Les sonorités printanières et les jeunes pousses refont surface à l’arrivée des beaux jours. L’une d’entre elles n’a pas attendu longtemps avant d’éclore. Il s’agit de Susanoô, qui nous livre son premier EP, Ichi. Un accomplissement personnel pour ce rappeur de 23 ans qui a toutes les cartes en main pour construire son histoire dans la musique. Rencontre avec cet artiste polyvalent – auteur, compositeur et interprète.
Naviguant entre rap et chant, Susanoô nous offre un premier EP riche en sonorités et en textes. En effet, le rappeur du Mans met en pratique tout ce qu’il a pu apprendre dans sa jeunesse ; lui qui a très vite appris la guitare et le piano, avant de suivre des ateliers d’écriture et des cours de slam. Autant de compétences qu’il a pu exploiter sur ce premier projet. Au-delà de la technique et de la forme, les thèmes abordés sont très profonds pour une première rencontre. Il conte l’amour, les relations, son passé et son parcours. Notamment sur Milieu.
Le milieu c’est l’endroit où tu grandis. Tu dois réfléchir à comment survivre, progresser et t’épanouir dans cet environnement. Dans un endroit où ce n’est pas forcément toi qui as les règles ou initié les codes.
Raison, premier son de la tracklist, est l’un des morceaux forts de l’EP. Un morceau qui plante directement le décor. Susanoô n’hésite pas à rentrer dans un sujet complexe, qu’il développe tout au long du projet : les relations. Sa manière d’en parler évolue au fur et à mesure des morceaux en fonction de son état d’esprit. S’il évoque une certaine méfiance envers l’amour, qu’il considère parfois comme superficiel et dangereux, il le considère évidemment comme un passage obligé dans la vie de chacun. Avec des déceptions et des enseignements.
J’ai écrit Raison dans une période de rupture. Vu que je suis quelqu’un d’assez réservé, mes émotions se manifestent par pique. Soit, je suis à fond, soit c’est le vide total. Et du coup c’était dans une période creuse. C’est pour ça d’ailleurs que je commence le morceau avec un rejet des relations et à la fin il y a une petite ouverture qui est laissée, parce que tu ne peux pas vivre sans les autres et sans les émotions.
Avant tout, ce sont les relations en général qui l’intéressent. Sa manière d’en parler en dit long sur le personnage. Lui qui se dit très réservé et qui préfère souvent rester à l’écart dans sa bulle, semble trouver dans la musique une échappatoire et une manière de libérer ses émotions. Si Susanoô, arrive à nous embarquer dans son monde, c’est notamment par le biais des productions qu’il compose lui-même. Des sonorités légères et planantes qu’il pense et construit souvent en piano-voix ou accompagné de sa guitare.
Un bon morceau c’est un morceau qui peut se faire autant avec un orchestre, que juste avec une guitare, selon moi. J’ai joué beaucoup dans la rue avec la guitare. Du coup je pense mes morceaux d’abord en acoustique, puis je fais la production autour et j’essaye de coller le plus à l’ambiance et aux textes.
Si Susanoô se démarque sur le fond, par sa musique, il le fait également au niveau de la forme. En effet, la culture nipponne fait partie intégrante de son univers. Un imaginaire inspiré par les mangas et animés de son enfance, mais aussi par la mythologie et l’histoire. Autant d’éléments que l’on retrouve dans son propos artistique, en partant des visuels jusqu’à son nom d’artiste.
Quand j’ai commencé à rapper, j’avais un flow rapide à la Eminem. C’est comme ça qu’on en est arrivé à Susanoô, le dieu de la tempête, rapide comme le vent. Et au fur et à mesure on a construit un imaginaire autour de ça.
Les inspirations de Susanoô sont évidentes quand on écoute sa musique. Des paroliers comme Georges Brassens, Jacques Brel et Serge Gainsbourg font évidemment partie de sa culture. La chanson française l’a accompagné tout au long de sa jeunesse. Tout comme la musique noire américaine.
Quand j’apprenais le piano, je me suis saigné à Nat King Cole, Ray Charles, Stevie Wonder, Michael Jackson, etc. Je suis très ouvert musicalement parlant. J’écoute beaucoup de musique américaine, japonaise, française. J’essaye de creuser et d’approfondir mes horizons musicaux.
Ichi est un premier EP prometteur, cohérent et – surtout – personnel. Un projet, qui nous emmène rapidement dans un univers sensible et aérien. Comme si Susanoô voulait éviter les présentations et nous emmener directement dans son intimité et parler des choses qui comptent réellement à ses yeux.
Culture musicale inexistante car, pour certains, le rap n’en fait pas partie.
