| Photo : Tanguy Delavet
Véritable gisement de talents en devenir, la nouvelle scène française voit émerger l’un de ses fleurons les plus prometteurs : Pétrole Brut. Le jeune artiste, qui carbure à l’élan vital et fait glisser sa plume entre le bitume et le vertige, vient tout juste de révéler un premier EP à haut potentiel explosif. Un entretien garanti sans émission de gaz à effet de serre.
La Vague Parallèle : Hello Florian ! Est-ce que tu peux te présenter à celles et ceux qui ne te connaitraient pas encore ?
PB : Je m’appelle Pétrole Brut et je dirais que je fais de la chanson pop électro. J’aime utiliser ces trois termes et je tiens à mettre “chanson” en premier parce que j’ai l’ambition de faire des chansons avant tout. Mes influences, qui viennent de la pop et de la musique électronique, se retrouvent davantage dans les arrangements, dans l’habillage que je mets autour de ces chansons.
C’est un projet solo que je porte depuis environ deux ans, à la composition et sur scène. J’ai connu ma première signature en label en juillet dernier, chez Parlophone, alors que j’étais full indé. C’est un gros chamboulement pour moi, même si j’ai la chance d’avoir carte blanche sur la direction de mon projet. Et puis le 21 mai, je sors mon premier EP, dont je suis très fier.
LVP : Le parcours qui t’a mené jusqu’à la musique est assez atypique. Est-ce que tu peux nous expliquer comment tu en es arrivé à lancer ce projet ?
PB : Je suis né à Auxerre, en Bourgogne. C’est une ville qui est surtout connue pour le foot avec l’AJ Auxerre, des personnalités comme Guy Roux ou Djibril Cissé… Forcément, mon frère faisait du foot et quand je suis né, on m’a mis au foot aussi. Mon frère avait longtemps attendu d’avoir un petit frère pour jouer avec lui donc quand je suis arrivé, il ne m’a pas lâché. C’était un peu un projet Mbappé. J’ai donc fait du foot pendant une dizaine d’années et je me suis perdu au fur et à mesure. Les mentalités ont évolué et je ne m’y retrouvais plus.
C’est à ce moment-là que j’ai découvert la musique alors que ma famille n’est pas vraiment mélomane. Mon frère s’était acheté un piano parce qu’il s’était pété la jambe au foot et qu’il fallait qu’il s’occupe. Je suis rentré en sixième et j’ai eu un premier déclic avec les cours d’éducation musicale. Généralement, c’est un peu un tue-l’amour pour tout le monde mais pour moi, bizarrement, ça a été un vrai déclic. C’est la première fois que je chantais et qu’on me disait que ce n’était pas trop mal. Le fait de monter sur scène pour le spectacle de fin d’année, ça a été une vraie révélation pour moi. C’était incroyable. Être en représentation en public, voir que tu peux provoquer un sourire, une émotion… Je me suis dit que j’allais laisser tomber le foot pour continuer dans cette voie.
J’ai donc intégré une école de comédie musicale à Auxerre, un cursus chant-danse-théâtre. En parallèle, j’ai un pote qui a commencé à jouer de la guitare et on a monté un groupe de rock ensemble. Ces deux aventures musicales que j’ai menées en parallèle m’ont beaucoup apporté. Ça m’a donné envie de créer, de faire des chansons, de chercher, d’expérimenter. Ensuite, je suis parti en musicologie parce que c’est le cursus qui me paraissait concilier études et musique. Ce n’était pas du tout ce que j’imaginais mais ça m’a plu quand même. J’ai poussé jusqu’au master puis j’ai voulu aller en thèse pour travailler sur la sociologie de la musique. Au moment de me lancer, j’ai arrêté parce que je ne me voyais pas la tête dans les bouquins à parler de musique toute ma vie alors que j’avais surtout envie d’en faire, de la musique. Mes parents m’ont soutenu à la condition que j’assume cette décision jusqu’au bout, donc j’ai commencé à donner des cours de chant, à mener des projets d’action culturelle…
Quand j’ai décidé de me lancer, je n’avais pas l’impression d’y croire vraiment. Mais je me souviens quand même d’un moment charnière pour moi : dans le cadre de mon mémoire, je devais étudier un cas pratique et j’ai suivi Raphaël Herrerias de Terrenoire en répétition. C’était hyper intéressant, on voyait déjà qu’il y avait un talent incroyable. J’avais fait écouter mes maquettes à son bassiste et il m’avait fait des super retours. Je me souviens d’une phrase toute bête qu’il a eue : “t’es pas à l’abri que ça pète un jour”. C’est con mais ça m’a beaucoup marqué, ça m’a fait me rendre compte que ça pouvait m’être accessible alors que je pensais que c’était des parcours qui étaient réservés aux autres. Dans ma tête, ça a changé à ce moment-là.
