Après s’être ressourcé du côté de Joshua Tree dans leur studio, The Head and the Heart reviennent après trois ans d’absence pour Living Mirage, un quatrième album qui semble être le plus important aux yeux du groupe comme l’a expliqué à plusieurs reprises le leader Jonathan Russel. C’est plus ouverts que jamais que ces introvertis reviennent, avec un album qui sonne plus pop-rock mais qui a su conserver ses aspects bruts et folk des débuts.
En 2016, le groupe essuyait le départ de Josiah Johnson, seconde tête pensante du groupe, peu avant la sortie du troisième album : Signs of Light. The Head and the Heart accueille désormais un nouveau membre : le guitariste et chanteur Matt Gervais, qui n’est autre que l’époux de la violoniste et seconde voix du groupe Charity Rose Thielen. Une arrivée qui a permis de reconstruire le groupe qui semblait avoir perdu son alchimie et voyait apparaître quelques fêlures au sein des amitiés depuis quelques temps. Living Mirage aura été en quelque sorte un moyen de digérer toutes ces difficultés et de se retrouver.
Cette reconstruction a également modifié la dynamique du groupe. Si d’ordinaire le groupe de Seattle était plutôt orienté vers une folk introvertie, dans Living Mirage, ce sont des rythmes et hymnes entêtants qui dominent avec une énergie pop que l’on ne leur connaissait pas. On retrouve ainsi énormément de percussions comme dans See It Throught My Eyes qui ouvre le bal. On les avait adoré dans leur premier album éponyme, très intimiste avec des morceaux murmurés sur fond de guitare sèche et aux paroles mélancoliques. On les redécouvre complètement extravertis et ayant quitté leur cocon folk, avec une maturité et l’audace se mettre en avant avec des morceaux qui appellent au « sing along » lors des refrains, dans le style de Of Monsters and Men, notamment avec des morceaux comme I Found Out et Up Against The Wall.
Chassé le naturel et il revient au galop, on retrouve tout de même les premiers émois qui nous ont fait craquer pour le groupe il y a plusieurs années. Tout d’abord, l’esprit folk et les notes sans artifice accompagnées de paroles crève-cœur qui ont fait toute la renommée du groupe dans le monde indie folk. Ici, on les retrouve dans la balade finale de l’album : Glory of Music où la voix rocailleuse de Jonathan Russel est accompagnée de sa guitare acoustique et de ses envolées en voix de tête. Loin de devenir un groupe pop à part entière, The Head and the Heart a su conserver l’esprit de leurs premiers albums en utilisant de vieilles recettes comme des solos de violon associés à des notes hautes portées par la voix si distincte de Charity Rose Thielen, que l’on trouve ici dans Saving Grace et qui nous a de suite rappeler les notes de Down in the Valley.
Si les groupes folk qui s’essayent à une énergie et dynamisme différents se brûlent parfois les ailes, ici il n’en est rien. The Head and the Heart transforme en effet cet essai avec succès en proposant un savant mélange de pop-rock old-school aux percussions et parfois quelques synthés et harmonica. Cette musicalité sonne comme un clin d’œil aux grands Ryan Adams et Bruce Springsteen notamment dans les titres Living Mirage et Running Through Hell. Un nouveau départ pop pour le groupe qui parvient tout de même à conserver son âme et son identité grâce à ses textes profonds et ses sonorités folks brutes mais délicates.
Jeune paire d’oreilles toujours parée d’écouteurs, un peu trop accro au folk et indie rock. Accepte quelques écarts commerciaux pour sauver ses amitiés.