The Linda Lindas : la révolution sera kawaii
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Auteur·ice : Chloé Merckx
15/04/2022

The Linda Lindas : la révolution sera kawaii

| Photo : Zen Sekisawa

Pour leur premier album Growing Up, The Linda Lindas s’arment de guitares électriques et de moustaches de chats, remettent à leur place les racist sexist boys, et forcément on adore ça ! Sur des airs de Bikini Kill, les 4 musiciennes de The Linda Lindas prouvent qu’elles n’ont pas froid aux yeux. Dans la continuité de Doll Skin et des Gully Boys, elles s’apprêtent à ouvrir la voie pour une toute nouvelle génération de rockeuses qui n’ont pas peur de faire du (beau) bruit.

Le comeback d’Avril Lavigne en aura inspiré plus d’un·e, mais cette nouvelle lignée de riot girls ne se languit pas devant des skater boys aux cheveux sales. Au bûcher les pantalons cargo et on sort sa jupe d’écolière. The Linda Lindas, c’est un peu le groupe de copines qu’on aurait adoré avoir à 17 ans. Bela Salazar, Eloise Wong, Lucia et Mila de la Garza commencent à jouer ensemble dans un cover band alors qu’elles sont encore à l’école. Arrive alors l’été, et elles ont enfin eu le temps de composer leurs propres chansons. Elles étaient alors bien loin de penser que leur performance de Racist, Sexist Boy dans une bibliothèque de LA les amènerait à performer pour le film Netflix Moxie. Le début d’une belle histoire.

Girl Power!

Ce n’est pas tous les jours qu’on tombe sur un girls band, dont les membres n’ont pas encore l’âge d’acheter de la bière en concert. Leur jeunesse se ressent d’ailleurs un peu dans leur compositions. Les riffs sont catchy, leurs mélodies parfois enfantines, presque tout droit sorties d’une série pour ados. Mais leur âge, bien loin d’être un désavantage, apporte une force de caractère à leurs chansons, et ancre leurs thèmes dans notre époque.

Chaque compo de l’album est à la fois écrite et chantée par une membre différente. Une approche assez peu commune mais qui, quand on y pense, a beaucoup de sens. Chacune a l’occasion de prendre et d’occuper l’espace, de s’exprimer sur ses joies et ses coups de gueule. Ces Gen Z ont clairement des choses à nous apprendre sur l’inclusion et la sororité !

It’s not a phase, mom

Oh!, le titre qui ouvre l’album, a, contrairement aux autres sons, été écrit par toutes les membres du groupe. Il introduit avec justesse leur univers adolescent et cette période assez complexe de l’acné et des cours de math. Cet âge pourri qui nous donne l’impression qu’on est jamais assez bien, que quoi que l’on fasse, on fait tout foirer. Cette période où à 14 ans, une goutte de sueur perle sur ton front quand Timothé demande si il peut t’emprunter ta gomme Diddle. Leur single Growing Up te donnerait carrément envie de retourner dans la chambre d’ado de ta meilleure pote où trônait un poster d’Edward Cullen, pour sauter dans tous les sens et chanter le refrain à tue-tête.

Cette chanson fait probablement référence à la scène d’intro du film Linda Linda Linda, teen movie japonais dont elles tirent également leur nom de scène, et dans lequel des étudiantes décident de former un band. Mais c’est aussi l’expérience de Lucia, la guitariste, qui, entamant sa première année d’high school, veut s’entourer de personnes qu’elle aime et accueillir l’incertitude de la vie à bras ouverts.

 

L’amitié est un thème récurent dans l’album et Talking to Myself n’y échappe pas. Dans leur clip, elles partagent des bubble teas, vont s’acheter des vinyles et des fringues vintage bras dessus, bras dessous tout en se murmurant à l’oreille “Parle-moi, au lieu de rester dans ta tête”. Le tout sur une mélodie enjouée qui te fait balancer tes couettes de chaque côté.

Puis viennent d’autres chansons plus coriaces comme Fine et Whycomposées par la bassiste Eloise. Des sons plus punk avec des guitares un peu moins clean et des textes plus engagés. On flaire l’influence du vinyle de X-Ray Spex en boucle sur la platine et d’un concert de Paramore en 2008, sur les épaules de papa (ou maman) avec un casque anti-bruit.

Cat Power!

Y’a rien à faire, on sait pas s’empêcher d’apprécier un band qui dédie ses chansons à des chats. La légende raconte qu’après que Bela ait écrit sur son chat Monica pour leur EP, son autre chat Nino a à son tour réclamé une ode à sa divinité féline. Une chanson drôle qui conte les exploits de chasse à la souris de ce cher matou. Mais c’est sur des airs de bossa que Bela ose être plus personnelle dans ses textes. Avec Cuantas Vecas, la guitariste plus discrète dédie une chanson en espagnol aux misfits, aux outsiders et à toutes celles et ceux qui ont du mal à s’intégrer.

Le titre Magic reflète assez bien leur univers à la fois coloré, capricieux et un peu rêveur. Comme un road trip au coucher de soleil sur la route de Los Angeles. Il y a quelque chose dont on ne se lasse jamais dans leur musique. Les regarder jouer nous réconforte et nous enflamme à la fois.

Nostalgique n’est peut-être pas le mot pour définir leur son, mais quelque chose nous évoque ces après-midis où on avait rien de mieux à faire que de regarder Disney Channel. Et on va pas se mentir, c’était la belle vie. Ces 4 filles qu’on croirait sorties du manga K-On! ouvrent une fenêtre sur cette période, pas si éloignée, mais qui nous apparaît déjà comme un lointain souvenir. Growing Up fait un peu l’effet d’une glace à la fraise dans un skatepark. Doux et sucré sous un rayon de soleil, mais bruyant comme les roulettes qui frôlent le bitume.