LVP : Ton parcours est marqué par des choix forts, assez radicaux. C’est quoi, la boussole qui guide tous ces choix ?
PB : La boussole, elle est unique, c’est une seule chose : le plaisir. Je recherche le plaisir dans tout ce que je fais. Je suis quelqu’un d’assez cadré, d’assez rigoureux, donc ça me permet de trouver un fil conducteur dans tout ça. Mais c’est vrai qu’aujourd’hui, j’aime tous les aspects de ce que je fais. Même des choses qui peuvent paraître contraignantes comme la communication sur les réseaux par exemple, ça me fait plaisir de le faire parce que j’y retrouve du plaisir à créer.
Ça me fait un peu paniquer de me dire que je pourrais m’emmerder à faire la même chose toute ma vie. Donc je suis toujours à la recherche d’un plaisir supplémentaire. Ce n’est pas forcément une peur de la routine mais c’est vraiment que je me dis qu’on peut toujours aller plus loin. C’est ce qui guide mes choix.
LVP : Le point commun entre le foot et la musique, c’est que ce sont des premiers rôles, des costumes qui permettent d’occuper le devant de la scène. Cette idée, on la retrouve dans Évadé sur terre, un morceau dans lequel tu dis : “je serai le héros de ma vie”. Est-ce que la musique, pour toi, c’était aussi une manière d’avoir le contrôle de ta vie, d’en avoir le premier rôle ?
PB : Oui, peut-être, c’est vrai. Je n’ai pas le recul nécessaire pour le dire mais ce que je vois, c’est que dans ma recherche de plaisir, effectivement, on retrouve cette idée de la représentation. Donc j’imagine qu’il y a un lien avec ce que tu dis, mais il y a aussi eu un moment de ma vie de musicien où je kiffais juste être chez moi, faire des sons, me plonger dans des textures sans me dire que j’allais forcément porter ces musiques sur scène comme un héros. Il y a aussi quelque chose de très intime dans cette recherche du plaisir, je peux geeker des heures chez moi tout seul sans avoir forcément pour objectif la représentation.
Après, c’est le jeu aussi quand tu es musicien : il faut porter ton projet, l’incarner à fond. C’est un schéma qui est dicté par l’industrie mais ça me plaît beaucoup aussi.
LVP : Comment tu te sens à l’approche de la sortie de ton premier EP ?
PB : J’ai l’impression de reprendre mon souffle après un processus de création qui a été très rapide, très intense. Pour le moment, je ne me rends pas vraiment compte de ce qui va arriver, je me sens très extérieur à tout ça. J’ai tellement été à fond que j’ai l’impression que mon cerveau me dicte de me mettre un peu en retrait. Je vais sûrement ressentir de l’appréhension parce que sortir un disque, c’est un geste de vulnérabilité extrême.
Dans les six morceaux qui sont sur l’EP, il y en a quatre qui sont déjà sortis en single donc ça enlève une partie de la pression. J’ai déjà des résonances par rapport à l’essentiel du disque et le reste, ce sera du bonus. Et puis j’ai conscience du niveau de développement de mon projet, il reste très confidentiel pour l’instant. Le chemin sur lequel je m’avance, c’est un long chemin. Cet EP, c’est n’est que la première étape, ce n’est pas un couperet.
LVP : Est-ce que tu te souviens du point de départ de cet EP ?
PB : Pendant le confinement, je me suis acheté des synthés, un Sequential Prophet-6 et un Moog. J’ai un peu pété un câble mais je me suis dit qu’on allait être enfermé pendant deux mois et que j’allais en profiter. J’ai totalement été piqué par le son. J’ai travaillé sur beaucoup de textures, ce n’était pas du tout des chansons à ce moment-là mais plutôt des jeux, des recherches. J’écoutais beaucoup d’artistes comme Rival Consoles, les albums solos de Thom Yorke, Moderat, Weval… J’étais dans une forme de mimétisme vis-à-vis de ces artistes. Et puis ensuite, j’ai essayé de faire des chansons à partir de ces textures.
