Si vous aviez loupé qui était Muddy Monk, voici en quelques mots et en un EP ce qui fait la force de cet artiste. Arrivé en 2018, il nous avait déjà convaincu·es avec Longue Ride et d’autres collaborations inattendues (Myth Syzer, Ichon ou encore Bonnie Banane). Mais c’est sans aucun doute sa prosodie si singulière à la voix de Dave et aux mots de Christophe qui nous avaient touché·es. Nous n’avions donc qu’une hâte : écouter cette EP prometteur aux avant-goûts dystopiques.
Il y avait de quoi nous mettre l’eau à la bouche. L’artiste suisse avait d’ailleurs tout prévu pour nous faire patienter : une playlist de choix, un premier single et des visuels rétro-futuristes signés Dexter Maurer. Pourtant, ce qui nous avait manqué le plus, ce sont très certainement ses mots doux et ses thématiques passionnées. Même si le chanteur a trop souvent été considéré comme timoré, il nous prouve qu’avec Ultra tape le risque et l’audace sont de mise. Ce sont purement quinze minutes de romantisme électronique aux allures nébuleuses.
Encore un peu, c’est déjà ce que l’on se dit en écoutant le premier titre de cet EP. Il est un bon avant-goût de ce que nous réserve la suite. Des synthétiseurs osés et une voix caressant le ciel. Le titre pourrait même faire office de bande originale à la Nigthcall de Kavinsky (Drive) mais en ayant des tons plus lumineux. Nous retrouvons également avec plaisir sa poésie sûre traduite de mots tendres. Est ajouté à tout cela un clip synonyme de l’étreinte fragile et presque impossible exprimée tout au long du titre.
Mylenium fait ensuite son entrée, entre des crissements et la voix aérienne de l’artiste. Nous sommes à l’apogée de ce que peut être la tendresse et la nostalgie mélangées à une prod donnant un ton dramatique au single de l’album. C’est une belle dualité que l’on nous offre avec un commencement très lyrique et une fin instrumentalisée de synthés daft-punkiens. Cela donnera de l’ardeur pour démarrer Tout ça, tout en puissance. Ce troisième titre, c’est ce que la chanson française électronique peut faire de mieux. Un fond de mélodie soignée à l’allure d’une batterie lourde mêlée à des synthétiseurs à la vaporwave énergique. Nous attendions depuis le début du projet un véritable décollage, et nous l’avons enfin. Ces deux morceaux nous prouvent bien que l’artiste suisse s’est retranché au bout de ses limites pour oser et nous donner le meilleur.
Cependant, les morceaux Ternevent et Magnolia auraient pu davantage se trouver sur le premier projet de l’artiste suisse. Malgré une musique électro toujours aussi audacieuse, les thématiques sont néanmoins plus intimistes que ses confrères. Qui plus est, la fouge du début de l’EP n’y est plus, et nous retournons sur des bases plus mélancoliques. Toutefois, il faut noter que nous sommes bien loin des magnolias démodés et ringards à la Claude François quand le dernier titre de l’EP retentit. Un véritable effet de shoegaze s’empare du morceau, créant quelque chose de neuf et d’authentique à cette fin d’opus.
Ultra tape est pleine de promesses pour les futures œuvres de Muddy Monk. La prise de risque est remarquée, ce qui est d’autant plus efficace. L’artiste a su, en cinq titres aux identités fortes, créer une combinaison audacieuse et téméraire de variété électro-française. Nous attendons avec hâte le prochain chemin que le Suisse prendra pour nous emmener dans des contrées tantôt rideuses, tantôt robotiques.
Jeune Padawan musical guidé par l’aura de l’indie, du rock psyché et du post-punk. Parfois, le côté obscur me rattrape et je tombe dans la spirale infernale du disco, de Beyoncé et Léo Ferré.