Suzane, Alice et Moi et Silly Boy Blue nous en ont fait voir de toutes les couleurs aux Nuits Bota
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Auteur·ice : Valentin Dantinne
09/10/2020

Suzane, Alice et Moi et Silly Boy Blue nous en ont fait voir de toutes les couleurs aux Nuits Bota

Cher Univers, les serres illuminées du Botanique nous avaient manqué. Le bonheur : réentendre des basses résonner dans le Parc du Botanique. Le bonheur augmenté : venir contempler une affiche 100% féminine. Mesures sanitaires obligent, le public se range docilement dans des rangées de chaises sorties là dans le parc pour l’occasion. Masques sur les visages, mais heureux·ses. Cantonné·e·s au périmètre de sa propre chaise, mais heureux·ses. Suzane, Alice et Moi et Silly Boy Blue nous ont offert une palette de couleurs très éclectique, comme pour nous donner un éventail complet de styles et d’énergies condensé en une même soirée. Pour vivre chaque concert comme si c’était le dernier ?

© Photos : Stéphane Risack et Martin Tissot

Silly Boy Blue, noir pénombre

La lueur du jour est encore présente sur les jardins du Botanique et une jeune femme s’installe sur scène. Silly Boy Blue a déjà réussi à se faire sa place dans nos colonnes, et l’on est évidemment curieux et enthousiaste à l’idée de la voir se produire sur scène – pour la première fois – en Belgique. Ana, de son vrai nom, est une artiste qui, sans effort, a le don de vous ensorceler grâce à sa voix. La plus-value, c’est qu’autour de cette voix ensorcelante existe un univers. Certain·e·s diront glam rock, d’autres emo. Dans un paysage musical squatté par le rap et le hip hop, on n’aurait jamais pensé que qualifier une artiste d’emo nous aurait fait respirer. Silly Boy Blue, c’est le noir personnifié en musique. C’est le mascara qui coule sur une joue, camouflé par un drap de lit derrière lequel on se cache. L’artiste française s’est vêtue de noir, comme pour nous attirer dans sa pénombre. Une tentative de cacher ce noir avec une robe blanche et transparente par-dessus. Comme pour nous faire croire qu’elle n’est pas “si emo que ça”. Alors qu’elle nous chante son coeur brisé et son âme tourmentée d’une voix qui fait frissonner les haies du parc, cette robe blanche donne à Ana une allure fantomatique. Elle ne parviendra pourtant à pas nous tromper très longtemps : si le noir est sa couleur de prédilection, Silly Boy Blue nous apparaît davantage comme quelqu’un de lumineux. Comme une feuille de papier chargée d’encre qui, au fur et à mesure que ses sentiments filtrent dans sa voix, se vide de son liquide noir pour devenir immaculée. Elle performe pour la première fois en fin de set un morceau de son futur album à paraître, plus dansant et electro. Un avant-goût qui met l’eau à la bouche pour la suite, et un réel turn-up en fin de concert.

Alice et Moi, bleu jeans

Après la noirceur, changement d’ambiance avec Alice et Moi. Tout de jeans vêtue, Alice prend la scène comme terrain de jeu avec ses musiciens. Le ton devient beaucoup plus léger, enfantin et taquin alors que le public s’échauffe, se secoue devant sa chaise et chantonne les paroles de la jeune femme avec coeur, comme s’il n’avait plus chanté depuis si longtemps. Sur Filme-moi et J’veux sortir avec un rappeur, les voix s’élèvent, ce qui a le don de ravir Alice. Si un constat fut commun aux trois artistes ce soir-là, c’est bien celui de sentir l’émotion de chacune à l’idée d’avoir un public interagissant avec elles. Un public encore plus réceptif que d’habitude, après une privation frustrante de concerts. Les mélodies d’Alice sont vicieuses et efficaces, si bien que même encore après le concert les paroles de Filme-moi semblent emprisonnées dans nos têtes.

Suzane, orange feu

Le line-up de la soirée se clôture avec la fougueuse Suzane. Avancée de scène pour que l’artiste puisse s’amuser, visuels graphiques projetés à l’écran, le staging monte d’un cran. Si elle est vêtue de son traditionnel habit bleu klein, la couleur que nous inspire Suzane est davantage un orange feu, un orange chargé en chaleur. Un orange punch, comme celui qui s’affichera parfois à l’écran lors de certains morceaux. Suzane est une tornade. Scéniquement, elle dompte la scène et sait mettre l’espace à profit. Seule en scène, elle parvient pourtant à retourner le Parc du Botanique. Avec ses poses de boxeuse ou de karateka, la jeune femme ne passe jamais par quatre chemins et tape directement là où ça fait mal, dans le coeur du sujet, comme avec SLT ou Pas beaux, taclant le sexisme ou le culte de la minceur. Elle nous arrache même un frisson lors de P’tit gars, véritable morceau-allié des jeunes homos. La force de Suzane, c’est le poids de ses mots, avec l’insistance toujours placée au bon endroit. Surprise en plein concert : Témé Tan la rejoint sur scène pour le morceau Il est où le SAV. Alors que sa production dansante électrise le parc du Botanique, on se surprend à rêver de la voir jouer dans un club.

Si le thème commun de la soirée était celui des retrouvailles entre artistes et public le temps d’un instant, chacune des artistes aura réussi à amener son énergie sur scène. Pour notre plus grand bonheur, et celui des serres du Botanique, qui résonnent à nouveau.

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