C’était difficile parce que quand tu commences par la prod, comme c’est mon cas, c’est difficile de coller un texte dessus pour en faire une chanson. Ça a donné lieu à tout un tas d’expérimentations. Dans un deuxième temps, j’ai plutôt essayé d’écrire des chansons en même temps que les prods et d’en faire un objet cohérent dès le début. Ça, ça date d’il y a un an et demi environ et ça a donné naissance à des morceaux comme Le grand saule, Banquise… Les autres titres sont nés un peu plus tard, Sans effort est arrivé en fin de parcours par exemple.
LVP : Cet EP, il a une forme presque documentaire, très vivante, puisqu’il est traversé par des interludes, des voix off qui l’enrichissent de témoignages, de petits morceaux de vie… Comment tu as travaillé cette structure ?
PB : Je m’intéresse beaucoup à la narration. J’aime beaucoup les artistes qui ne sont pas que musiciens et qui arrivent à faire déborder leur musique sur d’autres champs, que ce soit par la danse, par une certaine théâtralité sur scène, par des interludes entre des morceaux… Dès le début, j’ai eu envie de raconter quelque chose, c’est une dimension que je voulais donner à mon projet. Donc on a eu cette idée des interludes, qui a tout de même représenté beaucoup de travail. Parce qu’à chaque fois, il fallait que j’en crée les textes, les arrangements qui reprennent des bribes de composition de ce qui va suivre après, que j’enregistre mes proches… C’était un vrai défi.
Le premier interlude que j’ai créé, c’est celui du Grand saule. J’ai écrit cette chanson en prenant la métaphore du saule pleureur qui est chez mes parents, dans la maison familiale. Je me demande ce qui se passera quand cet arbre ne sera plus là, ce qu’il emportera avec lui. Et six mois plus tard, ma mère lâche un vocal dans lequel elle explique que le saule a été arraché par une tempête. Donc c’était facile de créer cet interlude, il n’y avait pas plus authentique que ça. Les autres, ce sont des échanges avec des amis sur l’amour, sur des sujets qui nous tenaient à coeur. J’aime bien la fiction-réalité, je trouve ça intéressant de mettre tout ça en scène. J’ai beaucoup expérimenté dans mes projets précédents et ça m’a beaucoup décomplexé, j’ai le sentiment que je ne m’interdis rien et c’est hyper plaisant.
LVP : Cette narration, on la retrouve aussi dans les clips. Comment est-ce que vous avez travaillé ça ?
PB : Quand tu regardes les clips à la suite, ça donne une espèce de court-métrage. On s’est aperçu que les chansons dessinaient un cheminement, qu’elles partaient de la nature pour arriver vers la grande ville, vers le béton, avec des péripéties amoureuses au milieu. On a voulu suivre ce schéma narratif, c’est une vision qu’on avait dès le début.
J’ai la chance d’avoir eu un réalisateur qui m’a suivi dans cette idée dès le début et qui s’appelle Tanguy Delavet. Je voudrais vraiment lui faire un gros big up parce qu’il a une grosse part dans ce projet, il a bossé comme un fou et c’est sa patte visuelle qui permet d’avoir un objet cohérent à la fin. On s’est dit qu’avec notre budget, on allait essayer de faire un maximum de clips pour incarner une image du projet, planter un drapeau esthétique et occuper le terrain médiatique. On s’est donné le défi d’enregistrer ces six clips en un week-end. On est parti au Havre parce qu’on voulait avoir cette vision brutaliste de la ville qu’on y retrouve beaucoup. Il y a aussi la mer et des espaces plus verts et ça nous permettait d’avoir ce triangle dans un périmètre restreint. Il y a un mélange de préparation qu’on a fait en amont sur les clips et d’impro sur le moment, de quelque chose de très instinctif. Quand je pense que Si on se perd en route a fini à la télé alors qu’on l’a tourné en une heure et quart…
LVP : Dans l’identité de ton projet, on retrouve beaucoup les trois piliers que tu évoquais dans le cursus que tu as suivi à tes débuts : le chant, qui est très incarné, la danse qui est très présente à travers la notion de mouvement dans tes clips et dans tes visuels, et le théâtre qu’on perçoit jusque dans la forme de ton EP.
