleil de Beauregard

Il existe deux règles très importantes pour un festival d’été réussi : du soleil et de la bonne musique. En ce premier week-end de juillet les astres semblaient s’être alignés puisque nos trois jours en terres normandes pour le festival Beauregard se sont déroulés sous un ciel bleu, une chaleur acceptable et beaucoup de bonne musique. On vous fait le point sur les cinq groupes qui auront marqué notre festival.

 

Idles

On dit souvent qu’il faut garder le meilleur pour la fin, malheureusement on est pas du genre à trop respecter les règles. On a donc décidé de lancer les hostilités avec le meilleur concert du week-end. On attendait beaucoup de Idles et le gang de Bristol ne nous aura pas déçu. Entre un Joe Talbot possédé, les guitaristes Mark Bowen et  Lee Kiernan qui auront passé autant de temps sur scène qu’à aller se balader dans le public, le gang de Bristol nous aura offert un show qui sentait la rage et le souffre. Il faut dire que la musique du quintette a tout du défouloir parfait, une rage punk comme on en avait pas vu depuis un bon moment en Angleterre (doit on remercier le Brexit pour ça ? Sans doute un peu) et des musiciens aussi énergiques que magnifiquement bons. On aura donc assisté assez ébahi à 50 minutes de puissance dévastatrice, de violence pas du tout rentrée et d’excellentes chansons à l’image du hit Danny Nedelko ou d’une Love Song toutes les deux reprises en chœur par un public connaisseur et venu en nombre pour voir la tornade Idles en action. Petite anecdote révélatrice, on avait vendu le groupe à un quadragénaire curieux et assez circonspect de notre enthousiasme assez lyrique, sa réponse après le concert vaut tous les reports “putain vous aviez bien raison”. À Beauregard comme ailleurs, Idles a donc régné sur les autres. Une baffe monumentale, on est déjà prêt à tendre l’autre joue.

We Hate You Please Die

On va continuer avec les chanteurs complètements fous et absolument fascinants. Si vous le croisiez dans la rue, on est à peu près certains que vous lui donneriez le bon dieu sans confession. Mais sur scène c’est une toute autre histoire. Un peu à la manière d’un Hulk, Raphael se transforme. Les yeux exorbités, presque la bave aux lèvres, le garçon s’oublie le temps de ses concerts pour devenir un autre. Ça pourrait être casse gueule, c’est foutrement réussi et absolument exaltant. Comment est-ce possible ? Tout simplement parce que cette énergie sans limite se retrouve conjuguée à la classe et au talent de ses camarades de scène : Chloé à la basse, Mathilde à la batterie et Joseph à la guitare jouent fort mais jouent surtout très bien et offrent un mur du son qu’on se prend en pleine gueule. Impossible de résister à cette énergie dévastatrice, à ce plaisir communicatif qu’ont les rouennais de jouer et de nous offrir leur musique, une découverte pour certains, une confirmation pour nous. On adore et on adhère à cette musique bien plus pop qu’elle n’y parait dans ses références et dans sa structure mais portée par une colère punk dans ses propos (féminisme, surconsommation, isolation…). On craque définitivement pour Melancholic Rain, Got The Manchu ou Hortense. Et si ces kids sont lo-fi, l’avenir leur appartient sans problème.

 

The Hives

On termine notre trilogie Beauregard des chanteurs charismatiques avec Howlin’ Pelle Almqvist. On va le dire sans aucun doute : The Hives avait manqué au rock. Sept ans tout de même depuis leur dernier album Lex Hives. Suffisant pour les oublier ? Certainement pour certains, mais pas pour nous. Il aura suffit d’une note, d’un son de guitare et d’un premier cri sur Come One pour nous ramener à notre bon souvenir. Oui The Hives est définitivement l’un des meilleurs groupes du monde (le meilleur si on les écoute, et on a parfois bien envie de le faire) et il l’auront prouvé une nouvelle fois ce soir-là. Programmés en tête d’affiche, ils auront fait honneur à leur statut. Et nous auront offert un set en forme de best of où on aura retrouver toutes nos chansons préférées de la toujours aussi fantastique Walk Idiot Walk en passant par Go Right Ahead ou Main Offender et Hate To Say I Told You So qui nous auront ramenés directement en adolescence. On aura aussi découvert avec plaisir que Good Samaritan et I’m Alive passaient avec aisance l’examen du live et on aura fini à terre sur la grandiloquente Tick Tick Boom. Bref, The Hives nous aura offert ce dont nous avions besoin : une parenthèse enchantée d’une heure et de bonheur. C’est sans doute pas grand chose, mais pour nous c’était beaucoup.

Jeanne Added

La vie de Jeanne Added ressemble désormais à un marathon. Et on se demande vraiment comment elle fait pour être toujours aussi “entière” à chaque date. Car la beauté d’un concert de Jeanne Added vient de là : chaque date ressemble à un combat, peut-être contre elle-même, sans doute avec le public. Et à chaque combat, c’est nous qui finissons K.O. Beauregard n’a pas échappé à la règle. Si la formule des festivals la pousse à aller à l’essentiel, à moins jouer sur le lyrisme et la poésie de sa musique pour plus chercher l’efficacité et l’énergie qui accapareront un public pas forcément venu pour la voir elle, la musique de la rémoise reste ce sable mouvant émotionnel qui nous entraine avec lui. Entre ombres et lumières, entre douceur et tension, la musique de Jeanne se promène et nous attrape le cœur sans qu’on puisse y faire grand chose. Comme un lion dans sa cage, elle arpente la scène et se donne sans compter, offrant une nouvelle fois des versions incroyables et toujours sur le fil de ses meilleurs titres que ce soit Radiate, Mutate, A War Is Coming ou l’intense Lydia qui reste cet uppercut toujours aussi fou, le tout bien aidé par des musiciens au diapason, rouages essentiels d’une musique au croisement de l’électronique, de la pop et du jazz. Au final Jeanne Added reste une valeur sûre, celle qui ne déçoit pas mais qui nous offre des subtilités et des changements qui font qu’à chaque concert, on l’aime un peu plus. On a déjà pris rendez vous aux Nuits Secrètes.

Rendez Vous

On avait coché leur nom et on était assez curieux. Pour nous Rendez Vous ça reste noir comme la nuit alors les voir jouer dans un festival au début de l’après midi avait tout de l’expérience aussi inattendue qu’absolument immanquable. Pour le dire clairement : la musique de Rendez Vous passe très bien sous le soleil. Si le public a semblé assez interloqué et peu réactif (on va leur pardonner et on se dira qu’on était quand même dimanche) malgré des applaudissements nourris entre chaque chansons, le post punk des parisiens reste toujours le genre de musique qui nous faire carrément vibrer, qui nous emporte et qui nous met une bonne fessée. Malgré quelques problèmes techniques, le quintette a tenu sa réputation de groupe live monstrueux qui nous retourne à chaque… rendez vous. Il faut dire qu’ils n’ont pas fait dans la demi-mesure enchainant leur titres les plus puissants entre les pépites de leur EP Distance que sont Euroshima, Distance et l’incroyable Workout et les titres de leur premier album Superior State que sont Sentimental Animal, Double Zero ou Last Stop, Rendez Vous démontre une fois encore qu’à une époque où on ne parle que de rap en France, le rock n’a jamais été aussi vivant et aussi brillant.

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