Trois ans après le très prometteur Family Portrait, Ross from Friends revient avec un nouvel album : Tread. Sous ce pseudonyme aussi hasardeux que sensé, le producteur britannique Felix Clary Weatherall continue à faire sa place sur la scène de l’électro moderne et confirme son talent sur un deuxième album, celui de la maturité sonore. Focus sur cette sortie musicale post-pandémie que l’on attendait avec impatience pour la réouverture des clubs.
Si vous ne connaissez pas encore Ross from Friends, c’est en résumé une sorte de nerd de l’électro hyper talentueux qui a marqué le monde de sa touche singulière dès la sortie de son premier album en 2018. Premier LP s’inspirant de ses parents et de leur relation à la musique, il contient notamment les titres Wear Me Down ou encore Project Cybersin où il mettait en pratique sa façon si personnelle d’assembler des sons d’influence quelconque. Constructions expérimentales, ses titres sont des accidents musicaux maîtrisés, mais parfois encore trop chargés.
Avec ce nouvel album, le producteur britannique semble aller à l’essentiel, se libérant d’un expérimentalisme trop dense et pas assez fluide (ce que l’on pourrait reprocher à son premier album) tout en gardant sa vision propre de l’assemblage musical. Point de départ de l’album, la frustration de Felix Clary Weatherall face aux limites créatives et logistiques qu’impose l’utilisation de l’ordinateur et ses programmes pour produire de la musique le force à créer son propre logiciel Tresho. Son plug-in lui permet de s’émanciper de ces contraintes constantes d’enregistrement et de sauvegarde pour continuer à créer et jouer de ses instruments pendant que Tresho permet au background audio de tourner en boucle. L’album Tread, sorti sur le label Brainfeeder, s’est donc construit à travers l’expérimentation de ce logiciel, nouvel outil de création pour Ross from Friends. Et c’est justement l’emploi de ce nouveau programme qui semble avoir permis à Ross from Friends d’affiner son son, devenu un son électro plus sobre et épuré. Même s’il continue à intégrer des influences très différentes, la production semble plus aboutie dans sa finalité : le son résonne avec justesse et efficacité, laissant davantage de place aux émotions. Ross from Friends caractérise d’ailleurs cet album comme un condensé de nostalgie puisqu’il rend hommage à toute la musique qu’il côtoiera dans le sud de Londres et construira ses souvenirs musicaux et sa propre chronologie acoustique. Tread est finalement un hommage à toutes ses références personnelles, à la dance music des années 90 et 2000 (on peut percevoir l’influence de titres tels que Show me love de Robin S. ou Better Off Alone d’Alice Deejay sur Love Divide), à son enfance, ajoutant une dimension émotive à ses titres.
Avec son premier single The Daisy sorti il y a deux mois, Ross from Friends teasait et annonçait déjà la couleur de l’album. Beat sobre mais énergique, utilisation de boucles hypnotiques d’une élégance dont seul lui a le secret, The Daisy inaugure parfaitement Tread. Le clip nous plonge dans l’univers des speed-cubers, ces aficionados souvent anglophones du célèbre Rubik’s Cube. The Daisy tire d’ailleurs son nom de l’une des techniques de résolution du casse-tête. Nostalgie visuelle et acoustique, Ross from Friends s’exécute de manière assumée dans un revival moderne du passé.
Même exercice sur les très bons Run ou Life In A Mind où Felix sample le titre disco Music Is My Way Of Life de Patti Labelle. Et puis, coup de cœur pour le titre Revellers sur lequel on espère danser jusqu’au début de la prochaine vague épidémique. Ross from Friends semble avoir trouvé la bonne formule avec ce nouvel album : l’artiste britannique épure ses productions pour s’autoriser quelques brefs moments où il démontre toutes ses capacités de producteur et sampleur prodige. L’élégance britannique à l’état pur !
Finalement, on n’oubliera pas que la force du projet de Ross from Friends c’est également sa formation live composée du trio Felix, Jed Hampson et John Dunk. Le trio se produira à Paris ce 04 novembre au Trabendo et à Bruxelles le 18 décembre prochain dans le cadre de l’évènement braindance_ de l’AB, nuit dédiée aux DJ les plus hype du moment. Et si vous les loupez cet hiver, ils continuent leur tournée cet été au Royaume-Uni et en Europe. Bref, don’t miss Ross!
Adepte des lectures aléatoires qui accompagnent mes mood swings, entre Feist, Michel Berger et Solange.