PB : Je suis totalement d’accord sur ces trois piliers, c’est quelque chose que j’ai compris assez tardivement. La danse a débloqué quelque chose chez moi parce que danser quand tu es ado, à un moment de ta vie où tu n’es pas forcément à l’aise dans ton corps, ce n’est pas évident. Ça m’a enlevé le poids du regard de l’autre. Par la suite, je n’ai pas dansé pendant très longtemps et ce n’est que très récemment que cette corporalité est revenue. C’est depuis que j’ai lancé ce projet, en fait. Depuis deux ans, je ne réfléchis plus sur scène, je ne me regarde plus faire. J’existe simplement dans le moment. C’est là que je kiffe et c’est là que je me dis que les gens peuvent aimer ce qu’ils voient, parce que je ne suis pas un bon danseur mais je me dis que c’est galvanisant de voir quelqu’un qui ne réfléchit pas et qui donne son maximum, sans barrière pour freiner le mouvement.
LVP : J’ai le sentiment que ton projet repose sur un équilibre que tu portes jusque dans ton nom entre le brutalisme et la nature, la vie et la mort, la ville et la campagne… Ce qui est beau c’est que ce sont des notions opposées mais que dans ton projet, elles cohabitent, elles évoluent ensemble et elles ne se heurtent pas, il n’y a pas d’opposition frontale entre elles.
PB : Ça me fait plaisir que tu le ressentes parce que pour le coup, c’était une vraie volonté de jouer sur ces contrastes. Ce contraste, il existe à l’endroit de ma musique : j’aime les chansons, j’aime aussi la musique électronique et rejoindre les deux ce n’est pas toujours facile. Pour qu’une chanson existe, il faut toujours être précis dans ce que tu y mets.
Même sur scène, j’incarne quelque chose d’assez physique et ça surprend les gens qui me connaissent dans la vraie vie, ils ne me reconnaissent pas forcément sur scène. J’aime bien quand tu dis que ce sont des notions qui sont opposées mais qui ne se confrontent pas parce que dans notre société, c’est quelque chose qui est difficile à faire exister. J’aimerais continuer à faire des chansons qui sont politiques, qui ont une dimension sociale, mais avec cet angle-là, c’est-à-dire sans opposer les choses, sans opposer les gens. Les choses sont tellement clivées en ce moment, la nuance n’existe plus. Même Banquise, elle a un côté très caustique mais je ne suis pas du tout dans le jugement dedans parce que moi-même, je ne fais pas tout bien.
LVP : Ton projet est ancré dans son temps avec des préoccupations qui sont au coeur de notre époque : la lutte pour la préservation de l’environnement, l’évolution des relations… On a le sentiment que tu donnes à voir ces sujets par un prisme très personnel et pour autant, on s’y identifie très facilement. Comment est-ce que l’intime et l’universel se rejoignent dans ton projet ?
PB : Ça me fait plaisir que tu le perçoives comme ça. J’ai un peu de mal à savoir où ça se joue… Quand j’écris une chanson, j’essaye de me laisser aller à une forme d’impudeur sans que ce soit gênant.
Des artistes comme Orelsan ou Wallace Cleaver ont cette impudeur. Emmanuel Carrère aussi, en littérature. C’est une impudeur qui soulève des choses que chaque personne ressent mais qu’elle n’a pas forcément réussi à mettre en mots. C’est un endroit que je trouve très intéressant. Mes morceaux, je les écris pour moi en premier lieu, pour essayer de me comprendre, de m’analyser, de faire ma propre thérapie. Mais ça devient forcément universel à un moment parce que je les partage, parce que je suis lié aux gens, que je ne fais pas ma musique en autarcie. Il y a des points saillants auxquels les gens peuvent se raccrocher.
LVP : On te sent très inspiré par le travail de certains de tes contemporains : Zaho de Sagazan, Eddy de Pretto, Terrenoire, Souchon… Quelle place tu t’imagines parmi ce paysage musical ?
PB : La famille artistique dans laquelle je m’inscris, effectivement, je la visualise bien. Elle est assez large parce que ça peut être des artistes comme Albin de la Simone, Vincent Delerm, Florent Marchet, Jeanne Cherhal, Tim Dup… C’est vraiment de la chanson d’orfèvre, en fait. Il y a aussi toute cette nouvelle école de chanson française pop avec Zaho de Sagazan, Terrenoire, Yoa, Zélie, Solann, Suzanne… Je me retrouve vachement dans le projet de Suzanne, par exemple, dans ce qu’elle incarne sur scène.
Donc cette famille-là, elle s’articule en triangle entre les chansonniers (Léo Ferré, Serge Reggiani, Alain Souchon…), la famille électro (Moderat, Weval, Radiohead…) et cette nouvelle génération qui fait le pont entre les deux. Elle est facile à trouver ma place, là-dedans, parce que c’est un sillon qui a déjà été creusé. Des artistes comme Stromae ou Christine and the Queens ont vraiment déverrouillé des mentalités en prouvant qu’on pouvait faire de la pop en français qui groove. Moi, j’essaye de trouver ma singularité au milieu de cette grande famille.
LVP : L’élan vital qui traverse ton projet, on le retrouve dans cette parole physique, incarnée, viscérale que tu portes également sur scène. Comment est-ce que tu fais vivre ta musique en live ?
PB : J’essaye d’avoir une vision globale de mon projet, qui s’incarne dans mes morceaux et sur scène. J’essaye de viser quelque chose de performatif, un peu transartistique, avec les risques que ça comporte parce que je ne suis pas scénariste, ni danseur. Alors je tente des choses, parfois je me loupe et ça donne des lives qui sont nuls, où c’était too much, trop ambitieux… Mais là, je commence à trouver un équilibre qui passe par une vision performative, par l’incarnation du corps, le regard, l’interprétation… Ce sont des choses basiques mais j’essaye de les pousser au maximum.
On y retrouve ce mélange de cadrage et d’impro, avec une forme de théâtralité qui crée un liant entre les morceaux et qui donne une dimension de spectacle à l’ensemble. C’est une crête assez fragile, assez mince, parce que ça peut vite donner quelque chose de cringe. C’est comme ça que j’essaye de porter mon projet parce que je crois que ça permet de décupler l’élan vital dont tu parlais. J’ai envie que les gens qui me voient sur scène se disent qu’ils ont vécu quelque chose, qu’ils aiment ma musique ou pas.
LVP : Tu as d’ailleurs donné ton premier concert à Paris en tant que première partie d’Alain Souchon au Casino de Paris. Qu’est-ce que ça représentait pour toi ?
PB : C’était un vrai rêve. Alain Souchon, avec Léo Ferré, c’est la personne qui m’a donné envie d’écrire en français. C’est l’artiste qui m’a donné la perspective de ce que pouvait être de la pop avec des mots en français. Souchon, pour moi, c’était un peu comme un vieux meuble dans la maison familiale : c’est ce magnifique buffet scandinave des années 60, il est magnifique mais tu as toujours vécu avec donc tu n’y prêtes plus vraiment attention. Et puis quand tu pars de la maison, tu te rends compte d’à quel point il est beau et d’à quel point il compte pour toi.
Quand j’ai eu cette opportunité, je me suis senti hyper reconnaissant mais c’était aussi un peu de stress de jouer devant mon modèle. J’étais excité mais je voulais rester concentré pour faire quelque chose de pro. Tu sais, je ne suis pas de Paris donc je n’ai pas trop la culture des salles de spectacle. Quand je me suis dit que j’allais faire le Casino de Paris, je me suis dit “wow”. C’était incroyable.
LVP : Pour terminer, est-ce que tu pourrais partager avec nous un coup de coeur artistique ou musical récent ?
PB : Je voudrais parler d’un poète qui s’appelle Thomas Vinau. Il a écrit un recueil qui s’appelle Debout dans les fleurs sales que j’ai dévoré en deux-deux. Il a une écriture hyper singulière et j’y retrouve beaucoup de ce que tu décrivais de mon projet. C’est très naturaliste, poétique et en même temps très violent et réaliste.
En musique, je dirais ILS ME RIENT TOUS AU NEZ de Theodora. Je trouve qu’elle dégage une liberté exceptionnelle, ça fait un bien fou.
Pratiquant assidu du headbang nonchalant en milieu festif. Je dégaine mon stylo entre deux mouvements de tête.